Critique gastronomique : addict au Botanique
Critique gastronomique : addict au Botanique
M le magazine du Monde
[Le verdict de François Simon] Cette semaine, le chroniqueur de « M Le magazine du Monde » s’est rendu dans ce restaurant aux accents japonais avec, côté pile, un bistrot à tapas et, côté face, une table gastronomique.
François Simon, le critique gastronomique de "M Le magazine du Monde". | Deirdre Rooney
C’est comme s’il y avait un gisement de tables à Paris. Un puits artésien. Cela n’arrête pas. Certes parfois similaires avec leur trilogie monacale, leur triptyque rigide (un bout de poisson, un légume veuf, une citation végétale) levant les yeux au ciel, mais bon, personne ne se plaint, ces tables-là font le plein, le miel des clients volages.
La question tombe alors : y retournera-t-on ? Sans doute oui, ici, au Botanique, dans le 11e fourmillant d’idées. Il y a un chef qui devait avoir des fourmis dans les mains. Il s’appelle Sugio Yamaguchi. Il est passé sous les ordres et le regard de Pierre Sang Boyer, Nicolas Le Bec, Georges Blanc.
Il s’est associé avec un sommelier, Alexandre Philippe. Deux niveaux dans le restaurant : en bas version bistrot à tapas. En haut avec la dimension gastronomique et la punition qui va avec : le menu dégustation, ou dit encore « à surprise », qui heureusement va bientôt disparaître ici pour laisser place à la fantaisie et à l’humeur du client, ce qui semblait aller de soi en des temps moins évolués. Cette cuisine n’a pas besoin de jouer au mystérieux, de faire tatadam, ou de rouler des yeux cernés de khôl pour impressionner. Elle a même besoin de paix, de sérénité.
Homard aux trois façons.
Car voici des compositions apaisées comme ce homard en raviole d’épinard et légumes, subtilement soulevé par un dashi (bouillon de homard) propre à faire sursauter les amateurs d’umami, cette fameuse cinquième dimension japonaise de la gastronomie, le rayon vert immatériel. Suivent ensuite le black angus sans histoire, et réjouissant cette fois-ci, des agrumes en gelée d’hibiscus et granité de yaourt. On revient alors à ces fameux tremblements (la gelée) de la cuisine japonaise, sorte de sensualité où la matière (enfin) prend l’ascendant sur le goût et ses devoirs impérieux (dominer). Voici donc une cuisine un brin addictive, subtile et bien troussée. Servie au diapason, compréhensive et solidaire. Clientèle pliée dans le même sens.
Passage à l’acte
Le Botanique, 71, rue de la Folie-Méricourt, Paris 11e. Tél. : 01-47-00-27-80. Du mardi au samedi. Réservation plutôt par Internet sur www.botaniquerestaurant.com.
Le rez-de-chaussée du restaurant est réservé, comme le sous-sol, aux tapas. | Botanique Restaurant
- Décibels : 84 dB d’une clientèle affairée.
- Mercure : 22 °C en haut près des cuisines, plus doux en bas juste avant les beaux jours…
- L’addition : Menu du soir, 5 plats à 55 €. Carte de tapas au rez-de-chaussée de 6 à 13 €.
- Minimum syndical : en bas, avec les tapas, possibilité de s’en sortir dans les 15-20 euros.
- A emporter : Les jolies associations de la carte, le jeu des textures et des saveurs. Et si l’on déplaçait un peu les lignes…
- Dommage : La partie restaurant en est toujours au menu surprise infantilisant. Heureusement, cela ne devrait pas tarder à changer : youpi !
- Place de choix : En haut, c’est pas mal du tout, près de la cuisine et sous le toit ajouré.
- Verdict : Oui.