En Algérie, dix-huit mois requis pour « faux et usage de faux » contre l’ancien patron des patrons
En Algérie, dix-huit mois requis pour « faux et usage de faux » contre l’ancien patron des patrons
Le Monde.fr avec AFP
Proche du président déchu Abdelaziz Bouteflika, Ali Haddad est en détention depuis son arrestation dans la nuit du 30 au 31 mars à un poste-frontière avec la Tunisie.
L’ancien patron des patrons algériens Ali Haddad, à Alger, en octobre 2015. / RYAD KRAMDI / AFP
Le parquet a requis, lundi 3 juin à Alger, dix-huit mois de prison pour « faux et usage de faux » contre l’ancien patron des patrons algériens Ali Haddad, proche du président déchu Abdelaziz Bouteflika, a constaté un journaliste de l’AFP. Patron du numéro 1 privé du BTP en Algérie, l’ETRHB Haddad, Ali Haddad est en détention depuis son arrestation dans la nuit du 30 au 31 mars à un poste-frontière avec la Tunisie, deux jours avant la démission du président Bouteflika face à une contestation inédite. Il était en possession de deux passeports, ce qu’interdit la loi algérienne, et de devises qu’il n’avait pas déclarées.
Comparaissait à ses côtés Hassane Boualem, directeur des titres et documents sécurisés au ministère de l’intérieur quand il a délivré en 2016 son deuxième passeport à M. Haddad. « C’est un procès politique. Le chef de fraude n’a aucun fondement » juridique, a déclaré à la presse Me Khaled Bourayou, avocat de M. Haddad. A l’audience, son client, parlant d’une voix difficilement audible, a nié toute falsification et a indiqué avoir obtenu son deuxième passeport « légalement », après avoir sollicité l’intervention d’Abdelmalek Sellal, alors premier ministre.
Importantes commandes publiques
Le procureur a requis dix-huit mois de prison et 100 000 dinars d’amende (environ 750 euros), rappelant que la loi interdit de posséder « plus d’un titre ou document de voyage de même nature ». Il a requis la même peine contre M. Boualem pour avoir délivré le deuxième passeport « sans dossier administratif ».
La défense de ce dernier a argué que son client n’avait fait qu’obéir aux instructions de M. Sellal, du ministre de l’intérieur de l’époque Noureddine Bedoui – désormais premier ministre – et du secrétaire général du ministère Hocine Mazouz, qui n’ont pas été inquiétés. Le verdict dans cette affaire sera rendu le 17 juin, a annoncé la cour.
D’après l’avocat de M. Haddad, celui-ci fait aussi l’objet d’une enquête sur des faits présumés de corruption. M. Haddad, également propriétaire d’un grand groupe médiatique et d’un club de football, est accusé par ses détracteurs d’avoir bénéficié d’importantes commandes publiques qui lui ont permis de transformer son entreprise familiale en géant national du BTP, à la faveur de ses liens privilégiés avec l’entourage d’Abdelaziz Bouteflika, en tête duquel son frère et conseiller Saïd.
L’Union sportive de la médina d’Alger dans le rouge
Saïd Bouteflika, 61 ans, est incarcéré depuis le 4 mai avec deux anciens chefs des services de renseignement, tous accusés d’avoir conspiré contre l’armée pour tenter de maintenir le président Bouteflika au pouvoir, malgré une contestation qui ne cessait d’enfler depuis le 22 février.
Propriétaire de l’Union sportive de la médina d’Alger (USMA), sacré fin mai champion d’Algérie de football, l’ETRHB Haddad cherche à vendre les 92 % des parts qu’il détient dans le club, dont les difficultés financières sont aggravées par l’incarcération d’Ali Haddad, a annoncé mardi Amine Tirmane, directeur de la communication de l’USMA. « Rien n’est confirmé pour le moment », a cependant nuancé le responsable de la communication du groupe ETRHB Haddad, Lyes Dilmi, interrogé par l’AFP.
Selon M. Tirmane, la situation financière du club algérois est dans le rouge, accentuée par les 200 millions de dinars (près de 1,5 million d’euros) non versés par des sponsors depuis l’incarcération le 31 mars de M. Haddad, et « l’ETRHB est dans l’incapacité de subvenir à nos besoins comme elle le fait depuis neuf ans ».