L’aventure des vélos « flottants » tourne au fiasco
L’aventure des vélos « flottants » tourne au fiasco
Par Olivier Razemon
Les « vélos flottants », que l’utilisateur peut emprunter et déposer où il le souhaite, ont rapidement été confrontés à plusieurs défis, notamment au sujet de leur qualité.
Un Gobee bike à Paris, le 18 novembre 2017. / GEOFFROY VAN DER HASSELT / AFP
Gobee, c’est fini ! Les premiers Gobee bikes étaient arrivés en fanfare dans les rues de Lille fin octobre 2017. Deux mois plus tard, les vélos vert anis en « free-floating » sont déjà repartis. La société hongkongaise a annoncé le 9 janvier qu’elle se retirait de la capitale des Hauts-de-France, mais aussi de Reims et de Bruxelles.
Les « vélos flottants », que l’utilisateur peut emprunter et déposer où il le souhaite après avoir préalablement téléchargé une application, semblaient pourtant promis à un bel avenir. D’enthousiastes technophiles ne cessaient de vanter la praticité de ces objets, ainsi que l’inventivité du modèle économique des sociétés qui les exploitent. Selon Maddyness, « le magazine des start-up françaises », il existe pas moins de 30 entreprises de vélopartage en free-floating, ayant pour une grande majorité leur siège social en Chine.
Ces flottes semblaient répondre à tous les dysfonctionnements des systèmes en libre-service. Avec le free-floating, la collectivité ne doit plus installer, ni financer, de coûteuses bornes ; l’utilisateur n’a plus à attendre qu’une borne se libère ; la nécessité de la régulation disparaît en même temps que les stations. Et l’ensemble est intégralement financé par une entreprise privée, qui ambitionne de se rémunérer grâce aux abonnements et aux précieuses données récoltées auprès de ses abonnés, mais qui en attendant survit surtout grâce aux levées de fonds.
Vandalismes et vols
Toutefois, les bicyclettes multicolores (jaune citron pour Ofo, cadre blanc, guidon noir et jantes orange chez Obike, cadre gris et jantes orange pour Mobike) ont rapidement été confrontées à plusieurs défis. Tout d’abord, ces vélos sont certes légers, mais aussi fragiles et de qualité médiocre, dotés d’une seule vitesse pour la plupart.
Les vandales et voleurs s’en sont rapidement aperçus, tordant les rayons, arrachant les selles ou les guidons, mettant en pièces les GPS. A Reims, où Gobee avait déposé 400 vélos début novembre 2017, il n’en restait plus que 20 en état de fonctionnement début janvier. Les 380 autres avaient été détériorés, cassés ou volés.
En l’absence de station, les bicyclettes sont déposées partout, en particulier sur les trottoirs, où elles gênent les piétons et minent la réputation des sociétés qui les possèdent. Pour éviter cet envahissement, Lille réclame depuis le mois de décembre une redevance de 11 euros par an et par vélo à chaque opérateur. Paris envisage de faire de même, ce qui ne manque toutefois pas de piquant lorsque l’on constate que l’envahissement des trottoirs de la capitale est bien davantage le fait des scooters que des vélos flottants.
Enfin, les valeureuses start-up chinoises ne semblent pas plus solides que les vélos qu’elles déposent dans les rues. Bluegogo, troisième acteur du marché, a rendu l’âme en novembre 2017, après plusieurs de ses concurrents. Les recettes ne suffisent pas à compenser les énormes pertes dues au vandalisme. Les investisseurs ne suivent plus. En matière de vélo, décidément, la martingale n’existe pas.