« Retour de flamme » : un couple veut rester vivant malgré le temps
« Retour de flamme » : un couple veut rester vivant malgré le temps
Le premier film élégant de Juan Vera montre deux quinquagénaires saisis par le désarroi quand leur fils quitte le domicile familial.
Ricardo Darín et Mercedes Morán. / Filmax
Vingt-cinq ans de vie commune, un enfant, des amis de longue date n’ont pas conduit Marcos (Ricardo Darin) et Ana (Mercedes Moran) au désamour. Au contraire, la complicité qui les unit les fait toujours rire ensemble, et la tendresse parvient encore à les épargner des vaines querelles. Mais, quand son fils quitte le domicile familial pour poursuivre ses études en Espagne, le couple se met soudain à tourner en rond. L’espace vide, tel que leur apparaît désormais l’appartement, ouvre un champ de réflexion auquel ils s’abandonnent, main dans la main, au fil de leurs longues discussions. Sans éclats de voix ni conflit, leurs échanges finissent par les faire s’accorder sur un point : le mieux, pour ne pas céder au sentiment de déréliction qui les guette, serait de se séparer.
Ce premier acte sur lequel s’ouvre Retour de flamme donne la tonalité du premier film de Juan Vera (producteur et scénariste argentin depuis vingt-cinq ans) où il est clair que le cheminement intime des personnages va prévaloir sur les actions qui en résultent. L’approche a le mérite de nous préserver de la plupart des clichés inhérents au genre. Elle donne aussi l’occasion aux deux grands acteurs Ricardo Darin et Mercedes Moran de moduler la partition qui leur est offerte. Tout au long du film, le duo qu’ils forment demeure d’une élégance folle. Retour de flamme est à cette image. Et ce, malgré un deuxième acte plus relâché qui privilégie la comédie au détriment des sentiments. Là où, une fois séparés, les deux quinquagénaires s’essaient à la vie de célibataire.
Crise existentielle
Grisante, la liberté retrouvée les distrait différemment. Ana connaît des aventures qui réveillent sa libido et la rassurent sur son pouvoir de séduction. Marcos retrouve quelqu’un avec qui partager son quotidien. Ce passage s’agrémente de trois ou quatre scènes cocasses dont le scénario, coécrit par Juan Vera et Daniel Cuparo, aurait pu faire l’économie, tant elles n’apportent rien à la compréhension du propos, nous en éloignant même un peu.
Car on le sait déjà, si tout se passe plutôt bien, quelque chose laisse à désirer. Le troisième acte le confirme, quand la parenthèse ouverte se referme, quelques années plus tard, sur les retrouvailles du couple. Disons-le ainsi puisque le titre français (contrairement à l’original, El amor menos pensado) ne laisse aucune place au suspense.
Moins que la déliquescence d’une union, c’est la crise existentielle qui saisit les deux protagonistes, à la cinquantaine, qu’interroge le film de Juan Vera. « Que nous reste-il d’exceptionnel à vivre désormais ? », se demandent Marcos et Ana, peu de temps après que leur fils a quitté le nid. Cette quête à vouloir se sentir vivant, alors qu’ils craignent l’ennui, fournit un sujet que le réalisateur s’applique à autopsier à chaque étape de leur expérience, avec la même intelligence qu’il donne à ses personnages. Retour de flamme est un film qui prend le temps. Au risque parfois de provoquer une certaine impatience. La même qui saisit les individus quand l’âge les pousse à vouloir accélérer.
Retour de flamme - Bande annonce - Au cinéma le 8 mai
Durée : 01:38
Film argentin de Juan Vera. Avec Ricardo Darin, Mercedes Moran, Claudia Fontan (2 h 09). Sur le web : www.facebook.com/retourdeflammeLefilm