Jeu vidéo : « Cadence of Hyrule », le sens du rythme et de l’hommage
Jeu vidéo : « Cadence of Hyrule », le sens du rythme et de l’hommage
Par Corentin Lamy
Les développeurs du très dansant « Crypt of the Necrodancer » s’emparent des codes et de l’univers des premiers « Zelda » le temps d’un hommage entraînant.
« Cadence of Hyrule » emprunte beaucoup à « A Link to the Past », mais aussi aux épisodes de la console NES. / Nintendo
Le pitch de Cadence of Hyrule (sorti le 13 juin sur Switch) est simple : et si on disait que les personnages du jeu Crypt of the Necrodancer avaient été transportés dans l’univers de The Legend of Zelda ? Et que Cadence, l’héroïne de Necrodancer, prêtait main-forte à Zelda et Link pour venir à bout, une fois n’est pas coutume, de l’affreux Ganon ?
La rencontre, hautement improbable, ne se justifie ni par l’histoire des jeux, ni par celles de leurs développeurs respectifs (le petit studio canadien Brace Yourself et l’emblématique japonais Nintendo), dont on ignorait jusque-là qu’ils soient particulièrement proches.
Pas grand-chose non plus à voir, a priori, entre le principe d’un Zelda, aventure au long cours se situant dans un vaste monde ouvert, et Crypt of the Necrodancer, jeu de rôle et jeu de rythme pensé pour des parties courtes et répétitives, puisqu’on y meurt à peu près toutes les cinq minutes, perdant toute sa progression au passage.
Cadence of Hyrule – Crypt of the NecroDancer Featuring The Legend of Zelda - bande-annonce
Durée : 00:58
Il y a dans cette relecture des premiers Zelda (Cadence of Hyrule emprunte beaucoup à A Link to the Past, mais aussi aux épisodes de la console NES) quelque chose d’évident. Comme dans Crypt of the Necrodancer, héros et ennemis s’y déplacent case par case, au rythme plus ou moins soutenu d’une musique hyperentraînante.
Comme dans Crypt of the Necrodancer, on a moins l’impression de s’y battre que de danser : pas de bouton d’attaque, et le bouton de défense (pour se servir du bouclier) est totalement dispensable. Non, l’idée est d’analyser le comportement des ennemis, qui, comme les pièces d’un jeu d’échec, ont chacun leur façon de se mouvoir ; et de se déplacer de manière à ce qu’ils viennent s’empaler sur une des nombreuses armes aux propriétés tout aussi diverses qu’on trouvera en route.
Dans « Cadence of Hyrule », on a moins l’impression de se battre que de danser. / Nintendo
Moins fin, mais plus accessible
Le rapport avec le claustrophobique Necrodancer s’arrête là. Pas question, ici, de successions de cavernes : l’aventure se déroule dans un monde ouvert qui rappelle beaucoup A Link to the Past, avec ses villages, ses donjons et ses secrets bien cachés.
C’est aussi à une aventure unique que l’on a affaire, figée dans sa structure générale, « scénarisée » même, quoique le mot soit un peu fort. Link, ou Zelda, découvrent la carte du jeu, gagnent des points de vie, des diamants, des armes et des objets qu’ils conservent dans la mort : encore une différence majeure avec Necrodancer, qui obligeait le joueur à recommencer quasiment à zéro au niveau de l’erreur.
Des erreurs, on a d’ailleurs le droit d’en faire beaucoup dans ce Cadence of Hyrule, globalement bien moins punitif que son très exigeant modèle : les attaques des ennemis sont souvent moins violentes, et les développeurs ont de toute façon eu la générosité d’arroser le joueur de cœurs et de fées à même de régénérer la santé du personnage.
Le résultat, c’est donc un jeu moins fin que Crypt of the Necrodancer, moins long aussi (il se finit en cinq heures, dix heures si on insiste pour faire l’aventure avec les deux personnages, ce qu’on pourra juger assez court pour un jeu à 25 euros), mais bien plus accessible.
Dans « Cadence of Hyrule », les gants, la canne et le grappin permettent de résoudre des énigmes de façon créative. / Nintendo
Les quatre donjons sont ainsi très courts et pas spécialement mémorables, tandis que les nombreux objets, s’ils sont amusants à dégoter, sont, à quelques exceptions près, inutiles. Dommage, d’ailleurs. Quand aux gants, à la canne ou au grappin, ils permettent de résoudre des énigmes de façon créative. Cadence of Hyrule rappelle furtivement les meilleures heures de Breath of the Wild.
C’est au prix de cette simplification que Cadence of Hyrule n’effrayera pas les joueurs de Zelda qui passeraient par là par hasard. Ceux-là seront d’ailleurs gâtés : Cadence of Hyrule est une déclaration d’amour à la série de Nintendo, multipliant les clins d’œil parfois pointus aux ennemis, aux objets, aux lieux, et aux gimmicks emblématiques des premiers épisodes, mâtinée de quelques références à Ocarina of Time ou Breath of the Wild.
Jeu de rythme oblige, c’est la bande-son qui a fait l’objet d’un soin tout particulier. Le compositeur Danny Baranowsky (responsable des fabuleuses bandes originales des premières versions de Super Meat Boy et The Binding of Isaac) réalise ici un travail totalement fou, en faisant s’entremêler les thèmes de Zelda et de Crypt of the Necrodancer, au point qu’ils en deviennent indissociables ; et que s’amuser à reconnaître l’origine de telle ou telle mesure devient un jeu dans le jeu pour les fans enamourés.
Dans « Cadence of Hyrule » la bande-son est composée par Danny Baranowsky. / Nintendo
En bref
On a aimé :
- l’efficacité du concept de Crypt of the Necrodancer ;
- l’univers et l’aventure de Zelda ;
- la façon élégante et efficace dont les deux se mêlent.
On n’a pas aimé :
- assez court et peu rejouable par rapport à Crypt of the Necrodancer, et pourtant près de deux fois plus cher.
C’est plutôt pour vous si…
- vous avez un minimum le sens du rythme ;
- vous connaissez tous les thèmes de Zelda, même celui-là, un peu obscur, celui qui fait « tatadada, tatadada-dada » ;
- vous cherchez une initiation à Crypt of the Necrodancer avant de passer aux choses sérieuses.
Ce n’est plutôt pas pour vous si…
- pour vous la batterie est une pièce de voiture ;
- pour vous la mandoline est un accessoire de cuisine ;
- pour vous le trombone est une fourniture de bureau ;
- pour vous le triangle est un polygone à trois côtés dont la somme des angles fait 180°.
La note de Pixels
« Tatadada »/« tatadada-dada ».