La pollution de l’air est responsable de 9 % de la mortalité en France
La pollution de l’air est responsable de 9 % de la mortalité en France
Par Laetitia Van Eeckhout
Une étude de Santé publique France estime que la pollution aux particules fines provoque 48 000 morts prématurées par an.
Vue de Paris lors d’un pic de pollution, le 18 mars 2015. | REUTERS/GONZALO FUENTES
La pollution de l’air est responsable de 48 000 morts chaque année en France. Une nouvelle « évaluation quantitative d’impact sanitaire », publiée mardi 21 juin par Santé publique France (agence issue de la fusion, le 3 mai, de l’Institut de veille sanitaire avec d’autres organismes), rappelle que la pollution atmosphérique constitue bel et bien un problème de santé publique. A l’origine de 9 % des morts annuelles en France, les particules fines d’un diamètre inférieur à 2,5 micromètres – les fameuses PM2,5, qui pénètrent profondément dans le système respiratoire et provoquent de nombreuses pathologies – entraînent une perte d’espérance de vie à 30 ans pouvant dépasser deux ans dans les villes les plus polluées.
Et encore, « cet impact des particules fines sur la santé est probablement sous-estimé », selon Sylvia Médina, coordinatrice du programme Air et santé. « Nous utilisons dans notre étude les PM2,5 comme traceur, car il s’agit de l’indicateur de pollution le plus étudié en termes d’effets sur la santé, mais la pollution atmosphérique est un mélange complexe de milliers de polluants qui interagissent », rappelle-t-elle.
47 millions d’habitants touchés
Effectuée durant la période 2007-2008, cette évaluation confirme l’ordre de grandeur de la dernière estimation publiée en 2005 dans l’étude européenne CAFE (Clean Air for Europe, « Air pur pour l’Europe »), menée en 2000 par la Commission européenne. Cette étude avait estimé à 42 000 morts prématurées l’impact de la pollution de l’air en France. A la différence de cette dernière, qui croisait les niveaux de concentration de PM2,5 avec des études épidémiologiques américaines, l’évaluation faite par Santé publique France s’appuie entièrement sur des données épidémiologiques françaises.
Les effets de la pollution sont, sans surprise, plus importants dans les grandes villes : dans les zones urbaines de plus de 100 000 habitants, la perte d’espérance de vie à 30 ans du fait des PM2,5 atteint quinze mois en moyenne, ce qui correspond à 26 000 morts annuelles.
Néanmoins, les villes moyennes et petites, de même que les zones rurales ne sont pas épargnées, souligne l’étude de Santé publique France, qui a porté sur la totalité des 36 219 communes de l’Hexagone. Quelques communes rurales, à proximité d’industries, comme autour de l’étang de Berre (Bouches-du-Rhône) ou dans l’est de la France, connaissent même des concentrations en polluants atmosphériques importantes. Ainsi, 800 000 personnes résidant dans des communes rurales sont exposées à des valeurs dépassant en moyenne 14 µg/m3.
Globalement, plus de 47 millions de personnes en France sont soumises à une concentration moyenne annuelle de PM2,5 dépassant la valeur guide de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), soit 10 µg/m3. Si cette valeur était respectée partout en France, 17 700 morts pourraient être évitées chaque année, souligne l’étude, qui s’est intéressée aux bénéfices attendus d’une amélioration de la qualité de l’air selon plusieurs scénarios. Cela correspondrait à une baisse de la mortalité en France de l’ordre de 4 %. « Si dans toutes les communes était respectée ne serait-ce que la valeur proposée par le Grenelle de l’environnement (15 µg/m3 de PM2,5), ce sont tout de même plus de 3 000 décès qui pourraient être évités chaque année », relève Mathilde Pascal, épidémiologiste de la direction santé environnement.
Pollution chronique
De nombreuses études scientifiques mesurant les effets sanitaires d’actions visant à améliorer la qualité de l’air font néanmoins état de réelles améliorations, indique Santé publique France. « La réduction des niveaux de polluants uniquement en cas de pic de pollution ne permet pas d’assurer une prévention efficace des impacts sanitaires », souligne toutefois l’agence. Elle appelle les décideurs à s’attaquer à la pollution chronique, en réduisant la dépendance aux énergies fossiles, en favorisant un usage du chauffage plus écologique, en développant les modes doux de mobilité en ville…
« Les effets de la pollution atmosphérique résultent surtout de l’exposition quotidienne aux polluants. Même à des niveaux peu élevés, les particules fines ont des effets inflammatoires et contribuent au développement de maladies chroniques », insiste en effet Sylvia Médina. Plus de 80 % des morts et des hospitalisations pour cause cardiaque attribuables à la pollution de l’air sont ainsi associées à des niveaux journaliers de PM10 inférieurs au seuil réglementaire d’alerte, durant les pics de pollution, de 80 µg/m3 d’air.