A Pékin, en décembre 2015. | WANG ZHAO / AFP

C’est le cadeau de bienvenue offert par la Chine aux chefs d’Etat et de gouvernement invités à Hangzhou pour le sommet du G20, les 4 et 5 septembre : la ratification de l’accord de Paris sur le climat. Le Parlement chinois, l’Assemblée nationale populaire, a adopté samedi 3 septembre au matin, lors de la clôture de sa session bimensuelle, le texte issu de la COP21. Cette étape doit permettre au président Xi Jinping d’annoncer aujourd’hui même à Hangzhou, avec son homologue américain Barack Obama, arrivé en début d’après midi d’Hawaï, que les deux pays sont désormais liés par les engagement pris à Paris en décembre 2015 pour lutter contre le réchauffement climatique.

Ce ralliement des deux plus gros pollueurs de la planète est une avancée majeure. Selon la comptabilité onusienne, la Chine totalise à elle seule 20 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre, les Etats-Unis y contribuent pour près de 18%.

Ajoutés au 1 % représenté par les petits Etats insulaires les plus prompts à ratifier ; aux 2,5 % du Brésil, dont le Congrès a approuvé le texte le 11 août ; au 0,9 % de l’Argentine, qui a fait de même le 2 septembre, ce sont donc désormais plus de 42 % des émissions de gaz à effet de serre qui figurent dans le champ de l’accord.

Quid de l’Inde ? 

Pour les observateurs les plus optimistes, la décision chinoise du 3 septembre laisse espérer que le seuil nécessaire à l’application des décisions de Paris – 55 pays, représentant au moins 55 % des émissions mondiales – sera atteint avant la fin de l’année. « Cette annonce signifie que l’accord de Paris est proche de devenir réalité. La Chine veut donner une impulsion pendant ce G20 pour pousser les autres pays invités à ratifier l’accord », estime Li Shuo, conseiller en chef sur les questions climatiques de Greenpeace Chine.

« Le déclin significatif et systématique de sa consommation de charbon se confirme en 2016, pour la troisième année consécutive. La Chine ne retrouvera pas les niveaux du passé », précise-t-il pour expliquer la conversion de la première économie asiatique aux énergies pauvres en carbone. L’engagement de la Chine à Paris fin 2015 avait été obtenu à partir d’objectifs relativement conservateurs – atteindre un pic de ses émissions de CO2 d’ici à 2030.

Pour pérenniser la politique climatique engagée sous son second mandat, Barack Obama doit aller vite et devrait indiquer dans l’annonce présidentielle conjointe de Hangzhou que les Etats-Unis se joignent eux aussi à l’accord de Paris. La formulation n’est pas anodine. Pour « ratifier » le texte, le président démocrate aurait dû s’en remettre au Congrès à majorité républicaine, hostile aux mesures qu’il a engagées pour freiner le réchauffement climatique. M. Obama devrait donc faire le choix de « se joindre » à l’accord de la COP21 par une décision présidentielle.

Ce sont donc désormais plus de 42 % des émissions de gaz à effet de serre qui figurent dans le champ de l’accord

« La ratification de la Chine et des Etats-Unis est une formidable nouvelle, réagit la ministre française de l’environnement Ségolène Royal, qui préside la COP jusqu’à Marrakech, en novembre, où la France passera le relais au Maroc. L’engagement de ces deux pays aussi importants va créer une dynamique positive qui peut entraîner le Canada, l’Australie ou l’Inde. »

Si le seuil des 55 % exigé pour l’application de l’accord n’est pas une chimère, une entrée en vigueur d’ici à la fin de 2016 est loin d’être acquise. « Nous devons accomplir le même exploit [que celui de l’adoption par 195 Etats de l’accord de la COP21] pour la ratification », a lancé jeudi 1er septembre Ségolène Royal aux diplomates réunis à Paris pour la semaine des ambassadeurs. « Les conditions sont proches d’être réunies pour atteindre ce seuil à Marrakech, avance une source diplomatique française. La Russie a clairement fait entendre qu’elle ne comptait pas ratifier avant 2019, mais des pays qui pèsent, comme le Canada, l’Australie ou l’Arabie saoudite pourraient en revanche ratifier prochainement l’accord. La principale interrogation réside aujourd’hui dans la décision de l’Inde. »

Transparence

Le sujet a été abordé lors d’une réunion bilatérale entre les Etats-Unis et les Inde, le 31 août, mais le choix est délicat pour un pays dont la croissance économique repose très largement sur le charbon.

L’autre casse-tête de la ratification est celui de l’Union européenne, qui doit accomplir un double processus de l’UE et de ses 28 Etats membres. L’UE devrait envoyer un signal politique en votant le 8 septembre en commission environnement, puis début octobre devant le Parlement européen, la décision d’adoption de l’accord de Paris.

La déclaration sino-américaine pourrait comporter des avancées dans le domaine de la transparence de leurs politiques énergétiques respectives. Dans un rapport publié en 2015, le Fonds monétaire international (FMI) avait estimé que les compagnies d’extraction d’énergies fossiles bénéficiaient de subventions à hauteur de 4,74 milliards d’euros par an : 40 % seraient le fait de la Chine, 13 % des Etats-Unis et 6 % des pays de l’Union européenne. Or, depuis le début de l’année, Chinois et Américains planchent sur la réalité de leurs subventions dans les énergies fossiles.

« La question de la transparence des subventions dans les énergies fossiles a toujours été une pierre d’achoppement dans les discussions sur le changement climatique. Donc cet exercice est essentiel. L’idéal serait que leurs principales données soient rendues publiques, nous aurions pour la première fois des chiffres en provenance de sources officielles, au lieu d’estimations calculées par des organismes comme le FMI ou l’OCDE », estime Li Shuo.