Pendant le tournoi de « PES » (un jeu de football) organisé par le Festival de l’électronique et du jeu vidéo d’Abidjan, en Côte d’Ivoire, le 24 novembre 2018. / SIA KAMBOU / AFP

« Je suis venu pour gagner ! », lance Cheick Kamagate, qui espère bien remporter le tournoi de PES, un jeu de foot, lors du deuxième Festival de l’électronique et du jeu vidéo d’Abidjan (FEJA), une manifestation pour promouvoir l’industrie du jeu vidéo en Afrique.

Ce bachelier ivoirien de 19 ans, qui s’adonne à sa passion « trois à quatre heures par jour », aimerait s’acheter du matériel de jeu avec la prime allouée au vainqueur du tournoi. « Si je peux, je travaillerai dans le jeu vidéo comme développeur, mais plutôt aux Etats-Unis », déclare ce futur étudiant en informatique.

L’Afrique ne représente actuellement que 1 % du marché mondial du jeu vidéo, selon des études menées par de grands cabinets de conseil internationaux et l’opérateur de télécoms Orange. Les pays pesant le plus sont l’Egypte, le Nigeria et l’Afrique du Sud. Mais elle constitue un débouché prometteur, grâce à sa vitalité démographique, à sa jeunesse et à sa soif de nouvelles technologies : un demi-milliard de moins de 25 ans, autant de personnes connectées à Internet, et un milliard d’abonnés à la téléphonie mobile, dont la moitié joue sur smartphone, relève Serge Thiam, consultant spécialisé.

Des « gamers » d’une dizaine de pays

« Le jeu vidéo représente un avenir pour les jeunes en Afrique, c’est une source de nouveaux emplois, un moyen de gagner sa vie », affirme Sidick Bakayoko, créateur de la société ivoirienne Paradise Game et fondateur du FEJA.

Le festival, organisé sur trois jours, de vendredi 23 à dimanche 25 novembre, se veut plus qu’un tournoi ; il ambitionne d’expliquer aux jeunes comment fonctionne l’industrie du jeu vidéo, quels métiers ce secteur propose et comment s’y former. Afin d’attirer le public, des « gamers » (joueurs professionnels) d’une dizaine de pays du continent ont été invités, pour participer aux côtés des visiteurs ivoiriens aux différents tournois de jeux d’aventure ou de e-sport.

Si l’envie et l’enthousiasme sont réels, les moyens financiers font défaut en Afrique, reconnaît Sidick Bakayoko. Les jeunes manquent d’argent pour acheter des jeux et « le modèle économique reste à trouver ». Aucune donnée n’est disponible sur le nombre total d’emplois que représente actuellement le secteur sur le continent.

Environ trois cents studios de développement de jeux y existent, mais il s’agit de micro-entreprises, qui emploient moins de cinq personnes, précise Sidick Bakayoko. Avec quelques success stories, comme celle du studio camerounais Kiro’o dont le jeu d’aventure Aurion (dans lequel un roi déchu tente de reconquérir son trône) a percé au niveau international.

Richesse culturelle

Plusieurs studios commencent aussi à émerger à Madagascar et en Centrafrique, selon M. Bakayoko, pour qui l’Afrique doit miser sur sa richesse culturelle afin de se différencier. Le point commun entre Aurion, Dahalo, développé par le studio malgache Lomay, ou The Boy in Savannah, du créateur togolais Pio Jules Tchedou : ils mettent en avant les cultures de leurs pays, dans un monde dominé par les jeux occidentaux ou asiatiques.

Un engagement largement salué par les joueurs présents au FEJA. « J’aimerais bien créer un jeu d’aventure inspiré de Soundiata Keïta », souverain mandingue et fondateur de l’empire du Mali au XIIIe siècle, explique Elie Kouadio Kouamé, un étudiant en infographie de 24 ans et « gamer » adepte de PES.

Belko Diallo, un Burkinabé de 22 ans venu disputer le tournoi de Street Fighter (jeu de combat), voit plus loin. Cet étudiant en médecine rêve « de combiner [sa discipline] et le jeu vidéo, en utilisant certaines technologies des jeux pour des examens médicaux ».

Les jeux vidéo africains font leurs games
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