Sans Ligue des champions, l’OM dans le flou
Sans Ligue des champions, l’OM dans le flou
Par Maxime Goldbaum
Marseille, qui accueille Nîmes samedi pour le compte de la 32e journée de Ligue 1, devrait encore rater la qualification pour la Ligue des champions. Un échec aux conséquences économiques importantes.
Florian Thauvin, le 3 mars face à Saint-Etienne. / Jean-Paul Pelissier / REUTERS
L’espoir subsiste, mais il est mince. A moins d’un improbable retournement de situation, l’Olympique de Marseille ne disputera pas la Ligue des champions la saison prochaine. Pour la cinquième année consécutive.
L’OM, qui reçoit Nîmes samedi 13 avril pour le compte de la 32e journée de Ligue 1, pointe à la cinquième place du classement, à huit points de Lyon, troisième, et devra surtout batailler avec Saint-Etienne, Reims, Nice et Montpellier pour conserver une place qualificative pour la Ligue Europa.
Déficit important, propriétaire qui a déjà massivement investi dans le club mais à la puissance financière restreinte, marge de manœuvre limitée sur les transferts, peu de joueurs à forte valeur marchande, contrats XXL… Le « Champion’s Project » du propriétaire américain Franck McCourt commence déjà à ressembler, deux ans après sa mise en place, à la fin du règne de Louis-Dreyfus à la tête du club phocéen, marqué par des résultats sportifs décevants et des rentrées d’argent qui servaient essentiellement à éponger les dettes du club.
« Pas illogique de retrouver un OM déficitaire à ce moment-là du projet »
La réussite du projet mis en place par Franck McCourt lors de sa reprise du club en 2016 reposait sur une participation régulière en Ligue des champions, source de revenus substantiels en comparaison de la moins lucrative Ligue Europa.
Selon les calculs de l’Equipe, sur la base d’un parcours identique dans les deux compétitions (accession en huitièmes de finale) la saison prochaine, avec trois victoires en phase de groupes, l’OM encaisserait environ 63 millions en C1 et 13 millions d’euros en C3, soit un différentiel d’environ 50 millions d’euros.
Pour Christophe Lepetit, responsable des études économiques au Centre de Droit et d’économie du sport (CDES), la situation économique de l’OM est toutefois « relativement logique car le nouvel actionnaire n’a pas souhaité mettre en place une stratégie basée sur le trading joueur [achat-revente], mais plutôt une stratégie d’investissement assez forte sur l’actif joueur - sur le modèle du PSG, toutes proportions gradées - qui a coûté cher en indemnité de transfert et en salaires. »
Un rapport publié par la DNCG a dévoilé qu’au 30 juin 2018 le déficit du club phocéen se chiffrait à 78,6 millions d’euros. Le club n’est pas non plus parvenu à répondre favorablement aux critères édictés par l’instance de contrôle financier des clubs (ICFC) de l’UEFA, à savoir ne pas franchir la barre de 30 millions d’euros de déficit sur les trois dernières saisons : il a dépassé ce seuil de 8 millions d’euros.
« Il n’est pas illogique de retrouver un OM assez nettement déficitaire à ce moment-là du projet », répète Christophe Lepetit.
Un effectif en fin de cycle
Le propriétaire de l’OM Franck McCourt, qui a déjà investi 190 millions d’euros en deux saisons, devra peut-être revoir la stratégie sportive du club visant à acheter des joueurs confirmés pour obtenir des résultats immédiats.
Le président de l’OM Jacques-Henri Eyraud l’a d’ores et déjà annoncé : l’équipe doit être renouvelée et le club devra se délester de très lourds contrats cet été.
Aymen Abdenour (aucun match disputé en dépit d’un salaire mensuel estimé à 250 000 euros selon L’Equipe dans son dossier consacré aux salaires de Ligue 1), et Thomas Hubocan, tous les deux en fin de contrat, vont quitter le club phocéen. Grégory Sertic, dont le bail s’achève en 2020, sera également placé sur la liste des transferts.
Mais le club réfléchirait aussi à trouver une porte de sortie à plusieurs cadres en fin de cycle et aux émoluments XXL : le gardien de but Steve Mandanda, moins impérial que par le passé, Luiz Gustavo, pilier de l’équipe la saison dernière mais relégué sur le banc depuis février, ou Dimitri Payet, recruté pour 30 millions d’euros auprès de West Ham, pourraient aussi faire leurs bagages.
Le cas d’Adil Rami, supplanté par les jeunes Boubacar Kamara et Duje Caleta Car en défense centrale, pose aussi question.
Problème, ces joueurs ne disposent pas d’une valeur marchande suffisante pour permettre aux dirigeants de compenser ces départs par l’arrivée de joueurs de qualité.
Le club ne compte dans ses rangs que quelques joueurs au potentiel marchand conséquent : Morgan Sanson (dont la valeur est estimée à 25 millions d’euros par le site TransferMarkt), Boubacar Kamara (15 millions d’euros) et surtout l’international français Florian Thauvin (50 millions d’euros). Le club pourrait céder deux de ces joueurs pour renouveler l’effectif.
Autre interrogation : quid de la situation de l’entraîneur Rudi Garcia, qui a prolongé son contrat en novembre 2018 jusqu’en 2021 ? Très critiqué cette saison, il a entamé une partie de son crédit. Mais son limogeage, ainsi que celui de son staff assez pléthorique, coûterait aux environs de 10 millions d’euros au club.
La saison prochaine sera charnière
Christophe Lepetit ne juge cependant pas la situation de l’OM rédhibitoire : « il y a beaucoup de clubs de Ligue 1 qui aimeraient avoir un propriétaire comme McCourt, capable d’investir près de 200 millions d’euros en deux ans. Je ne pense pas que l’actionnaire soit un problème, au contraire. Il amène sa culture américaine du « sport spectacle » et de l’industrie du sport, notamment du sport business » dont a besoin l’OM pour diversifier ses sources de revenus.
Selon l’entourage du propriétaire de l’OM, cité par La Provence, « McCourt est pragmatique et changera si les résultats ne sont pas là. Il veut encore investir. Il ne se satisfera pas de résultats qui ne sont pas ceux escomptés. »
Autre motif d’espoir selon l’économiste : la prise de contrôle du club sur l’exploitation du Stade Vélodrome, qui engendre des coûts importants au départ, mais peut se révéler « très intéressante sur le moyen long terme et permettre des gains marginaux assez conséquents. »
L’augmentation des droits TV de la Ligue 1 à partir de 2020 et une éventuelle qualification pour la LDC permettraient aussi au club d’obtenir « des subsides importants et donc de repartir avec une économie totalement transformée » lors de l’exercice 2020-2021.
L’OM peut donc se remettre encore d’une nouvelle absence en Ligue des champions, mais la saison prochaine s’annonce charnière dans la réussite ou non du projet initié par Franck McCourt.