La bataille royale de « Fortnite » chamboule la donne
La bataille royale de « Fortnite » chamboule la donne
LE MONDE ECONOMIE
Ce jeu de tir à l’univers bon enfant a atteint la barre faramineuse des 200 millions d’inscrits. Il amène une nouvelle génération au jeu vidéo et redistribue les cartes.
Illustration du jeu vidéo « Fortnite ». / Epic Games
Il faut probablement remonter au début des années 1990 et à la mode de Street Fighter II pour voir un jeu vidéo s’imposer aussi vite comme la nouvelle coqueluche de toute une industrie. Le Fortnite Battle Royale, d’Epic Games, a été la star de l’année et le jeu le plus recherché par les constructeurs. PlayStation 4, Switch, Xbox One… Aucune des consoles du marché n’a fait l’économie d’une offre de lancement avec Fortnite intégré. Une preuve de plus de la popularité exceptionnelle de ce jeu de tir mâtiné de construction, à l’univers bon enfant, lancé initialement en 2017 et qui a explosé commercialement cette année.
Grâce à l’ajout du mode « battle royale » – cent joueurs s’affrontent jusqu’à ce qu’un seul survive –, il revendique désormais 200 millions d’inscrits, un chiffre inédit pour une production occidentale. « En matière de notoriété spontanée, c’est du jamais-vu. Jamais une nouvelle licence n’avait atteint une telle popularité aussi vite », relève Thomas Grellier, directeur associé et cofondateur d’EMIC. De quoi marquer et accompagner une génération entière : selon une étude du cabinet Newzoo, 68 % des joueurs de moins de 30 ans s’y sont déjà adonnés.
Les raisons de son succès sont multiples : popularité du concept de « battle royale », téléchargement gratuit, univers fantaisiste et cartoon inoffensif, grande variété des parties, possibilités de personnalisation, recours à des psychologues de l’interaction, nouveautés régulièrement ajoutées…
Antoine Griezmann signe ses buts de la danse du L
Les nombreuses vidéos que lui ont consacrées les youtubeurs n’ont fait qu’accélérer les choses, tout comme son adoption par des footballeurs comme Antoine Griezmann, qui signe régulièrement ses buts de la danse du L, une célébration issue du jeu. Son succès a été tel que même Call of Duty et Counter-Strike, séries de jeux de tir historiques, se sont converties au concept.
Non content d’avoir vampirisé l’attention médiatique durant toute l’année, Fortnite a lancé en décembre un nouveau mode « construction libre », qui vient directement empiéter sur les plates-bandes du plus grand phénomène des années 2010, Minecraft. Et son éditeur, l’américain Epic Games, longtemps spécialisé dans les jeux hollywoodiens à gros budget et les suites logicielles pour développeurs, a franchi un cap supplémentaire en lançant autour de Fortnite une boutique de vente de jeux en ligne, l’Epic Games Store, le 7 décembre. Portée par plusieurs exclusivités temporaires et un modèle de rétribution des créateurs plus généreux que la concurrence, elle s’est instantanément imposée comme l’alternative la plus ambitieuse à Steam, le mastodonte de la distribution dématérialisé sur ordinateur, dont le quasi-monopole fait grincer des dents depuis plusieurs années.
Un signe qui ne trompe pas : ce studio de 700 personnes basé en Caroline du Nord est valorisé 15 milliards de dollars (13,1 milliards d’euros), et son premier actionnaire – à 40 % – est le géant chinois du Web Tencent.