A la suite du drame de Gênes, Bruxelles renvoie le gouvernement italien à ses responsabilités
A la suite du drame de Gênes, Bruxelles renvoie le gouvernement italien à ses responsabilités
Par Jean-Pierre Stroobants (Bruxelles, bureau européen)
Le commissaire européen en charge des affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, n’a pas laissé beaucoup d’espoir au gouvernement de Rome.
Interrogé lundi 20 août à midi sur le projet italien d’un plan, à hauteur de quelque 40 milliards, qui serait destiné au réaménagement d’une série d’infrastructures publiques, dont les autoroutes, le commissaire européen en charge des affaires économiques et financières, Pierre Moscovici, n’a pas laissé beaucoup d’espoir au gouvernement de Rome. Celui-ci évoque l’idée de mener à bien ce projet en dérogeant aux règles du pacte de stabilité financière et de croissance, imposé à chaque Etat membre de l’Union.
Le commissaire français a souligné que « les Etats qui s’endettent s’appauvrissent » et a rappelé les aides dont a déjà bénéficié Rome. Soit, « 2,5 milliards d’euros au titre de la dernière phase des fonds structurels, 8,5 milliards d’euros pour les autoroutes, 12 milliards pour les transports dans le cadre du plan Juncker pour l’investissement ».
La situation du budget italien sera examinée prochainement dans le cadre du « semestre européen » a indiqué le commissaire, « sans oublier le poids de la dette publique du pays », insistait-il. Il se dit cependant prêt à « poursuivre le dialogue » avec le gouvernement de M. Conte.
Le commissaire français a certes assuré à l’Italie que Bruxelles la soutiendrait, « comme elle l’a toujours fait », à la suite de la catastrophe de Gênes, mais il ne s’est pas démarqué des commentaires entendus jusqu’ici à Bruxelles.
« Clarifier certaines choses »
La semaine dernière, la Commission européenne avait, à mots couverts, contesté les critiques du gouvernement populiste, un porte-parole déclarant : « Nous pensons que le temps est venu de clarifier certaines choses. » « Pour mémoire, en vertu des règles fiscales [de l’UE], les États membres sont libres de fixer des priorités politiques spécifiques, par exemple le développement et l’entretien des infrastructures », expliquait Christian Spahr. L’UE, soulignait-il, a « encouragé » l’investissement en Italie.
Le ministre italien de l’Intérieur, Matteo Salvini, avait critiqué la Commission en indiquant que « s’il y a des engagements extérieurs qui nous empêchent de dépenser l’argent que nous devrons mettre pour la sécurité des écoles et des autoroutes, il faudra se poser la question de continuer à respecter ces engagements ». Il plaidait aussi pour « exclure » les fonds pour la sécurité du Pacte de stabilité et de croissance. « Les investissements qui sauvent des vies, des emplois et le droit à la santé ne doivent pas faire l’objet des calculs rigides et des règles imposées par l’Europe », avait-il déclaré.
Luigi Di Maio, vice-premier ministre et chef de file du Mouvement 5 Etoiles, affirmait de son côté que « l’Europe peut dire ce qu’elle veut, mais nous ne demandons pas, nous exigeons sur ce point ».
« Il y a aussi de la flexibilité dans le Pacte, et l’Italie [en] a été l’un des principaux bénéficiaires », avait répondu la Commission. L’autoroute italienne A10, qui traverse Gênes, fait partie d’un programme européen de développement des infrastructures de transport et était censée répondre à une directive de 2008 sur la sécurité des routes. « Ce sont les autorités nationales qui doivent s’assurer que les règles sont respectées », expliquait la Commission, renvoyant les pouvoirs publics transalpins à leurs responsabilités.