Au Gabon, un bon footballeur doit aussi avoir le pied marin
Au Gabon, un bon footballeur doit aussi avoir le pied marin
Par Alexis Billebault (chroniqueur du Monde Afrique)
Pour disputer un match, les joueurs d’un club de Libreville ont voyagé une quinzaine d’heures dans des conditions périlleuses à bord d’un navire marchand.
Extrait d’une vidéo tournée pendant le voyage des joueurs du FC Missile entre Libreville et Port-Gentil. | DR
Mieux vaut ne pas avoir le mal de mer quand on est footballeur gabonais. C’est sur un bateau de marchandises et sur une mer agitée que les joueurs du FC Missile, un club de première division de la capitale Libreville, se sont rendus à Port-Gentil pour disputer un match de championnat, le 26 mai.
Au Gabon, un bon footballeur doit aussi avoir le pied marin
Durée : 01:08
« Il y a des retards dans le versement des salaires et des primes, pas de couverture sociale, mais là, on a franchi un cap supplémentaire, déplore Rémy Ebanega, président de l’Association Nationale des Footballeurs Professionnels du Gabon (ANFPG) et joueur du CA Bastia. Je n’avais jamais vu cela au Gabon, un pays qui va organiser la CAN 2017. C’est pathétique… »
Pendant plus de quinze heures, les joueurs de l’US Missile, le club de l’Armée nationale, sacré champion du Gabon en 2011, ont voyagé dans des conditions difficiles à bord de l’Antares. « Nous avons dormi sur le pont, installés sur des sacs de marchandises contenant des piments, des tomates, des bananes. Enfin, si on peut appeler ça dormir… Il y avait le bruit des moteurs, il faisait froid, l’eau jaillissait de partout. C’était dangereux », a raconté un joueur, qui a souhaité conserver l’anonymat.
« Des conditions indignes »
Quant à la nutrition d’avant-match, les dirigeants de l’US Missile n’y ont pas vraiment prêté attention. « Ils nous avaient remis 3 000 francs CFA [4,5 euros] pour boire et manger, mais comme il n’y avait rien à acheter, se souvient le joueur. Ils font des économies sur notre dos en nous faisant voyager dans ces conditions indignes. Ils encaissent l’argent versé par l’Etat et ils en gardent une partie. Je regrette presque d’être devenu footballeur… »
Le Colonel Mathieu Effayong, directeur sportif du FC Missile, voit les choses différemment. « Il fallait bien se rendre à Port Gentil ! Nous ne voulions pas déclarer forfait, et c’était le seul bateau disponible à cette date », explique le dirigeant, qui assure que l’Antares n’est pas un navire marchand puisqu’il peut accueillir cinquante personnes dans une cabine, mais uniquement en position assise.
Mathieu Effayong conteste également que les joueurs aient passé la nuit à la belle étoile, sur le pont. Et il estime que son équipe, même si elle s’est inclinée (1-0), « a quand même fait un bon match ». « Nous allons bientôt nous rendre à Franceville, assure t-il. L’équipe voyagera en train. » Sur le toit ?