Les Républicains tentent la synthèse
Les Républicains tentent la synthèse
Par Olivier Faye, Lucie Soullier
Le document publié par LR à l’issue des quatre mois de réflexion sur sa « refondation » montre une droite soucieuse de garder une forme d’équilibre.
Bernard Accoyer, secrétaire général de LR, le 5 juillet. / GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
Surtout, n’exclure personne (encore). Après quatre mois de réflexion sur sa « refondation » à la suite des défaites cinglantes aux élections présidentielle et législatives, marqués par l’envoi d’un questionnaire à ses militants et l’organisation de huit ateliers débats, le parti Les Républicains (LR) a accouché d’une synthèse, mardi 7 novembre. Un document de près de 80 pages qui dresse des perspectives d’avenir pour le parti « de la droite et du centre », mais qui, par certains aspects, rappelle le sort réservé aux élus et ministres de LR favorables à Emmanuel Macron, dont l’exclusion a occasionné plusieurs semaines de tergiversations : celle d’une droite soucieuse de garder une forme d’équilibre, à l’heure du « en même temps ».
Au premier abord, le rapport présenté par le secrétaire général du parti, Bernard Accoyer, semble pourtant inviter à trancher dans le vif. Il appelle d’emblée les chefs de la droite à rendre son homogénéité et son esprit de corps à une formation éclatée en chapelles depuis des années. « [Les militants] demandent à leurs leaders de retrouver l’esprit de compagnonnage qui caractérisait les premières heures du gaullisme, quitte à privilégier la cohérence à l’obsession du rassemblement », introduisent ainsi les rédacteurs du texte dans leur synthèse… Avant de souligner, en même temps donc, qu’« ils leur demandent d’être fidèles à l’histoire de la droite et du centre [qui] se traduit aussi par une diversité de sensibilités que nous devons cultiver ».
Entre « héritage » et « modernité »
Un peu plus loin, on promeut l’idée de « conjuguer » liberté individuelle et projet national, ou encore « héritage » et « modernité », donnant par moments l’impression d’une droite perdue, si ce n’est brisée, qui cherchait pourtant avec ces ateliers à se remettre au clair avec ses valeurs. A ceux qui estiment que le programme de François Fillon était ainsi « le » programme de la droite, la synthèse leur donne crédit… Tout en ménageant ceux qui se reconnaissaient plutôt dans les écuries sarkozyste ou juppéiste : « Au final, le programme de François Fillon constituait une assez bonne synthèse des sensibilités de la droite et du centre, à ceci près que les questions sociétales étaient un peu trop présentes et que les dispositifs de protection des classes moyennes et populaires étaient un peu trop absents. »
Le « sociétal », justement, est balayé par les militants : seuls 18 % d’entre eux considèrent le sujet (qui recouvre ici les questions du mariage pour tous et de la filiation) comme prioritaire, selon les réponses au questionnaire qui leur a été envoyé. De quoi soulager un parti où ces questions divisent, entre partisans de Sens commun et ceux de la droite modérée, notamment.
Terrain identitaire
S’il est bien un point que ces ateliers ont permis d’arbitrer, c’est la nécessité pour la droite de réintroduire la pertinence du clivage droite-gauche, en partie démolie par La République en marche, à tout le moins sur la question économique. Un clivage que Laurent Wauquiez, candidat à la tête de LR, cherche à redessiner en arpentant le terrain identitaire face à un Emmanuel Macron qui éprouverait une « haine de la province ». « Il subsiste en effet une pensée de gauche qui nous porte d’abord vers l’universel, considérant que l’homme est citoyen du monde, et une pensée de droite qui nous renvoie toujours à notre héritage, considérant que l’homme privé d’ancrages est condamné au dénuement », analysent les rapporteurs. Avant de préciser – en même temps – que la droite ne doit pas pour autant s’enfermer dans une logique figée mais « se repenser et se moderniser », car « nous avons quitté un monde que nous ne retrouverons plus ».
Il n’y a bien que sur l’Europe que le parti assume l’impératif d’arrêter rapidement sa doctrine : « A deux ans des élections européennes, il est de toute évidence urgent que notre position sur la question européenne soit clarifiée. » Sans proposer pour autant de voie à suivre.
La tonalité générale de ce rapport se montre plus mesurée que celle parfois entendue lors des débats de ces ateliers, où ont été conviés nombre d’intellectuels ou de représentants de la droite dure. Près de Lyon, le 2 septembre, le journaliste Alexandre Devecchio, responsable de la plate-forme Figarovox, invitait ainsi la droite à « être en marche arrière toute, quitte à être réactionnaire ». En attendant l’élection de son nouveau président à l’occasion du congrès des 10 et 17 décembre, LR a pour le moment choisi une autre position : stationnaire.