Le président de la République, Emmanuel Macron, s’en est vivement pris aux partenaires sociaux jeudi 21 février à la suite de l’échec des négociations sur l’assurance-chômage intervenu mercredi. Il leur reproche notamment de se défausser de leurs responsabilités sur l’Etat qui va reprendre la main dans ce dossier.

« On vient d’avoir un exemple de vraie négociation sociale, a ironisé le chef de l’Etat, devant les présidents des départements réunis à l’Elysée. On a dit aux partenaires sociaux : “Trouvez-nous une solution pour le chômage, vous êtes autour de la table, vous êtes responsables”, alors même que les syndicats ne financent plus le chômage, c’est le contribuable. »

« On est dans un drôle de système ! Chaque jour dans le pays, on dit : “corps intermédiaires, démocratie territoriale, démocratie sociale, laissez-nous faire. Et quand on donne la main, on dit : “mon bon monsieur, c’est dur, reprenez-la. Et le gouvernement va devoir la reprendre, car on ne peut pas avoir un déficit cumulé sur le chômage comme on a depuis tant d’années. »

Bonus-malus

Après une réunion de la dernière chance mercredi, syndicats et patronat ont, en effet, échoué à trouver un accord sur la réforme de l’assurance-chômage voulue par l’exécutif. Les syndicats avaient fait du bonus-malus – un dispositif permettant de moduler les cotisations patronales en fonction du recours aux contrats de courte durée – une condition sine qua non de leur participation aux pourparlers. Mais le patronat est farouchement opposé à cette mécanique qu’il juge « mortifère » pour l’emploi.

Le gouvernement, qui demandait aussi de se mettre d’accord sur un plan d’économies de plus d’un milliard d’euros chaque année durant au moins trois ans, va maintenant reprendre la main. Avec deux objectifs supplémentaires :

  • réviser les règles sur le cumul emploi et chômage ;
  • prévoir un mécanisme pour lutter contre les contrats courts.

La sortie de M. Macron a été peu appréciée du côté des syndicats et du patronat. Répondant aux propos du président, le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, lui a lancé sur Twitter : « Et si la démocratie ne passait pas par des petites phrases polémiques ou médias interposés ? Nul doute qu’elle fonctionnerait mieux dans notre pays. »

« La démocratie sociale a souvent prouvé son efficacité et sa responsabilité lorsqu’elle n’est pas soumise à des lettres de cadrage impossibles, menant sciemment une négo dans l’impasse », a poursuivi Laurent Berger sur le réseau social. « Rechercher des boucs émissaires peut être tentant à court terme mais contre-productif pour l’avenir », a-t-il ajouté.

« Opération de communication »

De son côté, la CGT, dans un communiqué, reproche à M. Macron « de se livrer à une belle opération de communication qui relève du scandale, avec une opération de destruction depuis plusieurs mois ». Avant de poursuivre :

« Macron est un menteur, en prétendant que la protection sociale n’appartient plus aux salariés, et que les syndicats sont responsables de l’échec, quand celle-ci incombe au patronat… et à Macron lui-même ! (…) Macron est aussi un manipulateur : il a exigé une négociation impossible pour faire des économies sur le dos des chômeurs et au passage mettre la main sur la gestion de l’assurance-chômage. Le résultat possible est une exclusion de tous les contre-pouvoirs dans l’assurance-chômage. »

Le secrétaire général de Force ouvrière, Yves Veyrier, a également tenu à répondre aux critiques de M. Macron : « Non, monsieur le président de la République, on ne vient pas d’avoir une vraie négociation sociale. » Selon lui, « la lettre de cadrage que votre gouvernement a imposée, d’une part, et certaines de vos interventions publiques durant le déroulement de la négociation, d’autre part, ne nous ont pas donné la main mais allaient à l’encontre de ce principe. »

Des critiques formulées également par le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux sur Twitter : « Le gouvernement n’a pas donné la main aux partenaires sociaux, il leur a dit de négocier en indiquant publiquement les résultats de la négociation à l’avance, y compris pendant la négociation. »