Vie privée : après Cambridge Analytica, les annonces en trompe-l’œil de Facebook
Vie privée : après Cambridge Analytica, les annonces en trompe-l’œil de Facebook
Par Martin Untersinger
Après le scandale Cambridge Analytica, le réseau social a annoncé des mesures en matière de vie privée, pour la plupart anciennes et imposées par le droit européen.
Lorsqu’un gouvernement a du mal à faire passer une réforme, c’est souvent un problème de « pédagogie ». Pour Facebook, c’est un peu la même histoire : alors que le réseau social peine à éteindre le scandale Cambridge Analytica, il a présenté mercredi 28 mars des mesures « pour aider [ses] utilisateurs à mieux comprendre [ses] outils ».
« La semaine dernière a montré que nous avions encore beaucoup de travail pour (…) aider les gens à comprendre comment Facebook fonctionne et les choix qu’ils ont sur leurs données. (…) Nous allons prendre des mesures supplémentaires pour que les utilisateurs aient plus de contrôle sur leur vie privée », écrivent Erin Egan, responsable de la vie privée chez Facebook, et Ashlie Beringer, responsable juridique adjointe.
En réalité, la plus médiatique de ces mesures a déjà été annoncée en janvier, certaines sont obligatoires au regard du droit européen, aucune ne changera la pratique de Facebook en matière d’utilisation des données personnelles et pas une seule n’aurait empêché Cambridge Analytica d’aspirer les données de dizaines de millions d’utilisateurs du réseau social.
Des paramètres de vie privée plus clairs et accessibles
Outre un écran de paramètres plus clair sur son application mobile, Facebook va mettre à disposition de ses utilisateurs « dans les prochaines semaines » un lieu unique où seront accessibles les différents paramètres liés à la vie privée et à la sécurité, où il sera possible « de contrôler [ses] données en quelques clics ». Concrètement, l’utilisateur pourra accéder plus facilement à des options qui existent déjà aujourd’hui, comme celles concernant la visibilité de ce qu’il poste sur le réseau social ou les données liées à la personnalisation des publicités.
Facebook recycle ici une annonce qu’il avait faite en janvier. « Cette année, nous introduirons un centre de la vie privée rassemblant les principaux réglages en un lieu unique » écrivait M. Egan le 28 janvier. Dans son dernier communiqué, nulle référence à cette annonce précédente : « La plupart de ces mises à jour sont prévues depuis un certain temps », se contentent d’indiquer Erin Egan et Ashlie Beringer.
Facebook oublie aussi de préciser que ces nouveaux instruments pour mieux contrôler les données personnelles, qu’il présente comme une réponse au scandale Cambridge Analytica, sont aussi un moyen de se conformer au règlement général sur la protection des données (RGPD), un texte européen très contraignant en la matière qui va s’appliquer sur tout le continent dès le 25 mai.
D’autres mesures annoncées par Facebook mercredi répondent à ce règlement, comme l’outil « Accès à vos informations », qui facilitera la suppression de certaines données comme des posts ou des commentaires ; la réécriture du texte expliquant quelles données sont collectées par Facebook et ce qui en est fait ; ou encore la possibilité de transférer ses données d’un service à un autre. Ce dernier point, qui permet à un utilisateur de récupérer ces données personnelles d’un réseau social pour les utiliser chez un concurrent, est une exigence du RGPD, que ce dernier désigne sous le terme de « portabilité des données ». Facebook ne le précise pas.
Ce nouvel écran permettra de supprimer plus facilement les informations personnelles du réseau social. / Facebook
Ces annonces sont avant tout un moyen de calmer la colère de certains utilisateurs : elles n’auraient en rien empêché le sous-traitant de Cambridge Analytica de récupérer les données par dizaines de millions. A l’époque, les règles de Facebook et son fonctionnement technique autorisaient cette captation : de meilleurs réglages de confidentialité n’auraient rien changé. Facebook a modifié ces paramètres en 2015.