Un pont sur le fleuve Gambie pour développer les échanges en Afrique de l’Ouest
Un pont sur le fleuve Gambie pour développer les échanges en Afrique de l’Ouest
Le Monde.fr avec AFP
L’inauguration de l’ouvrage va permettre de désenclaver la Casamance et de doper les relations commerciales dans la sous-région.
Le pont de Farafégny, en Gambie. / DR
Après des décennies d’attente, le Sénégal et la Gambie inaugurent lundi 21 janvier un pont qui doit faire sauter un important bouchon sur le réseau routier ouest-africain, désenclaver la Casamance et doper les échanges commerciaux dans la sous-région. La Gambie est un petit pays anglophone d’Afrique de l’Ouest enclavé dans le Sénégal, à l’exception d’une étroite façade côtière prisée des touristes. Serpentant sur quelque 300 km le long du fleuve éponyme, c’est un passage quasi obligé pour qui veut se rendre du nord du Sénégal à sa région sud, la Casamance, à moins d’effectuer un fastidieux détour de plusieurs centaines de kilomètres.
Baptisée « Transgambienne », la route de quelque 25 km qui traverse l’ancienne colonie britannique du nord au sud, à une centaine de kilomètres à l’est de la capitale Banjul, était jusqu’ici interrompue à mi-chemin par le fleuve, obligeant les véhicules à emprunter un bac, source de « tracasseries » et de nombreux retards, selon la population et les transporteurs sénégalais, qui réclamaient la construction d’un pont depuis au moins les années 1960.
Un « événement historique »
C’est à présent chose faite, puisqu’un élégant ouvrage de béton clair de plus d’un kilomètre enjambe dorénavant le fleuve à quelques kilomètres au sud du poste-frontière de Farafégny. Haut comme un bâtiment de cinq étages, il permet le passage entre ses piliers de la plupart des bateaux qui naviguent sur le fleuve, la colonne vertébrale du pays.
Financé essentiellement par la Banque africaine de développement (BAD), avec une participation du Sénégal et de la Gambie, le pont, dont la construction avait débuté en 2015, devait être inauguré à 10 heures (GMT et locales) par le président sénégalais Macky Sall et son homologue gambien, Adama Barrow, qui a relancé les travaux après son élection il y a deux ans.
Il sera ouvert dès mardi aux véhicules légers (voitures, bus de moins de 35 places…) et à partir de juillet aux véhicules lourds, camions notamment. Dans un premier temps, le tarif pour l’emprunter sera le même que pour le bac, selon les autorités gambiennes. Son achèvement est un « événement historique », car il permettra le « désenclavement » de la Casamance, région touristique et agricole dont le développement a été freiné par son isolement géographique du reste du Sénégal et par une rébellion indépendantiste vieille de plus de 35 ans, aujourd’hui en sommeil, a souligné un conseiller personnel de Macky Sall, Abdoulaye Badji.
« Un lien économique vital »
Les agriculteurs casamançais « n’auront plus de soucis majeurs » pour transporter leur production (riz, légumes, noix de cajou, agrumes, mangues…) vers les grands marchés du nord du Sénégal, a-t-il ajouté, en se réjouissant que les marchandises « ne vont plus pourrir au cours du transport ». « Il s’agit d’un lien économique vital pour connecter les deux rives du fleuve Gambie, ainsi que la Gambie, le Sénégal et d’autres pays de la sous-région », a souligné la présidence gambienne. Le pont a pour vocation de s’intégrer dans le « corridor devant relier Dakar à Lagos, en passant par Bissau et Conakry », selon le ministre sénégalais des infrastructures, Abdoulaye Daouda Diallo.
L’ouverture du pont de Farafégny symbolise par ailleurs la bonne entente retrouvée entre les Etats gambien et sénégalais, dont les relations ont longtemps été marquées par des différends sur le transport, la pêche ou encore les frontières, bien que leurs habitants ont en commun des langues, des origines ethniques et entretiennent de nombreuses relations professionnelles, familiales ou commerciales.
Le climat entre Banjul et Dakar s’est réchauffé depuis l’arrivée à la tête de la Gambie de M. Barrow début 2017, le Sénégal ayant été à la pointe des pressions diplomatiques et surtout militaires de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cédéao) pour contraindre son prédécesseur, Yahya Jammeh, à lui céder le pouvoir après avoir dirigé le pays d’une main de fer pendant 22 ans. « Cela va tuer le business et des gens vont perdre leur travail. La plupart des motels et des restaurants vont être affectés parce que les voyageurs n’auront plus besoin de passer la nuit ici », regrettait toutefois Amie Njie, une habitante de Farafégny interrogée par l’AFP la veille de l’inauguration.
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