« Smilf » : la sexy maman s’essouffle
« Smilf » : la sexy maman s’essouffle
Par Renaud Machart
La créatrice, réalisatrice et actrice nord-américaine Frankie Shaw poursuit, avec la deuxième saison de « SMILF », le portrait d’une jeune mère bostonienne aux abois.
A ceux qui n’auraient pas fait sa connaissance au cours de la saison 1 de SMILF, diffusée il y a un an par Canal + séries -, rappelons que Bridgette est toujours cette ado attardée à côté de la plaque et au bord de la crise de nerfs, qui, le matin, enfile un maillot et un short de football sans passer nécessairement sous la douche. Avant de grignoter quelques corn flakes tombés sur la moquette sale à côté de la caisse d’un lapin dont la litière déborde.
Il faut parfois avoir l’estomac bien accroché pour suivre les aventures de cette créature immature, brouillonne, voleuse, injuste, raisonnneuse à l’occasion, qui a l’art suprême de se mettre des bâtons dans les roues et de ruiner à peu près tout ce qui s’offre à elle de manière positive.
On avait été intrigué par le portrait que fait Frankie Shaw (interprète de Bridgette, créatrice et réalisatrice d’une partie des épisodes de SMILF) de cette mère désenparée et boulimique (qui reçoit ses amants dans le lit où son jeune fils dort également) mais qui a pour chance d’être épaulée par sa propre mère, grande gueule et grand cœur, jouée par la formidable Rosie O’Donnell.
Mais, après avoir visionné les cinq premiers épisodes de la saison 2, on se lasse un peu de ce personnage pour lequel on ne parvient plus à éprouver la moindre empathie. Et il semblerait que Frankie Shaw ait elle-même ressenti la chose car elle semble vouloir ouvrir largement cette nouvelle saison à de nouveaux personnages, quitte même à faire disparaître Bridgette le temps d’un épisode entier.
On aura noté de gros clins-d’œil citatifs (au film In The Mood for Love, de Wong Kar-Wai, entre autres) et regretté l’abus de scènes oniriques, dont les vertus poétiques et révélatrices sont ruinées par de trop grosses ficelles. Le cinquième épisode nous ramène cinq ans en arrière (au moment de la grossesse de Bridgette) et semble indiquer que SMILF emprunte aussi, comme tant d’autres séries, le cheminement temporel rétrospectif et tente de remplir les trous laissés par le récit de la saison 1 en explicitant ce qui aurait peut-être dû rester subtilement énigmatique.
Des séquences dans l’actualité
En fin de saison 1, dans la mouvance #MeToo, Frankie Shaw avait, de manière assez injuste et désagréable, évoqué la situation de Woody Allen, accusé d’attouchements par sa fille adoptive Dylan Farrow (mais non poursuivi faute de preuves après enquête) ; cette saison, au cours d’une scène onirico-sexuelle, elle montre un personnage qui porte le masque de Harvey Weinstein, dont les actes de harcèlement sexuel présumés ont fait l’objet de multiples plaintes.
Entretremps, Frankie Shaw s’est trouvée elle-même accusée de harcèlement par l’actrice Samara Weaving, mise en position inconfortable pendant le tournage d’une scène de sexe. Il lui a été également reproché d’assembler des équipes d’écriture en fonction de leur couleur de peau. Ainsi que l’a rapporté le Hollywood Reporter, Rosie O’Donnell s’est aussi plainte d’un « tournage chaotique ».
Afin de ne pas trop perturber le lancement de la saison 2 de SMILF (acronyme qui, on le verra, ne signifie plus seulement « Single Mum I’d Like to Fuck » , c’est à dire, « mère célibataire bonne à baiser »), Frankie Shaw a fait publiquement amende honorable et Rosie O’Donnell sifflé la fin des hostilités et le retour de la récréation.
SMILF, série créée par Frankie Shaw. Avec Frankie Shaw, Rosie O’Donnell, Miguel Gomez, Samara Weaving, Connie Britton (EU, 2019, 8 × 30 min).
SMILF Saison 2 Bande Annonce (2019) Comédie
Durée : 01:44