« Il n’y a pas de planète B » : de Paris à Kampala, la jeunesse se mobilise pour le climat
« Il n’y a pas de planète B » : de Paris à Kampala, la jeunesse se mobilise pour le climat
Le Monde.fr avec AFP
Cette mobilisation, dans plus de 2 000 villes du monde et dans une centaine de pays, s’est inscrite dans le cadre du mouvement « Fridays for future », initiée par Greta Thunberg, jeune Suédoise de 16 ans.
« Fridays for future » : la mobilisation autour du monde
« C’est maintenant ou jamais. » De Nairobi à Sydney en passant par Paris ou New Delhi, des dizaines de milliers de jeunes ont manifesté vendredi 15 mars pour exiger des réponses politiques contre le réchauffement climatique.
Cette mobilisation, dans plus de 2 000 villes du monde et une centaine de pays, s’est inscrite dans le cadre du mouvement « Fridays for future » pour le climat, initiée par Greta Thunberg, jeune Suédoise de 16 ans, devenue en quelques mois une des principales jeunes activistes de la lutte contre le changement climatique.
« Nous faisons grève pour dire à nos gouvernements de faire leurs devoirs et de nous montrer des preuves ! » explique l’appel publié sur Facebook. Et la mobilisation se poursuit samedi avec plusieurs rassemblements prévus dans toute la France pour « défendre la justice climatique et sociale ».
- En France, les jeunes répondent en masse à l’appel de Greta Thunberg
Selon les organisateurs, plus de 160 000 personnes se sont mobilisées dans toute la France vendredi. Le plus gros rassemblement s’est déroulé à Paris. Entre 29 000, selon la police, et 50 000 personnes, selon les organisateurs, ont défilé vendredi après-midi dans la capitale. La foule partie du Panthéon, en passant par Montparnasse, était composée d’étudiants mais aussi de lycéens et de bien plus jeunes venus avec leurs parents.
Dans le cortège, on repérait des scouts, des membres de syndicats étudiants, un panneau « gilets jaunes Paris 20e ». Des slogans anticapitalistes fusaient entre les désormais classiques : « Et un, et deux, et trois degrés, c’est un crime contre l’humanité » ou « Rejoignez-nous, ne nous regardez pas ». Dans la matinée à La Défense, une centaine de lycéens et étudiants avaient bloqué pendant trois heures, dans le calme, l’entrée du siège de la Société générale, accusée de financer des projets énergétiques nuisibles au climat.
Puissant et joyeux déferlement sur le bd de Montparnasse à Paris. Ça sursaute et ça crie à chaque explosion de pét… https://t.co/ASGOAQFH2b
— remibx (@Rémi Barroux)
La mobilisation a également été très importante à Lyon où 12 000 jeunes ont défilé selon la préfecture. Des milliers de personnes ont également défilé à Nantes, Rennez, Strasbourg ou encore Marseille et Angers.
#YouthForClimate Mobilisation forte et passionnée à #Lyon. La clameur lycéenne monte de la place Bellecour. https://t.co/FiISoLydyk
— rschittly (@Richard Schittly)
Par ailleurs, à l’initiative du ministre de l’éducation, Jean-Michel Blanquer, des débats étaient organisés sur le climat dans les lycées français, vendredi après-midi. Mais cette initiative a été critiquée par les ONG et les associations estimant que ces débats allaient empêcher les élèves à se joindre au mouvement dans les rues françaises.
- Trente mille personnes à Bruxelles
Du côté de Bruxelles, où la mobilisation étudiante est forte depuis plusieurs semaines, quelque trente mille personnes, selon la police, ont manifesté vendredi après-midi. Elles entouraient la jeune Flamande Anuna De Wever, proche de Greta Thunberg et figure de proue du mouvement « Youth for climate » qui a déjà mobilisé à plusieurs reprises des dizaines de milliers de personnes dans les diverses régions belges. « L’événement est historique, c’est un signal très fort et le mouvement continue de croître », a-t-elle souligné.
Des élèves des écoles secondaires et des étudiants des universités côtoyaient, cette fois, des syndicalistes, des « Grands-Parents pour le climat », des « Teachers for Climate » et diverses associations de la société civile. Des représentants politiques des partis de gauche : PS, écologistes et Parti du travail (gauche radicale) étaient aussi présents, mais renvoyés à la fin du cortège.
Beaucoup de manifestants s’en prenaient, en effet, à ce qu’ils estiment être l’inaction des politiques et reprochaient notamment à la majorité actuelle et au gouvernement (en affaires courantes) du libéral Charles Michel de ne pas parvenir à faire voter une loi ambitieuse sur le climat avant les élections, qui auront lieu le 26 mai.
- Entre 15 000 et 20 000 personnes à Berlin
Plusieurs milliers de jeunes se sont rassemblés à Berlin, vendredi 15 mars. / Michael Sohn / AP
En Allemagne, 200 villes ont participé au mouvement au total. La mobilisation dans la capitale allemande est un record : deux fois plus que ce qu’attendait la police.
« J’étais à la première manifestation, à Berlin, mi-décembre, nous étions seulement 200, c’est incroyable comme le mouvement a pris rapidement de l’ampleur » raconte Jeremias Hursong, 17 ans, qui a manqué le lycée plusieurs fois le vendredi depuis décembre. Les lycéens rencontrés lors de la manifestation condamnent tous le charbon, qui leur semble loin et sale. Ils sont prêts à renoncer à la viande, à la voiture, aux vêtements neufs au profit de l’occasion, mais ils n’envisagent pas de ne pas découvrir le monde.
Dans les autres villes du pays, 8 000 personnes se sont rassemblées à Munich et près de 5 000 à Brême ou Francfort. Le mouvement citoyen Campact avance le chiffre de « 300 000 jeunes » en 200 lieux, pour « la plus grande manifestation pour le climat de l’histoire de l’Allemagne », un bilan toutefois difficile à vérifier.
- Des milliers de personnes rassemblées au Royaume-Uni
Plus de 10 000 jeunes à Londres, plusieurs milliers à Birmingham, plus de 1 000 à Brighton, des centaines à Newcastle, Manchester, Bradford… Un peu partout à travers le Royaume-Uni, au gré des mobilisations locales, lycéens et étudiants sont descendus dans la rue vendredi pour signifier leur inquiétude contre le changement climatique.
« C’est notre future. » « Il n’y a pas de planète B. » « Encore une fois, c’est aux jeunes de nettoyer cette merde. » Les slogans étaient clairs. Alors que la classe politique est asphyxiée par le Brexit, eux rappelaient que la planète aussi n’arrivait pas à respirer et qu’il y avait urgence à agir. « A quoi bon suivre une éducation scolaire et à préparer son avenir s’il n’y a pas d’avenir », témoigne Hannah à Shrewsbury, une petite ville près du Pays de Galle. « Je passerai mes examens si vous agissez », ajoute une autre lycéenne à Londres.
Près de 10 000 personnes se sont rassemblées à Londres, vendredi 15 mars. / Matt Dunham / AP
Dans la capitale britannique, la spontanéité de la manifestation a pris la police par surprise. Au lieu de suivre la traditionnelle avenue devant Downing Street pour arriver au parlement, de nombreux lycéens ont tourné sur le Mall en direction de Buckingham Palace. Les forces de l’ordre ont tenté de fermer la rue mais la foule était déjà passée. Les manifestants ont passé une demi-heure devant le palais de la Reine avant de repartir. Plus tard, ils ont aussi bloqué les rues autour du parlement, provoquant des embouteillages, avant d’être évacués.
Du côté de la classe politique, Jeremy Corbyn, le leader du parti travailliste, s’est félicité de la leçon offerte par les jeunes, dans un texte pour le Guardian :
« Les gouvernements ne peuvent pas rester immobiles, laissant les principales décisions aux forces du marché. Ça n’a jamais marché et ça ne marchera jamais. »
Le parti conservateur, invité également par le quotidien britannique à émettre son opinion, a préféré ne pas répondre.
- Des jeunes font les morts devant le siège de l’ONU
Une cinquantaine de jeunes se sont allongés vendredi devant le siège des Nations unies à New York, faisant les morts (« die-in ») pour réclamer une accélération de la lutte contre le changement climatique, selon l’Agence France-Presse. « Aujourd’hui, les jeunes Américains déclarent la fin de l’ère du climatoscepticisme », a lancé Alexandria Villasenor, jeune fille de 13 ans qui est devenue l’égérie de ce combat aux Etats-Unis. « Nous demandons aux dirigeants d’agir rapidement », a-t-elle poursuivi.
Le rassemblement était le premier d’une série de manifestations prévues vendredi dans plusieurs lieux emblématiques de la ville, notamment Washington Square et Columbus Circle. A la différence de la plupart des pays développés, une partie importante de la classe politique américaine, notamment le président Donald Trump, conteste l’existence même du changement climatique.
- Varsovie, Kampala, Madrid… Les capitales mobilisées
A Varsovie (Pologne), c’est au ministère de l’Energie qu’a fini la marche d’environ 2 000 jeunes. A Bratislava (Slovaquie), ils étaient un millier.
En Suisse, ils étaient près de 30 000 dans cinq villes, selon l’agence ATS.
En Italie, ils étaient aussi des milliers un peu partout dans le pays, soutenus par des messages de plusieurs responsables politiques.
« Nous ne cherchons pas des coupables, nous cherchons des responsables », ont clamé les manifestants à Madrid (4 500 selon la police).
Des actions ont aussi eu lieu à Kampala, en Ouganda. « Les températures ont grimpé, impossible de se concentrer en classe », dit Warlda Mirembe, 16 ans, venue avec son père, fermier et commerçant pour manifester.
Marche pour le climat : des miliers de jeunes défilent en France et dans des dizaines de pays
Durée : 02:07
Notre sélection d’articles à lire sur les mobilisations pour le climat
- Dans près de 100 pays et 1 300 villes, des étudiants, lycéens et parfois collégiens vont sécher les cours, vendredi 15 mars, pour alerter les dirigeants sur l’urgence climatique.
- L’initiative est venue de la Suédoise Greta Thunberg, 16 ans, qui a entamé une grève scolaire le 20 août 2018. « On ne remporte pas des élections en proposant une politique climatique radicale. Il faut que ça vienne d’en bas », estime-t-elle dans un entretien accordé au Monde.
- Comment agir, concrètement, à l’échelle individuelle ou collective, pour le climat ? Le Monde avait organisé une semaine spéciale sur le sujet : retrouvez nos articles, interviews et décryptages.
- Vidéo : comprendre le réchauffement climatique en 4 minutes.
- Décryptage : non, on ne peut pas nier la responsabilité humaine dans le réchauffement climatique.
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