La chancelière allemande, Angela Merkel, lors du congrès de l’association des industriels allemands de l’énergie, mardi 8 juin, à Berlin. | CHRISTOF STACHE / AFP

Qui l’eut crû ? Six ans avant la sortie totale du nucléaire civil, prévue pour 2022, l’Allemagne freine le développement des énergies renouvelables. Un projet de loi, adopté mercredi 8 juin en conseil des ministres, change totalement le système de subventions accordées au secteur.

Depuis 2000 et jusqu’à présent, n’importe quel investisseur dans le solaire, l’éolien ou la biomasse était assuré de toucher un revenu garanti pendant vingt ans. Par ailleurs, les énergies renouvelables ont une priorité d’accès au réseau. En cas de surplus, ce sont les autres sources d’énergie qui sont pénalisées.

Le hic ? Ce développement des énergies renouvelables coûte cher aux contribuables. De plus, leur développement implique la construction de grands réseaux à haute tension entre le nord et le sud du pays, pour transporter une électricité de plus en plus produite par l’éolien au nord et consommée par les industriels au sud. Or, la construction de ces infrastructures prend du retard, les réseaux existants sont saturés et il est de plus en plus fréquent de devoir mettre momentanément hors service des centrales classiques pour privilégier le renouvelable.

Appels d’offres

A partir de 2017, le gouvernement va donc procéder différemment : des appels d’offres seront lancés chaque année pour chaque source d’énergie et le moins-disant l’emportera. Il est déjà prévu, par exemple, que l’éolien terrestre fournisse 2 800 mégawatts (MW) supplémentaires de 2017 à 2019, puis 2 900 MW pour chacune des années suivantes, ce qui représente un peu moins d’un millier de nouvelles éoliennes par an. Pour rééquilibrer géographiquement l’offre et la demande, les appels d’offres seront limités dans les Etats-régions où cette source d’énergie est déjà très développée.

De même, alors que l’éolien offshore est en train de dépasser ses objectifs, les appels d’offres annuels devraient être de 750 MW à partir de 2021. Le but est d’arriver à 15 Gigawatt en 2030.

Dans le solaire, les appels d’offres devraient être limités à 600 MW par an. Seuls les particuliers qui disposent d’installations solaires sur leur toit (dans la limite de 750 kilowatts) sont épargnés par ce futur dispositif, nettement plus compétitif que l’actuel : même lorsque l’objectif de 52 000 MW d’énergie photovoltaïque sera atteint, les subventions seront maintenues.

Des objectifs maintenus

Quant à la biomasse, chère aux agriculteurs bavarois, elle devrait fournir 150 MW supplémentaires par an, un volume pouvant être porté à 200 MW à partir de 2020. Une revendication à laquelle tient la CSU bavaroise, qui insiste également sur un autre point : l’enfouissement des réseaux électriques, ce qui explique en partie le retard de deux ans en moyenne de leur réalisation.

Les objectifs du gouvernement en matière d’énergie renouvelables sont, néanmoins, maintenus : en 2025, 45 % de l’électricité doit être issue d’une énergie renouvelable, contre environ 33 % actuellement et 17 % en 2010.

Le gouvernement justifie ce virage stratégique par le fait que les énergies renouvelables sont désormais un secteur mature qui n’a plus besoin d’être autant porté par les pouvoirs publics que par le passé. Les écologistes font remarquer que cette politique permet aussi au gouvernement de continuer à subventionner le charbon, très polluant… mais socialement et politiquement important. Le charbon (lignite et houille) continue de représenter 40 % de l’électricité produite en Allemagne, ce qui explique les difficultés du pays à réduire ses émissions de CO2.

Le projet de loi présenté ce mercredi en conseil des ministres doit très rapidement passer devant le Bundestag, afin d’être soumis, dès cette année, à la Commission européenne.