Des policiers israéliens cachent une arme chez un Palestinien, à son insu, pour une télé-réalité
Des policiers israéliens cachent une arme chez un Palestinien, à son insu, pour une télé-réalité
Le Monde.fr avec AFP
Cette mise en scène a été effectuée lors d’une fouille au domicile d’un Palestinien, qui avait reçu au terme de celle-ci un document officiel indiquant que tout était en ordre. Le tour de passe-passe n’a été mis au jour que lors de la sortie de l’émission.
Un Palestinien a déposé mercredi 7 août une plainte contre la police israélienne pour une affaire pour le moins inhabituelle : des policiers ont caché chez lui, à son insu, un fusil d’assaut lors du tournage d’une émission de télé-réalité.
L’affaire remonte à novembre dernier, quand la police israélienne fait irruption à 3 h 30 du matin chez Samer Suleiman, à Jérusalem-Est. Ils affirment avoir reçu l’ordre de tout fouiller, sans préciser ce qu’ils cherchent. Derrière eux, une équipe de télévision filme la scène. M. Suleiman interroge les policiers sur cette présence, qui lui répondent « que c’est pour éviter des réclamations ultérieures sur les dommages causés par la fouille », explique-t-il au journal Haaretz, qui a révélé cette histoire mardi. Après environ trois heures de fouille, et sans avoir interrogé M. Suleiman, les policiers quittent les lieux en lui remettant un papier officiel attestant que sa maison était conforme, à savoir sans arme.
Mise en scène
Le mois dernier, la chaîne publique israélienne Kan diffuse le neuvième épisode de « Jerusalem District » (« la brigade de Jérusalem », en français), émission de télé-réalité policière à succès qui suit des opérations des forces de l’ordre dans cette ville sous tension. On y aperçoit deux des « héros » de la série, Erez Hazan et Asaf Ovadia, se féliciter d’avoir trouvé un fusil d’assaut dans une maison palestinienne, que des voisins reconnaîtront comme celle de M. Suleiman.
« Dans ce genre d’opérations, j’aime me tenir à l’écart et observer, explique Erez Hazan à la caméra qui suit le raid. Puis j’ai commencé à parler au suspect. Il était relativement calme pendant que nous nous concentrions sur la fouille de l’appartement, mais lorsque nous sommes sortis, son langage corporel a changé. Sous la maison, nous avons vu une porte en fer verrouillée. (…) On l’a ouverte et on a vu quelque chose qui ressemblait à un entrepôt. Quand nous sommes allés plus profondément à l’intérieur, ça ressemblait à un tunnel étroit, qui n’avait rien à envier à ceux qu’ils ont trouvés à Gaza. »
Les images montrent par ailleurs un certain sens de la mise en scène : la cave de M. Suleiman est inspectée dans le noir, à la lampe torche – alors qu’il y avait un plafonnier pour éclairer la pièce. L’arme elle-même, un fusil d’assaut de l’armée israélienne, ne trône pas au milieu de la pièce : elle était dissimulée dans un trou de l’un des murs de cette cave, et c’est un des chiens qui accompagnaient la fouille qui l’aurait signalé, selon les dires d’Erez Hazan pendant l’émission.
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La police s’excuse
« La police a commis une grave erreur pour Samer et sa famille », a commenté Arieh Avitan, l’avocat du père de quatre enfants établi dans le secteur d’Issawiya, qui est parfois le théâtre de heurts entre des Palestiniens et la police israélienne.
Depuis les révélations de Haaretz, la police israélienne s’est « excusée » pour les « torts causés » dans un communiqué en arabe, et la chaîne publique a retiré l’épisode de son site web et de sa chaîne YouTube. La société de production de l’émission, Koda Communications, indique de son côté que, dans de rares cas, dont l’intrusion chez M. Suleiman fait partie, elle utilise des images d’illustration pour protéger les méthodes de travail de la police et ceux qui apparaissent à l’écran.
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Durée : 06:23