A Nantes, un « boot camp » pour mieux phosphorer
A Nantes, un « boot camp » pour mieux phosphorer
Par Angèle Guicharnaud
L’école de commerce nantaise Audencia a organisé en mars une session durant laquelle une centaine d’étudiants ont relevé les défis lancés par neuf start-up et entreprises.
Les 3 et 4 mars, un « boot camp » à l'école de commerce Audencia, à Nantes, pour une rencontre entre les étudiants et des entreprises, start-up et créateurs en recherche d'idées. | AUDENCIA
Le nom de l’exercice en dit long : boot camp, un terme qui désigne à l’origine l’entraînement intensif réservé aux jeunes recrues de la marine américaine… Pas de rangers ni de treillis, les jeudi 3 et vendredi 4 mars, dans les salles de cours de l’école de commerce Audencia à Nantes mais des Post-it, des Lego multicolores et une imprimante 3D. D’un côté, des entreprises, des start-up et des créateurs cherchent des pistes pour développer leurs activités ; de l’autre, des équipes de dix étudiants ont deux jours pour leur apporter gratuitement des réponses novatrices.
Tristan Fraud est l’un des neuf porteurs de projet. Il souhaite créer un jeu qui incite les adultes à aller donner leur sang. Assis avec les étudiants autour d’une table, ce jeune designer indépendant de 26 ans prête une oreille attentive aux idées – surtout les plus farfelues – lancées par les étudiants.
« Boot camp »
« Je suis venu à ce boot camp pour avoir des idées neuves, voire folles, auxquelles je ne pense pas, dit-il. C’est un moyen d’entraîner ma propre créativité. » Parmi les huit autres porteurs de projet figurent des dirigeants de start-up plutôt axées sur l’innovation, mais aussi des représentants d’entreprises bien installées comme le géant de la chaussure Eram. Face à eux, 70 étudiants suivent les cours des mastères « business développement » ou « stratégie en marketing digital » d’Audencia. Les autres étudient à l’Ecole de communication visuelle de Nantes (ECV).
« Post-it tous azimuts »
Dans le rôle de conseiller, Thomas Dupeyrat, fondateur de l’Atelier Iceberg, une société de design nantaise, passe de groupe en groupe pour faire le point et relancer la réflexion. « Essayez maintenant de cerner les clients visés. Et collez des Post-it tous azimuts ! » Son injonction s’adresse à l’équipe Eram à laquelle incombe d’imaginer le magasin du futur. Très vite, des nuages de papillons adhésifs et de croquis viennent tapisser les murs. Expériences personnelles, articles lus, techniques apprises en cours de marketing : les étudiants font feu de tout bois pour relancer leurs réflexions.
Le groupe d’Adrien Jimenez, étudiant en « marketing à l’ère digitale », n’a pas la tâche facile. Il s’agit de concevoir une montre connectée (en carton) pour le compte de la jeune pousse Dooloo, afin que des patients transmettent à intervalles réguliers des informations sur le degré de douleurs chroniques dont ils souffrent. « L’une des difficultés a été de maîtriser rapidement les termes techniques et médicaux », avoue l’étudiant. Peu emballé au départ par le projet qui lui était assigné, Adrien Jimenez dit s’être finalement « pris au jeu ».
Etudiante en troisième année, Margaux Oscaby, 22 ans, travaille avec son groupe sur un sujet délicat : un outil devant permettre à une entreprise de mieux évaluer les compétences de ses salariés lorsqu’ils changent d’affectation. « Comme le concept était, à nos yeux, assez difficile à saisir, durant les deux premières heures, nous avons collé des Post-it machinalement sans trop savoir où on allait. Progressivement, avec l’aide du porteur de projet qui nous recadre un peu, nous rentrons dans le sujet. Surtout, nous avons mieux défini les limites légales du projet. »
« Belles prestations »
Dans le cadre de son double cursus d’ingénieur et de manageur « où [elle est] rarement amenée à défendre ses idées », elle a déjà participé à d’autres boot camps. Elle apprécie l’exercice qui se déroule sur deux journées, au lieu d’une lors des précédentes sessions : « C’est moins stressant et plus constructif. Au début, on ne voit pas ce qu’on peut apporter et puis progressivement, on se lâche. Et cette fois, les porteurs de projet travaillent avec nous. »
Vendredi, à 18 heures, le temps est écoulé. Les équipes convergent vers l’amphithéâtre principal pour présenter en trois minutes le fruit de leurs deux journées de cogitation. Ils recourent à des sketchs, des maquettes en Lego. Ils savent que leur créativité est évaluée jusque dans leur dernière prestation. Face à eux, un public de 150 personnes et un jury constitué de six professionnels prêts à les pousser dans leurs retranchements. Les jurés sont, dans l’ensemble, satisfaits. Ils soulignent « de belles prestations, des idées très sérieuses et créatives ».
Enric Kayo, porteur du projet MyJomo, une jeune pousse qui commercialise des badges connectés, est, quant à lui, enchanté. « On bosse sur ces badges depuis un an et demi. En deux jours, les étudiants ont trouvé des usages auxquels nous n’avions pas du tout pensé », se réjouit-il. L’équipe chargée de son projet a remporté le boot camp.