Procès Nemmouche : vol du dossier assorti de menaces chez un avocat
Procès Nemmouche : vol du dossier assorti de menaces chez un avocat
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, Correspondant)
Sur son bureau, l’avocat a trouvé une batte de base-ball et la réplique d’une kalachnikov. Une réunion d’urgence est organisée mercredi pour évoquer d’éventuelles mesures de sécurité supplémentaires.
Fusil d’assaut kalachnikov et revolver Magnum, présentés comme pièces à conviction lors du procès de Mehdi Nemmouche et Nacer Bendrer, le 15 janvier. Une réplique du fusil d’assaut a été déposée chez Me Lurquin, où une copie de l’acte d’accusation a été dérobée. / POOL / REUTERS
L’avocat de l’une des parties civiles au procès d’assises de l’attentat du Musée juif de Belgique, qui se poursuit à Bruxelles, a été victime d’un vol étrange durant la nuit du mardi 29 au mercredi 30 janvier. Me Vincent Lurquin a constaté que des inconnus s’étaient introduits dans son cabinet de Berchem-Saint-Agathe en passant par les sous-sols, afin de dérober sa copie de l’acte d’accusation contre Mehdi Nemmouche et Nacer Brender. Son ordinateur portable a également été emporté. Sur son bureau, l’avocat a trouvé, mercredi matin, une batte de base-ball et la réplique d’une kalachnikov, l’une des armes utilisées, le 24 mai 2014, par le tireur qui a tué quatre personnes rue des Minimes.
Le parquet de Bruxelles, qui a recueilli la plainte de Me Lurquin, prend l’affaire très au sérieux et annonce qu’une enquête a été immédiatement ouverte « du chef de vol avec effraction et menaces par emblèmes ». Le parquet a désigné la police judiciaire fédérale pour mener les investigations. Les autorités s’inquiètent de l’usage qui pourrait être fait de ce dossier, qui comprend notamment les rapports d’expertise et des photos des victimes.
L’un des procureurs fédéraux du procès a annoncé une réunion d’urgence, mercredi après-midi, pour évoquer d’éventuelles mesures de sécurité supplémentaires. Le palais de justice de Bruxelles est sous haute surveillance depuis le début des audiences, avec une centaine de policiers mobilisés en permanence et des contrôles renforcés. « Je veux vous rassurer : tout est serein, tout est pris en charge », a indiqué, quant à elle, Laurence Massart, la présidente de la cour, à l’attention des 21 jurés – 12 effectifs et 9 suppléants.
Une tentative d’intimidation
Me Lurquin a, de son côté, clairement évoqué une tentative d’intimidation. Il défend une personne qui se trouvait dans le musée le jour de l’attentat mais n’a pas été aperçue par le tireur. Cette dame âgée de 81 ans, une artiste d’origine chilienne, a déjà comparu comme témoin et a indiqué qu’elle souffrait, depuis les faits auxquels elle a assisté, d’un trouble post-traumatique.
« Ceux qui veulent nous faire peur ne gagneront pas. Il faut continuer ce procès et aider les jurés à juger sans haine, sans crainte. C’est leur serment », a déclaré Me Lurquin, qui a précisé que « rien ne changeait malgré la menace ». Des personnes invitées à témoigner avaient déjà fait part à la cour de leurs appréhensions.
L’épisode ajoute encore à la tension après les audiences de mardi, marquées par une attaque de la défense de Mehdi Nemmouche contre les enquêteurs et les magistrats chargés de l’instruction. Me Sébastien Courtoy affirme que son client a été victime d’un vaste complot et est innocent des faits qui lui sont reprochés, malgré l’accumulation des indices à son encontre. L’avocat soutient aussi que le Roubaisien, installé à Molenbeek après son retour de Syrie et juste avant l’attentat, n’était pas lié à des djihadistes belges. L’accusé a été arrêté six jours après l’attentat, à Marseille, en possession d’un pistolet et de la kalachnikov qui aurait servi à l’attaque de la rue des Minimes.
Mercredi après-midi, de nouveaux débats houleux s’annonçaient, avec l’évocation des traces ADN. Les experts n’ont pas pu identifier formellement celles de Mehdi Nemmouche, alors que les images de vidéosurveillance ont montré que le tireur poussait la porte du Musée juif. Les avocats du Français en tirent argument pour affirmer que leur client n’est pas le tireur. Une version formellement contestée par l’accusation, qui souligne notamment que l’ADN de l’une des quatre victimes, Miriam Riva, qui avait, elle aussi, poussé la porte, n’a pas non plus été retrouvé.