Images postées dans le groupe Facebook « Alsace blocage national contre la hausse des taxes », mercredi 12 septembre.

Parmi les réactions à l’attentat de Strasbourg, les messages postés par les « gilets jaunes » mobilisés sur Facebook ont de quoi retenir l’attention. Ces dernières semaines, les groupes du réseau social sont devenus des terrains d’expression privilégiés pour commenter l’actualité. Dans la région Grand-Est, l’attentat meurtrier survenu mardi 11 décembre à Strasbourg est devenu, le soir des faits et au lendemain de l’attaque, un drame largement commenté dans les groupes de « gilets jaunes ».

De nombreux observateurs ont relevé les messages appuyant des théories du complot : l’attentat aurait été organisé par le gouvernement pour détourner l’attention des « gilets jaunes », ou neutraliser le mouvement.

Les indignations exprimées par le secrétaire d’Etat Laurent Nuñez, qui a vivement regretté mercredi matin ces « thèses complotistes », ne suffisent pas à lever le doute. « Vous pensez pas que l’attentat d’hier à Strasbourg est une manipulation ? Au moins Macron aura une bonne excuse pour ne pas nous rassembler, je comprends pas, le gars il vient en plein marché Noël il tue des gens et aucun policier là-bas ? C’est un coup d’Etat ! », demande, le même jour, Cihan dans le groupe « Gilets jaunes Lorraine ». Sur le groupe Facebook « Blocus 17 novembre 67320 Drulingen », un sondage tourne : plus de la moitié des 92 personnes y ayant répondu disent, aussi, voir un « coup d’Etat » dans cette attaque, et non un « acte terroriste ».

Sondage diffusé dans le groupe Facebook « Blocus 17 novembre 67320 drulingen », mercredi 12 décembre.

« Faut arrêter les conneries »

Sans aller jusque-là, beaucoup de membres regrettent le « timing » d’un attentat qui sera de nature à renforcer les mesures de sécurité, conduire à des interdictions de manifester, ou diminuer l’impact médiatique des « gilets jaunes ». « Un attentat ? Malheureusement c’est parfait pour eux. On oublie les gilets jaunes pour parler d’autres choses », poste Audrey dans un groupe de « gilets jaunes » de Mulhouse (Haut-Rhin). « Urgence d’état = pas de manifestation = pas d’acte 5 = Bravo Macron quel génie (…). Bravooo… », écrit Isabelle, dans le groupe Facebook de Drulingen (Bas-Rhin). « Sans vouloir vous décourager, oubliez l’acte 5 ce samedi… Avec les événements d’hier, le pays est en état d’alerte maximum, ce qui veut dire que toute manifestation est proscrite… », avance de son côté Gabriel, sur le groupe « Alsace blocage national contre la hausse des taxes ».

Sous ce genre de messages, le débat est vif : beaucoup de « gilets jaunes » regrettent des réactions de nature à décrédibiliser les revendications exprimées ces dernières semaines. « Alors, avec tout le respect pour tout le monde, faut arrêter les conneries, les gilets jaunes ne sont pas non plus le centre du monde. (…) Si l’Etat avait voulu stopper le mouvement des GJ, [il l’aurait] fait depuis longtemps. (…) Non mais sérieusement notre pays est vraiment pitoyable, entre les dirigeants qui sont à l’ouest mais une bonne partie du peuple qui l’est aussi », s’énerve Michael dans un débat du groupe Facebook de Drulingen.

« Les gilets jaunes passent juste pour des idiots avec ces théories du complot… Pensez un peu aux victimes et à leurs familles », regrette Emmanuelle. « Il y a des commentaires, je trouve ça honteux… ce qu’il se passe dans ma ville est une horreur, mon Dieu, courage aux victimes et à leurs familles », écrit Jonathan, sous un message appelant les administrateurs du groupe « Alsace blocage national contre la hausse des taxes » à fermer temporairement les commentaires pour éviter les dérapages – à l’image de ce qu’il s’est passé dans l’un des plus gros groupes des « gilets jaunes » au niveau national.

Drapeau en berne et bandeau noir

De fait, de nombreux autres messages et commentaires rendent, avant tout, hommage aux victimes, et relaient même des appels à la mobilisation. Un exemple parmi d’autres : un événement Facebook appelant à une « marche silencieuse » depuis le Parlement européen de Strasbourg, samedi 15 décembre, sous la bannière « Macron, incapable de gouverner, incapable de nous protéger ».

Exemple de réaction à l’attentat de Strasbourg, dans le groupe Facebok « Gilets Jaunes Alsace Secteur WASSELONNE - MARMOUTIER », mercredi 12 décembre.

« Drapeau français en berne et deuil pour les victimes… Courage aux blessés », poste, de son côté, Lauriane, dans le groupe « Les Gilets jaunes du rond-point de Phalsbourg ». Le message est accompagné d’une photographie d’un drapeau enroulé et entouré par un ruban noir, sur un rond-point bloqué, à côté d’un sapin de Noël.

« Pourquoi ne pas faire une minute de silence toutes les heures en bloquant les ronds-points en hommage aux victimes de Strasbourg et bien sûr les victimes du mouvement GJ », propose Alles Hueber, dans le groupe « Gilets jaunes Alsace secteur Wasselonne-Marmoutier ». « Pas de blocage… Vous risquez de vous mettre à dos les automobilistes qui jusqu’à présent vous soutiennent ! Je trouve qu’un bandeau noir serait plus respectueux. A mon humble avis », lui répond Céline. « Pas de manif mais une marche silencieuse de nuit au flambeau autour de nos ronds-points… Oui, on doit se draper de noir, suis d’accord », abonde Wilma.

Dessin posté dans le groupe Facebook des « gilets jaunes » de Drulingen, mercredi 12 décembre.