Vladimir Poutine, à Buenos Aires, le 1er décembre. / MARCOS BRINDICCI / REUTERS

L’image de Vladimir Poutine hilare tapant dans la main de l’héritier saoudien, Mohammed Ben Salman, comme si les deux hommes se réjouissaient d’avoir joué un bon tour lors du sommet du G20 à Buenos Aires, samedi 1er décembre, a suscité des réactions indignées ou sarcastiques sur les réseaux sociaux en Russie. Mais c’est encore l’Ukraine qui a suscité le plus d’attention. Et la crise ouverte avec ce voisin, après la confrontation armée en mer Noire, entre les forces russes et la marine ukrainienne, a monopolisé la plupart des entretiens du chef du Kremlin avec ses pairs.

Privé de rencontre bilatérale avec Donald Trump, en représailles après les incidents survenus le 25 novembre au large de la Crimée qui ont abouti à la capture de trois bateaux et de vingt-quatre marins ukrainiens par la Russie, M. Poutine a livré sa version des faits au président américain « debout », comme il a lui-même décrit l’échange, en marge d’un dîner.

Refus de toute médiation

Face à son homologue français, Emmanuel Macron, ou avec la chancelière allemande, Angela Merkel, avec lesquels il a pu s’entretenir en aparté, il a même sorti un stylo pour dessiner sur le papier sa chronologie des événements. Aux journalistes ensuite, M. Poutine a assuré que « la guerre va continuer » dans l’est de l’Ukraine, tant que les autorités actuelles de Kiev « resteront au pouvoir ».

« C’est toujours plus facile de justifier ses échecs économiques par la guerre », a-t-il poursuivi, en accusant de nouveau son homologue ukrainien, Petro Porochenko, en campagne pour sa réélection, d’avoir provoqué les incidents en mer Noire pour des raisons de politique intérieure. Commencé en 2014 entre séparatistes prorusses soutenus par Moscou et forces ukrainiennes dans le Donbass, le conflit a fait plus de 10 000 morts.

A Buenos Aires, le chef du Kremlin n’a pourtant cherché à aucun moment à faire marche arrière dans cette nouvelle crise, refusant même toute médiation alors que l’Ukraine a instauré, le 28 novembre, la loi martiale dans plusieurs régions limitrophes de Russie pendant un mois, et limité par la même occasion l’entrée dans le pays pour tous les hommes russes âgés de 16 à 60 ans.

Les marins ukrainiens, placés en détention pour deux mois par la justice russe, ont été transférés depuis la Crimée dans la prison Lefortovo de Moscou. Pressé par ses interlocuteurs de faire un geste « d’apaisement », M. Poutine n’a montré, ici aussi, aucun signe d’ouverture. « La question d’échange n’a pas encore été soulevée, a-t-il déclaré. Il est encore trop tôt pour en parler, l’enquête est toujours en cours. Nous devons prouver le caractère provocateur des actions des autorités ukrainiennes et formaliser cela dans des documents juridiques. » Au passage, le chef de l’Etat russe a confirmé qu’il n’avait pas répondu à l’appel de M. Porochenko, quand ce dernier avait tenté vainement de le joindre le soir même de la capture des marins.

« Leur libération est une question purement politique et cela risque de traîner », résume avec fatalité l’avocat russe, Nikolaï Polozov. Chargé par Kiev de coordonner la défense des vingt-quatre marins – dont trois sont toujours hospitalisés dans la capitale russe – ce dernier possède une certaine expérience. Il avait été le conseil de la pilote ukrainienne, Nadejda Savtchenko, échangée contre deux prisonniers russes en mai 2016, après deux ans de détention.