L’enquête sur le trucage supposé du match PSG-Etoile rouge de Belgrade est au point mort
L’enquête sur le trucage supposé du match PSG-Etoile rouge de Belgrade est au point mort
Par Clément Guillou (Belgrade, envoyé spécial)
En l’absence de coopération serbe, l’affaire sur le match du 3 octobre patine. L’Etoile rouge de Belgrade a porté plainte en France pour dénonciation calomnieuse.
Zvezdan Terzic, le directeur général de l’Etoile rouge, au stade Marakana, à Belgrade le 9 décembre. / Vladimir Zivojinovic / Le Monde
Deux mois après la retentissante révélation de L’Equipe d’une enquête portant sur un éventuel match truqué entre le Paris-Saint-Germain et l’Etoile rouge de Belgrade en Ligue des champions, l’affaire est au point mort. Les enquêteurs n’ont rien d’autre qu’un tuyau imprécis et le score d’un match de football.
Le trucage supposé reposait sur le pari, par un dirigeant du club serbe, d’une somme de 5 millions d’euros portant sur une défaite belgradoise par cinq buts d’écart, le 3 octobre. La victoire 6-1 du PSG a crédibilisé le renseignement de l’informateur anonyme, même si, après la rencontre, le score ne surprenait personne, compte tenu de l’océan sportif et financier séparant les deux clubs.
La veille du match, les policiers du service central des courses et jeux avaient investi l’hôtel de luxe The Peninsula, à Paris, pour écouter discrètement l’entretien qui devait s’y tenir, selon l’informateur, entre le président du PSG, Nasser Al-Khelaïfi, et le dirigeant serbe. Aucun des deux hommes n’est venu.
Le soir même, le dirigeant devait, selon l’informateur, se rendre à une soirée dans un établissement de la capitale. Las, l’endroit était fermé. De quoi mettre en doute la crédibilité des informations du lanceur d’alerte, qui n’a jamais été en contact direct avec les Français : l’information transitait via l’UEFA et le Parquet national financier, ce qui a freiné la réactivité des policiers lors de ces quarante-huit heures décisives.
Un rapport d’expert sur la rencontre est attendu dans les prochaines semaines, mais il ne constitue jamais un élément décisif dans les affaires de match truqué. « Soit les Serbes nous débloquent la situation, soit quelqu’un nous donne des infos, soit… » Cette source proche de l’enquête s’avoue désabusée. « Sans coopération serbe, l’enquête va s’éteindre d’elle-même. On leur a envoyé une demande via Europol, mais nous n’avons toujours pas de réponse. »
Plainte pour dénonciation calomnieuse
Ce silence contraste avec l’engagement du chef de l’Etat serbe, Aleksandar Vucic, au lendemain des révélations de L’Equipe : « Nous ferons notre travail. Nos autorités seront en totale collaboration avec Interpol et la police française. »
Mais cette absence de réponse surprend moins lorsque l’on connaît les liens étroits entre Aleksandar Vucic et l’Etoile rouge de Belgrade, dont il est un fervent supporteur et un proche du président du club, l’ancienne légende yougoslave Dragan Dzajic.
Par ailleurs, l’état dégradé des relations entre la France et la Serbie n’incite pas non plus Belgrade à se montrer particulièrement coopératif.
Du côté de l’Etoile rouge de Belgrade et de ses avocats en France, Me Eric Dupont-Moretti et Antoine Vey, on attend sereinement la clôture de l’enquête. Le directeur général du club, Zvezdan Terzic, se dit à la disposition des enquêteurs français : « J’attends de savoir quelles personnes la police française veut interroger et le lendemain nous prenons l’avion pour Paris. Je veux qu’au plus vite ce montage se termine et que la tâche sur l’Etoile rouge soit effacée », a-t-il dit au Monde dans sa première interview depuis la naissance de l’affaire. Les dirigeants serbes devraient être convoqués au début de l’année prochaine.
L’Etoile rouge de Belgrade a déjà déposé plainte contre X pour dénonciation calomnieuse, afin de connaître l’identité de l’informateur de l’UEFA. Avec la conviction qu’il s’agit d’une manipulation qui visait à nuire, non pas à l’Etoile rouge, mais au Paris-Saint-Germain et plus particulièrement à son président, Nasser Al-Khelaïfi.
« Il faudra à un moment que ce nom soit donné, que quelqu’un endosse la responsabilité de toute cette affaire », insiste M. Terzic. La plainte devrait, selon toute vraisemblance, être instruite après la fin de la procédure principale.