Résultats contrastés du baclofène sur la consommation d’alcool des gros buveurs
Résultats contrastés du baclofène sur la consommation d’alcool des gros buveurs
Une étude montre une efficacité du traitement supérieure de 20 % à celle du placebo, quand un autre essai ne met pas en évidence de différence statistiquement significative.
Le baclofène permettrait de réduire la consommation d’alcool des gros buveurs, selon une étude rendue publique le 17 mars. | DAMIEN MEYER / AFP
Le baclofène permettrait de réduire la consommation d’alcool des gros buveurs, selon une étude rendue publique vendredi 17 mars. Les derniers résultats de cette étude, dite Bacloville, et ceux de l’étude baptisée Alpadir, qui, elle, ne met pas en évidence d’effet statistiquement significatif, ont été dévoilés à l’occasion des journées annuelles de la Société française d’alcoologie, organisées à Paris. Ils précisent les premiers éléments présentés en 2016 lors du Congrès mondial d’alcoologie à Berlin.
Les résultats définitifs de Bacloville, promue par l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), confirment « un effet positif » du baclofène à fortes doses sur la réduction de la consommation d’alcool au bout d’un an de traitement, note l’AP-HP. L’essai, réalisé sans sélection ni sevrage préalable, a inclus de mai 2012 à juin 2013 320 patients âgés de 18 à 65 ans, suivis par des médecins généralistes. Il s’agissait de malades « tout venant, comme en vie réelle, parmi lesquels des dépressifs, des usagers de drogues ou des patients atteints de cirrhose », précise le professeure Philippe Jaury, coordinateur de cet essai.
Mené par tirage au sort, en double aveugle, l’essai Bacloville visait à comparer l’efficacité et la sûreté du baclofène à fortes doses à celles d’un placebo chez des patients alcooliques suivis en ville. Il ne leur a pas été demandé d’arrêter de boire. Les résultats présentés par le docteur Jaury confirment le succès du traitement, c’est-à-dire une abstinence ou une réduction de la consommation jusqu’à un niveau médicalement correct, chez 56,8 % des patients traités (contre 36,5 % chez ceux recevant un placebo). Soit une réduction de la consommation « chez plus d’un malade sur deux », se réjouit M. Jaury.
Grande fragilité des malades
Cet effet n’a cependant pas été observé par l’étude Alpadir. Elle a porté sur 320 patients, dont la moitié sous placebo – 130 ont arrêté prématurément le traitement. Tant sur le sevrage que sur la réduction de consommation, les effets observés à six mois ne présentent pas de différence statistiquement significative entre la prise du baclofène et celle d’un placebo. Pour l’abstinence, objectif principal de l’étude, l’efficacité du baclofène n’était pas supérieure à celle du placebo, confirme le professeur Michel Reynaud (Villejuif). Vraisemblablement parce que les attentes des patients étaient davantage tournées vers une diminution de la consommation, selon le M. Reynaud, président du Fonds actions addictions.
On retrouve dans les deux études des effets indésirables connus – insomnie, somnolence et dépression, plus fréquents avec le baclofène qu’avec le placebo (44 %, contre 31 %, dans l’étude Bacloville). Des morts ont été observées dans l’essai Bacloville, aussi bien dans le groupe de patients traités que dans le groupe sous placebo, selon le professeur Jaury, qui souligne la grande fragilité des malades concernés. Aucun problème grave n’a été relevé dans l’étude Alpadir, mais les participants avaient été sélectionnés pour écarter les plus atteints (cirrhose avancée…) ou ceux ayant des antécédents suicidaires ou prenant des drogues.
Le baclofène a été popularisé par le livre Le Dernier Verre (2008), d’Olivier Ameisen, un cardiologue mort depuis, qui expliquait que ce médicament avait supprimé son envie de boire.