Réforme de l’Etat : la stratégie du gouvernement pour éviter la sortie de route
Réforme de l’Etat : la stratégie du gouvernement pour éviter la sortie de route
Par Benoît Floc'h
Le rapport du Comité action publique 2022 (CAP 22) pourrait n’être publié qu’après l’annonce des différentes réformes.
Objectif : éviter l’« effet Borloo ». Le gouvernement ne veut pas, à propos de la réforme de l’Etat, se retrouver dans la même nasse que celle où il était tombé avec le rapport Borloo sur la banlieue. « On ne veut pas d’un rapport qui part dans la nature, dit une source proche du dossier. Parce qu’après on ne sait plus si on parle du rapport ou des arbitrages du gouvernement. »
L’exécutif a une obsession : maîtriser ce dossier dont l’enjeu est déterminant pour la suite du quinquennat. Les experts du comité action publique 2022 (CAP 22) ont imaginé une quarantaine de propositions assorties de huit-dix mesures pour rendre l’Etat plus efficace et moins coûteux. Le contenu est encore officieux et devrait encore le rester un petit moment.
Depuis le début, en octobre 2017, le processus avance avec peine. Les retards se succèdent, des tensions sont apparues, des fuites se sont produites… Tout cela a électrisé l’atmosphère. CAP 22 commence à ressembler à une grenade dégoupillée que le gouvernement ne semble plus trop savoir comment manipuler. Il a donc décidé de changer de méthode. Plus question, comme prévu initialement, de publier le rapport quelques semaines avant les décisions politiques.
« Pas là pour répondre à des rapports mais pour prendre des décisions »
Ces derniers jours, l’exécutif envisageait de rendre public, début juillet, son plan en même temps que le rapport des experts pour éviter de mettre en débat des propositions qu’il ne retiendrait, finalement, pas. Mais, selon les informations du Monde, c’est un autre scénario qui se profile aujourd’hui. Pour éviter de prendre des risques, le gouvernement se résout, en quelque sorte, à démonétiser, voire à « désosser » CAP 22. Il ne faut surtout pas que le rapport soit « un coup de pistolet dans un concert », comme aurait dit Stendhal.
Ce que l’exécutif veut mettre en avant, c’est la politique, pas les experts. « Le gouvernement n’est pas là pour répondre à des rapports mais pour prendre des décisions », a dit Emmanuel Macron en conseil des ministres, mercredi 6 juin. Priorité aux réformes, donc, qui seront annoncées les unes après les autres, au fil des semaines, « dès que les décisions seront mûres », précise-t-on de même source.
Le premier ministre, Edouard Philippe, a envoyé une circulaire à ses ministres, le 4 juin, pour leur demander de boucler leur plan de transformation dans les semaines qui viennent en s’appuyant sur le travail du comité CAP 22. Mais de nouvelles réformes pourraient être annoncées d’ici là par tel ou tel ministre. Un comité interministériel devrait se réunir début juillet. Il aura pour but de « donner du sens » à l’ensemble.
Le fameux rapport, lui, ne sera publié qu’à la fin du processus. En juillet, peut-être, voire à la rentrée. Et il se pourrait bien, précise une source gouvernementale, qu’il le soit « en pièces détachées ».