Rugby : en France, le bel âge des moins de 20 ans
Rugby : en France, le bel âge des moins de 20 ans
Par Adrien Pécout (La Teste-de-Buch, Gironde, envoyé spécial)
Six champions du monde des moins de 20 ans figurent ce samedi dans la sélection des « Barbarians », l’équipe réserve du XV de France, face aux Tonga.
Le Français Louis Carbonel face à l’Afrique du Sud, le 7 juin à Narbonne, durant le championnat du monde des moins de 20 ans.
Des maillots bleus. Un ballon de rugby. Et pour conclure, une jolie coupe brandie au public. Il pourrait s’agir d’une blague de mauvais goût, s’agissant du XV de France (opposé samedi 10 novembre à l’Afrique du Sud) et de ses défaites à la chaîne. Cette scène a pourtant bien existé, mais pour les jeunes Français champions du monde des moins de 20 ans : finale gagnée à Béziers, en juin, contre l’Angleterre.
Cinq d’entre eux s’apprêtent maintenant à affronter les Tonga en qualité de titulaires, pour leur premier match avec la sélection des « Barbarians », l’équipe réserve du XV de France. Alignés d’office, au stade Chaban-Delmas de Bordeaux, ce samedi (à partir de 16 heures) : le Racingman Jordan Joseph, le Toulonnais Louis Carbonel, le Toulousain Romain Ntamack, le Lyonnais Pierre-Louis Barassi et l’Agenais Clément Laporte. Un sixième, Jean-Baptiste Gros (Toulon aussi), commencera remplaçant.
« Je ne me prends pas trop la tête, précise Laporte, après l’entraînement pluvieux de mardi matin, sur les installations du Rugby club bassin d’Arcachon. On va tous essayer de jouer notre carte samedi, sans se retourner le cerveau. » « Dans les catégories de jeunes, on envoie beaucoup plus de jeu, il y a beaucoup plus de mouvement, de folie », estime l’ailier (ou arrière) agenais. Manière de dire qu’il faudra encore du temps avant de s’adapter au rugby international des adultes, « au jeu un peu plus fermé ».
Le Mondial 2019 ? « Un peu tôt pour nous »
Dans moins d’un an, la sélection nationale des Tonga affrontera ensuite le XV de France pendant la Coupe du monde 2019, la prochaine grande échéance. « Je pense que ce sera un peu tôt pour nous », objecte Romain Ntamack, au nom de ses petits camarades. Le fils d’Emile, ancien international, se projette plutôt sur l’édition 2023 en France. Il aura 24 ans. « C’est quand même plus dans nos cordes », concède le jeune, tantôt ouvreur, tantôt trois-quarts.
En attendant, Ntamack junior aborde ce match contre les îles Tonga « avec presque zéro pression ». Sinon celle de poursuivre ce qu’il a entrepris avec le Stade toulousain, où il vient de signer un premier contrat professionnel de trois ans. Depuis la rentrée, le jeune homme a déjà joué six matchs sur neuf en Top 14, le championnat de France. Déjà l’équivalent de son total sur toute la saison précédente.
Romain N'Tamack avec le maillot des moins de 20 ans / GIUSEPPE CACACE / AFP
Sans jamais avoir encore disputé un match entier, Jordan Joseph en est à cinq apparitions avec le Racing en championnat, et une en Coupe d’Europe. « A court terme, j’ai l’objectif de jouer en Top 14. Sinon, convient le troisième-ligne, difficile d’espérer faire la Coupe du monde 2019 ou 2023… » Réponse logique pour le jeune homme, qui a déjà suivi des cours de « media training » (entraînement aux médias) dans les locaux de son club. Ce qu’il en a retenu ? Sujet « personnel » ! »
Jouer, jouer, encore jouer. Plus ou moins évident, selon la concurrence de recrues d’un peu partout. Pour Ugo Mola, entraîneur occasionnel des Barbarians et habituel du Stade toulousain, « l’une des clés du rugby français passe par le fait d’exposer nos jeunes joueurs et d’être en mesure de leur donner du temps de jeu. » Sans quoi, les promesses de ces Bleus 2018 resteront au stade d’espoirs déçus. Comme pour la génération championne du monde des moins de 21 ans, en 2006, malgré les Guirado, Médard, Mermoz…
Il y a aussi autre chose, insiste Ugo Mola. Peu importe le talent, peu importe la qualité de la formation, tant que le rugby professionnel français épuisera autant les joueurs (« onze mois sur douze »)… Avertissement pessimiste : « On peut le tourner comme on veut, notre championnat est pour le moment antinomique avec le rugby international et ce que l’on veut y faire. »
Loin de ces considérations, Clément Laporte a apprécié le début « très détendu » du rassemblement. L’esprit Barbarians, faut-il croire. Celui-là même qui peut vous faire démarrer un entraînement, mardi matin, avec quarante minutes de retard sur l’horaire indiqué. « Un soir, on a aussi bu quelques bières à l’hôtel. Une soirée vraiment sympa. En club, ça nous arrive, mais plutôt après le match. Moins en début de semaine… » Les jeunes séjournent à l’hôtel Haaïtza, au Pyla-sur-Mer. C’est William Téchoueyres qui doit être content : l’établissement est tenu par l’ancien rugbyman, toujours proche de Bernard Laporte, président de la Fédération française de rugby (FFR).
Samedi 17 novembre, les six Bleuets des « Babas » devraient ensuite retrouver tous leurs autres anciens coéquipiers de juin. A l’initiative de la FFR, ils assisteront au test-match de la France contre l’Argentine, au stade Pierre-Mauroy de Villeneuve-d’Ascq (Nord). L’occasion peut-être d’applaudir les grands débuts de Demba Bamba, le pilier de Brive, réserviste samedi contre l’Afrique du Sud, étant le seul de ces Bleuets à s’entraîner déjà avec le XV de France.