Au festival Abidjan du rire, un Nicolas Sarkozy désespéré en quête de conseils africains
Au festival Abidjan du rire, un Nicolas Sarkozy désespéré en quête de conseils africains
Par Sandrine Blanchard (Abidjan, envoyée spéciale)
Des humoristes ont imaginé une rencontre désopilante entre l’ex-président français, battu à la primaire de la droite, et des chefs d’Etat du continent d’hier et d’aujourd’hui.
Nicolas Sarkozy est désespéré. Il ne reconnaît pas sa défaite à la primaire de la droite et se dit persuadé qu’il y a eu fraude électorale. Alors il est parti chercher de l’aide et des conseils auprès de ses amis les dirigeants africains. « Je dépéris, je tourne en rond, j’ai perdu dix centimètres », se lamente-t-il. Reçu par « Monsieur France », le chargé des affaires françaises à la présidence ivoirienne, il trépigne en attendant Alassane Ouattara. « Je me sens comme un “expulseur” expulsé. Je veux que des observateurs électoraux africains viennent en France pour un recomptage des voix », s’énerve le candidat malheureux.
Voilà l’excellent scénario, imaginé et coécrit par l’humoriste nigérien Mamane et l’imitateur français Dany Mauro, qui s’est joué, samedi 10 décembre, sur la scène du Palais de la culture d’Abidjan. Pour ce deuxième gala du festival Abidjan capitale du rire, une partie du gratin des présidents africains était réunie sur un large tapis rouge. Six dirigeants d’hier ou d’aujourd’hui, et autant de comédiens imitateurs pour les incarner.
« Appeler un copain »
« Ce qui t’arrive, c’est la loi de la démocratie », lâche Alassane Ouattara, joué par l’Ivoirien Teisson, devant un Sarkozy surpris : « Tu as bien changé tu sais ! » Pour calmer l’insistance de l’ex-président français, Ouattara accepte d’« appeler un copain ». Arrive, droit comme un i, Idriss Déby, interprété avec brio par le Tchadien Prince Djiko, qui déroule fièrement ses fonctions : « Moi Président de la République du Tchad, moi président de l’Union africaine, quand il y a quelque chose, c’est toujours moi qu’on appelle : Boko Haram, djihadistes, AQMI… Alors, au nom de tous les soldats tombés pour la cause du monde entier, je ne peux pas t’aider. » Mais Déby téléphone, à son tour, à un « copain ».
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Et c’est ainsi que le public du Palais de la culture voit défiler Paul Biya, campé par le Camerounais Kaizer, qui adresse ses « sincères condoléances » à Sarkozy, lui recommande la vie en Suisse, mais refuse de lui prêter de l’argent pour payer des mercenaires. « C’est trop dangereux, certains qui t’ont financé ont mal fini ! », précise-t-il en allusion à Mouammar Kadhafi. Puis débarque Blaise Compaoré, « l’Ivoirien nouveau », incarné par le Burkinabé Gérard Ouédraogo, qui conseille au perdant de la primaire de prendre la nationalité italienne comme sa femme Carla.
De son côté, Omar Bongo, imité par le Gabonais Omar DeFunzu, lui demande de « surveiller » son langage : « Sarkozy, on n’est pas tes petits ! » Quant à Mobutu, ressuscité de pied en cap par le Congolais Sony, il suggère au Français de mener une rébellion avant de lâcher : « De toute façon, c’est une affaire de Français tout cela, moi je suis Belge ! »
« Bande de cons »
Sarkozy repart en les insultant, troquant son célèbre « Casse-toi pauvre con » par un « Bande de cons ». Dany Mauro quitte alors le costume de l’ex-chef de l’Etat pour endosser celui de François Hollande. Le président, officiellement « bientôt sur le départ », souhaiterait en réalité qu’Alassane Ouattara lui prête des soldats de l’opération « Licorne » pour se débarrasser de Manuel Valls et d’Emmanuel Macron. Car lui aussi a changé d’avis : il veut finalement se représenter à l’élection présidentielle. « Ce n’est pas possible tous ces gens qui veulent toujours rester au pouvoir ! », s’exclament les présidents africains. Avant d’ajouter, devant un public hilare : « Nous ne sommes pas des gaous [pigeons]. »
Cette galerie de dirigeants ne pouvait pas se terminer sans le dernier arrivé, Donald Trump – « Like a Fucking Duke » –, prêt à construire « un mur autour de l’Afrique » et à « racheter la France pour la vendre au Qatar ».
Sur scène, cette incroyable bande de présidents a entonné, à la manière de « We Are the World », sa chanson au bénéfice de l’association « Présidents sans frontières ». Extrait : « Un peu de reconnaissance pour nous leaders de la souffrance, on était heureux quand tout le monde fermait les yeux. »
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Pour mener à bien cette soirée d’imitations, l’humoriste Mamane a recruté des artistes dans plusieurs pays du continent. « Nous sommes en train de créer l’union des humoristes africains ! », se réjouit le chroniqueur de RFI, inventeur de la République très très démocratique du Gondwana. « Nous revendiquons une liberté totale, insiste-t-il en précisant : être dans la famille du Gondwana, c’est une protection. »