La détention d’un écrivain australien suscite une crise diplomatique entre Pékin et Canberra
La détention d’un écrivain australien suscite une crise diplomatique entre Pékin et Canberra
Par Simon Leplâtre (Shanghaï, correspondance)
D’origine chinoise, critique du pouvoir communiste en place, Yang Jun a été formellement arrêté après avoir été détenu au secret pendant six mois.
Yang Hengjun, à Pékin, en 2017. Photo fournie par la famille. / AP
Yang Jun, écrivain australien d’origine chinoise et critique du Parti communiste, a été formellement arrêté jeudi 18 juillet, après six mois de détention au secret. Sa famille a reçu une note officielle les informant qu’il était suspecté de « mettre en danger la sécurité de l’Etat », et serait transféré dans un centre de détention, à Pékin, première étape avant une inculpation formelle, d’après l’avocat de M. Yang. Ancien diplomate chinois naturalisé australien en 2000, Yang Jun était devenu un intellectuel reconnu, sous le nom de plume « Yang Hengjun », défendant les valeurs universelles et la démocratie à la fois dans ses recherches et sur des billets de blog, très lus en Chine sur les plateformes Weibo et Wechat.
L’Australie s’est dite « profondément déçue » par cette détention, demandant une résolution « juste et transparente » de l’affaire, et l’accès à un avocat pour M. Yang. « Cela n’a pas été le cas pour l’instant », a conclu un communiqué de la ministre des affaires étrangères Marise Payne, vendredi. Fin de non-recevoir de la Chine, qui « exhorte la partie australienne à ne pas s’immiscer dans la gestion légale de cette affaire, et d’arrêter de faire des remarques irresponsables », selon les mots d’un porte-parole du ministère des affaires étrangères vendredi.
« Résidence surveillée dans un lieu désigné »
Yang Jun avait été arrêté en janvier, lors d’un passage en Chine depuis New York, où il était chercheur invité à l’université de Columbia. Il était détenu en « résidence surveillée dans un lieu désigné », une forme de détention qui permet aux autorités de détenir des personnes au secret jusqu’à six mois, pour des crimes graves. Le chef d’inculpation de « mise en danger de la sécurité de l’Etat » est souvent utilisée pour des accusations d’espionnage. Xiaoliang Yuan, la femme de Yang Hengjun, et sa belle-fille, qui l’accompagnaient lors de son passage en Chine, ont été empêchées de quitter le territoire chinois, et vivent chez des proches depuis l’arrestation de Yang.
Critique du pouvoir chinois, Yang Hengjun s’était pourtant fait discret ces dernières années, refusant les interviews des médias internationaux. Son arrestation pourrait être liée aux relations tendues entre son pays d’origine et son pays d’accueil : l’économie australienne a profité des importations de matières premières chinoises, mais ces dernières années, Canberra a dénoncé des opérations d’influence chinoises sur sa politique locale.
En août 2018, l’Australie avait rejeté la participation de Huawei, le leader chinois des télécommunications à la construction du futur réseau 5G, de peur que l’entreprise ne mette en danger des infrastructures sensibles. Une décision perçue comme hostile par Pékin.