L’année 2018 a été marquée pour les collectivités territoriales par une nouvelle amélioration de leur situation financière. Toutes strates confondues, les administrations publiques locales ont enregistré un excédent de 2,3 milliards d’euros, en hausse de 0,7 milliard par rapport à l’année précédente, confirme la Cour des comptes dans son rapport sur les finances publiques locales publié lundi 24 juin. Ce bilan était particulièrement attendu dans la mesure où 2018 est aussi l’année d’un changement dans les dispositifs de régulation des dépenses des collectivités : après trois années consécutives de baisse des dotations de fonctionnement, s’est substitué un mécanisme de contractualisation fixant un plafond de 1,2 % en moyenne annuelle sur trois ans de progression des dépenses de fonctionnement des collectivités territoriales.

Objectif atteint puisque, sur les seuls budgets principaux, les dépenses de fonctionnement des collectivités ont augmenté de 0,2 % entre 2017 et 2018. Est-ce dû au mécanisme de contractualisation mis en place ? La Cour ne se prononce pas sur ce point. Toutefois, note le rapport, si les dépenses de fonctionnement de l’ensemble des collectivités ont progressé de 0,2 % en 2018, celles des seules collectivités soumises à contractualisation ont diminué de 0,3 %. Néanmoins, compte tenu du fait que les finances publiques locales sont un paquebot dont les variations de trajectoire et de vitesse ne produisent leurs effets qu’à retardement, il est probable que les exécutifs locaux aient engagé depuis plusieurs années une modération de leurs dépenses de fonctionnement dont les résultats peuvent aujourd’hui être constatés.

Notamment en ce qui concerne les dépenses de personnel. Ainsi, pour le bloc communal, celles-ci ont augmenté de 0,8 %, contre + 3,1 % en 2017 : une progression entièrement portée par les intercommunalités, alors que les communes, elles, ont stabilisé leur masse salariale. Du côté des départements, les dépenses de personnel ont enregistré une légère baisse (– 0,2 %), sauf les départements de moins de 250 000 habitants, où elles ont progressé de 0,8 %. En revanche, les dépenses de personnel des régions se sont accrues de 3,8 %, mais cette hausse est en partie imputable aux nouvelles compétences qui leur ont été transférées.

Facteurs conjoncturels

Autre enseignement de ce rapport, la diminution de l’impact des décisions de l’Etat sur les budgets locaux. Celui-ci était évalué par la Cour des comptes à un milliard d’euros en 2017. Ce coût a été ramené à 402 millions en 2018. Ce répit pourrait toutefois être de courte durée, car il tient essentiellement à des facteurs conjoncturels : gel du point d’indice des fonctionnaires, report au 1^er janvier 2019 de l’entrée en vigueur de certaines dispositions du protocole « parcours professionnels, carrières et rémunérations », et annulation d’un décret relatif aux obligations d’amélioration de la performance énergétique dans les bâtiments à usage tertiaire.

Toujours est-il que la conclusion majeure de ce rapport annuel de la Cour des comptes tient à ce que les collectivités territoriales – même si les situations sont différenciées – sont sorties de la situation d’« étranglement » financier que les principales associations d’élus dénonçaient année après année. Le montant des transferts financiers de l’Etat enregistre, pour la première fois depuis 2014, une légère progression (+ 1,8 milliard d’euros à périmètre constant). Les concours de l’Etat sont repartis à la hausse en 2018 (+ 1 milliard d’euros), après une baisse de 10 milliards entre 2014 et 2017. Une bouffée d’oxygène, qui a particulièrement profité au bloc communal grâce à la progression de la dotation de soutien à l’investissement local (+ 230 millions d’euros) et de la dotation d’équipement des territoires ruraux (+ 230 millions d’euros également).

A périmètre constant, les concours financiers de l’Etat aux régions ont également augmenté de 2 % en 2018, grâce, notamment, à la dynamique du produit de la part de TVA qui leur a été affectée en remplacement de la dotation globale de fonctionnement régionale.

Epargne reconstituée

En 2018, le produit de fiscalité perçu par les collectivités s’est accru de 7,3 milliards d’euros pour atteindre 145,4 milliards d’euros. Pour le bloc communal, la croissance est de 2,6 %, grâce à l’augmentation des produits de la taxe sur le foncier bâti et de la taxe d’habitation. Toutefois, cette progression n’est pas due à une hausse des taux décidée par les élus locaux, mais, en premier lieu, à la revalorisation forfaitaire des bases d’imposition (+ 1,2 %) votée en loi de finances. Idem pour les départements, qui perçoivent une part de la taxe sur le foncier bâti. Bloc communal et départements confondus, le produit des impôts locaux a crû de 2,5 % en 2018.

Conséquence de cette amélioration de leur situation financière, les collectivités territoriales ont reconstitué leur épargne : + 7,3 % pour le bloc communal, + 0,1 % pour les départements (mais en réalité + 5,2 % si l’on retire Paris et les Hauts-de-Seine, qui ont donné lieu à des opérations particulières), + 5,4 % pour les régions. Et le rebond de l’investissement observé en 2017 s’est également poursuivi. Les dépenses d’investissement des collectivités du bloc communal ont augmenté de 6,1 % en 2018, celles des départements de 3,7 % et celles des régions, à un niveau moindre, de 1,6 %.

Amélioration de leur épargne, capacités d’investissement retrouvées, les collectivités territoriales, incontestablement, vont mieux que ne pourraient le laisser supposer les cris d’orfraie régulièrement poussés par certains de leurs dirigeants. Telle est la principale leçon de ce rapport de la Cour des comptes.