Prince, un style à la fois punk et romantique
Prince, un style à la fois punk et romantique
Par Stéphanie Binet
La costumière Marie France Druin a travaillé de 1983 à 1986 avec Prince. Elle a notamment collaboré avec lui pour le film Purple Rain.
Marie France Drouin avait suggéré à Prince de porter des dentelles, s’inspirant des vêtements du XVIIIe siècle, comme les chemises à jabot pour remplacer « ses chemises assez laides avec des petits volants sur le côté ». | LIU HEUNG SHING/AP
« Vous étiez de l’autre côté de la salle, vous dansiez si fort, je sentais votre parfum… », susurrait, en 1986, une voix française sur le single, Girls & Boys. Cette voix, c’est celle de la créatrice de costumes, Marie France, qui travaillait avec Prince depuis le tournage du film Purple Rain en 1983.
La Française a travaillé trois ans avec le musicien de Minneapolis, le temps de trois albums, Purple Rain, Around the World in one Day et Parade, bande originale du film Under The Cherry Moon dont le tournage se déroulait à Nice.
Marie France Drouin, pour l’état civil, avait suivi toute la troupe à Paisley Park pour préparer les costumes du film d’inspiration années 1930. Prince terminait d’enregistrer l’album Parade qui devait en être la bande son : « Il était 20 h 30, un soir, quand il a demandé à me parler, raconte Marie France. Il voulait que je lui traduise un texte en français et que je vienne le lire au studio. Je lui ai proposé quatre versions, car sa petite déclaration pouvait être interprétée de manière différente. Et il m’a dit : « Je ne comprends rien au français, Marie France, fais comme tu le sens. » J’ai lu mon petit charabia et je me suis dit : « Bon, la prochaine prise sera meilleure. » Wendy et Lisa (guitariste et clavier de The Revolution) ont applaudi et Prince a déclaré : « C’est bon, c’est dans la boîte. »
« La clé, c’était de respecter son univers »
Mais la collaboration la plus visible de Prince avec cette Française, qui vit à Los Angeles depuis 1979, est certainement les costumes pour le film Purple Rain. Elle avait été recrutée par le réalisateur Albert Magnoli pour ne s’occuper que des tenues féminines mais lui avait suggéré d’aider l’équipe qui s’occupait de celles de Prince : « Ils n’avaient que des costumes pour les concerts. Les tenues de scène et celles d’un film sont différentes. En concert, il faut qu’elles soient vues de loin. Au cinéma, il faut que le tissu soit impeccable car on filme au plus près. »
Au premier rendez-vous, le musicien la snobe, se cache derrière ses lunettes, Aviator reflective, écoute d’une oreille discrète et regarde par la fenêtre. « Il s’est retourné quand j’ai dit au réalisateur que je voulais faire un bon film et pas une merde comme ceux d’Elvis Presley. C’est comme ça que j’ai pu lui montrer mes idées. À partir du moment où vous compreniez son univers musical, sa sensibilité et qu’il n’avait pas envie d’être dérangé pour des sornettes, ou pour faire la conversation, tout se passait très bien. La clé, c’était de respecter son univers. »
Marie France le connaissait déjà pour avoir écouté l’album Controversy et vu ses premières apparitions télé : « Dans ses tenues, il y avait en même temps des choses avec des chaînes, des vêtements très noirs et puis tout d’un coup un truc très flamboyant. Il portait déjà son manteau pourpre. J’ai voulu accentuer son esprit romantique et punk à la fois. J’ai cherché à le rendre plus percutant, magnifié. »
Elle lui suggère alors de porter des dentelles, s’inspire des vêtements du XVIIIe siècle, comme les chemises à jabot pour remplacer « ses chemises assez laides avec des petits volants sur le côté. » Elle lui propose le bandeau sur l’œil, qu’elle avait repéré sur un mannequin dans le magazine Elle.
Après le tournage du film, où Prince évite soigneusement la séance des essayages en décrétant que, « de toute façon, Marie France fait la même taille que [lui], 1,60 m ». Elle l’a suivi sur les plateaux télé, sur les clips : « Prince était très espiègle, il me faisait toujours croire qu’il choisissait une autre tenue que celle que j’avais choisie en loge. Et il me disait : « Ces Françaises, il faut toujours qu’elles fassent des histoires. » Il finissait toujours par porter ce que je choisissais. Je lui suis extrêmement reconnaissante. Et pour ma petite participation sur Girls & Boys, il a été très généreux. »
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Durée : 02:59