« Piranhas » : dans les rues de Naples, petits poissons et gros bonnets de la mafia
« Piranhas » : dans les rues de Naples, petits poissons et gros bonnets de la mafia
Par Thomas Sotinel
L’adaptation du premier roman de Roberto Saviano colle de près aux conventions du film de gangster.
De Gomorra, récit entre enquête et autobiographie, Matteo Garrone avait fait un film tétanisant par son mélange de trivialité et de cruauté. Ce que disait Roberto Saviano dans son livre, ce que montrait le cinéaste s’insinuait dans la psyché des spectateurs : sans avoir jamais eu le moindre contact avec les pans entiers de la société passés sous l’emprise de la Camorra napolitaine, on sentait qu’ils faisaient partie de notre monde.
Il est toujours injuste de reprocher à un film de ne pas en être un autre. Hélas pour Piranhas, la comparaison avec Gomorra est inévitable. C’est aussi une adaptation d’un ouvrage de Saviano, ses personnages sont jeunes, ils basculent dans le crime. Premier roman de l’écrivain, Piranhas met en scène le passage au crime organisé d’une bande de très jeunes garçons (quinze ans, à peine) d’un quartier de Naples. Claudio Giovannesi a choisi d’en faire un spectacle, s’appuyant sur les règles du film de mafia, telles que Coppola les a formulées il y a bientôt cinquante ans. Ces vieux procédés dramatiques – l’ascension d’un soldat qui devient parrain, l’ivresse du pouvoir et de l’argent, la fraternité des armes, les rituels du groupe – devraient servir (on suppose que c’est l’intention du cinéaste) à montrer la ruine d’enfants des rues. Ils finissent plutôt par la masquer.
Un divertissement de bonne facture
L’ascension de Nicola (Francesco Di Napoli), bon fils au visage angélique indigné par le racket dont est victime sa maman, le conduit au meurtre, à la trahison, alors que ses intentions étaient pures (voir Le Parrain 2, et les efforts de Vito pour nourrir sa famille). Le plus intéressant du film tient aux formes extérieures de sa prospérité : des scooters plutôt que des voitures, des boîtes de nuit minables et des restaurants de friture plutôt que des établissements de luxe.
Claudio Giovannesi parvient à insérer cette pure fiction dans les rues du Vieux Naples, conférant ainsi un peu de réalité à cette cavalcade d’événements prévisibles. Piranhas prend l’aspect d’un divertissement de bonne facture. Ce peut être un sujet de satisfaction, ou de frustration tant la forme est peu en rapport avec la tragédie qu’elle dépeint.
PIRANHAS - Bande Annonce
Durée : 01:45
Film italien de Claudio Giovannesi, avec Francesco Di Napoli, Viviana Aprea, Mattia Piano del Balzo (1 h 45). Sur le web : www.piranhas-lefilm.com