Edouard Philippe, en septembre 2014. | Francois Sechet/Leemage

Edouard Philippe a été nommé premier ministre par Emmanuel Macron, lundi 15 mai. Fidèle à sa promesse d’ouvrir son gouvernement à droite, le président de la République donne ainsi les clés de Matignon au jeune maire du Havre (46 ans), un juppéiste convaincu. Passage en revue de la carrière politique d’Edouard Philippe, en quelques étapes clés.

  • Une jeunesse baignée dans un milieu de gauche

Né à Rouen le 28 novembre 1970, Edouard Philippe évolue au cours de sa jeunesse dans un milieu de gauche. Petit-fils de docker du Havre, arrière-petit-fils du premier encarté communiste de la ville, il a à l’adolescence trois objectifs : ne pas devenir professeur de français comme sa mère, son père et sa sœur, venir vivre à Paris et faire un jour de la politique.

Après une année de classe préparatoire littéraire au lycée Janson-de-Sailly, dans le 16e arrondissement de Paris, il intègre Sciences Po. Il fait alors partie du club Opinion qui rassemble les rocardiens et prend sa carte, pendant un an ou deux, au Parti socialiste. « J’avais une véritable estime et admiration pour Rocard dont la social-démocratie avait du sens », explique aujourd’hui Edouard Philippe au Monde. L’élection de Jacques Chirac en 1995 lui fait finalement prendre conscience que « les valeurs cardinales les plus importantes pour [lui], la liberté et l’autorité, [le] classent à droite ».

Ses amis font valoir « sa multitude d’expériences » pour le poste de premier ministre et le jugent compatible avec le positionnement ni droite-ni gauche d’Emmanuel Macron. Ses détracteurs, eux, le qualifient d’« anguille » politique. « Un coup à gauche, un coup à droite... Il va bien avec Macron de ce point de vue ! », ironise l’élue havraise Nathalie Nail.

  • La mairie du Havre pour strapontin politique

A sa sortie de l’ENA, Edouard Philippe, alors au Conseil d’Etat, est présenté en 2001 à Antoine Rufenacht, le chiraquien maire du Havre, qui lui propose d’intégrer son équipe municipale. Edouard Philippe devient adjoint puis maire en 2010, quand Rufenacht lui propose de prendre sa succession, et, en 2014, est élu maire du Havre dès le premier tour.

« J’ai eu une chance incroyable, il [Antoine Rufenacht] m’a beaucoup aidé, cette rencontre a été très importante pour moi », explique Edouard Philippe. Rufenacht, lui, se souvient n’avoir jamais été consulté sur aucun dossier concernant la ville qu’il lui a offert sur un plateau. « Il n’a aucune reconnaissance », enrage-t-il. Au conseil municipal, ses opposants politiques décrivent Edouard Philippe comme un homme autoritaire.

  • Un fidèle d’Alain Juppé

Avec Alain Juppé, l’entente est immédiate. Les deux hommes se sont rencontrés en 2002. L’ancien premier ministre est alors président de la nouvelle UMP et nomme, sur les recommandations d’Antoine Rufenacht, Edouard Philippe secrétaire général du parti. « Il a grandi aux côtés d’Alain Juppé depuis quinze ans. C’est une filiation intellectuelle et politique très forte. Ils ont toujours été d’accord sur les grands choix. Je n’ai jamais entendu Alain Juppé formuler un point de vue qu’Edouard ne pourrait pas partager », témoigne Gilles Boyer, un proche du maire de Bordeaux.

  • Une haine farouche pour Nicolas Sarkozy

Edouard Philippe a toujours été très opposé à Nicolas Sarkozy auquel il voue une haine farouche depuis qu’ils en sont presque venus aux mains, le 17 novembre 2002, lors du congrès fondateur de l’UMP. Alors ministre de l’intérieur, Nicolas Sarkozy avait tenté de voler la vedette à Alain Juppé, en arrivant – par surprise – à l’heure du déjeuner. Edouard Philippe l’avait empêché de faire une entrée triomphale.

« Dans la loge, il s’avance vers moi. Il me tape contre le poitrail avec le poing, et lâche : “toi, tu ne me refais jamais ça !” Il continue, je repousse son bras, nous sommes tous les deux déséquilibrés. Cela aurait pu déraper… », se souvient Edouard Philippe.

  • Purgatoire en 2004 et rédemption en 2016

Edouard Philippe quitte l’UMP à la suite de la démission de la présidence du parti d’Alain Juppé, condamné à dix ans d’inéligibilité dans l’affaire des emplois fictifs du RPR et de la Mairie de Paris. « Le Rastignac sympa », comme le décrivait un camarade de l’ENA, exerce alors comme avocat puis rejoint le groupe du nucléaire Areva de 2007 à 2010 en tant que directeur des affaires publiques. Comme pour son mentor, c’est le temps du purgatoire. Edouard Philippe reprend du service dans la politique nationale en 2016 quand il repart en campagne comme porte-parole d’Alain Juppé pendant la primaire à droite. Pour respecter la loi sur le non-cumul des mandats, Edouard Philippe renonce à briguer son siège de député.