La présidente de General Motors, Mary Barra, avec le patron du groupe PSA, Carlos Tavares, le 6 mars. / ERIC FEFERBERG / AFP

Le rachat d’Opel-Vauxhall par PSA à General Motors tourne à la foire d’empoigne. Trois mois à peine après la finalisation de l’accord, le groupe français, qui a versé près de 1,3 milliard d’euros au groupe américain pour acquérir les deux marques européennes, veut déjà revoir ce montant à la baisse. Il chercherait à obtenir un rabais de 500 millions d’euros, affirmait l’agence Reuters, mercredi 29 novembre.

PSA estime avoir été induit en erreur par le géant américain sur la trajectoire à venir des émissions de CO2 de la gamme en développement d’Opel et Vauxhall. D’après la réglementation européenne, à partir de 2021, il faudra régler d’importantes amendes en cas de dépassement du seuil de 95 grammes de CO2 par kilomètre. Aujourd’hui, ce seuil – respecté à la fois par PSA et Opel – est fixé à 130 g de CO2 par kilomètre.

A l’avenir, un constructeur devra acquitter 95 euros pour chaque gramme excédentaire, et ce pour chaque voiture concernée, selon un savant calcul de la Commission européenne. La facture pourrait donc s’envoler très vite, atteignant plusieurs dizaines, voire centaines de millions d’euros pour des groupes qui écoulent plus de deux millions de véhicules sur le Vieux Continent. Avec son plan de développement initial, Opel pourrait dépasser de 4 à 10 grammes ces limites européennes.

General Motors était au fait du problème et avait d’ailleurs clairement expliqué son retrait d’Europe pour ces raisons réglementaires. Au même moment, Karl-Thomas Neumann, l’ancien PDG d’Opel, avait même annoncé sa volonté d’électrifier à moyen terme l’ensemble de la gamme de l’éclair. « Ces déclarations n’étaient pas fondées sur un plan réel », assure une source.

En fait, pour améliorer ses rejets de CO2, le constructeur allemand avait tout misé sur l’Ampera-e, un véhicule électrique développé par les équipes de GM. Un plan « non viable », car la marque perdrait environ 10 000 euros par véhicule vendu.

Ecueil de 2021

Le constructeur tricolore était au courant de la situation délicate du constructeur allemand. GM rappelle en effet que « PSA a conduit un processus de “due diligence” robuste incluant ses salariés et beaucoup d’experts et d’avocats. Nous leur avons fourni des informations substantielles ». Pas assez précises, pense-t-on cependant chez PSA.

Le 9 novembre, lors de la présentation du nouveau plan stratégique d’Opel, Carlos Tavares, le ­patron du groupe PSA, déclarait : « Nous avons pris conscience que l’entreprise allait dans le mur [concernant la trajectoire CO2] quelques jours après le “closing” » du rachat. Il avait également confié à la presse allemande : « Quand nous avons acheté Opel à General Motors, on ne nous a pas montré la face cachée de la lune. »

Afin d’éviter l’écueil de 2021, le nouveau plan stratégique d’Opel prévoit l’électrification à court terme de quatre modèles, dont la Corsa, l’une des voitures les plus vendues de la marque.

Parallèlement, le groupe français va accélérer l’adoption par les véhicules allemands de la technologie française en matière de dépollution des moteurs. Ce qui pourrait augmenter d’un milliard d’euros les investissements nécessaires. Dans le même temps, la marque au lion espère renégocier à la baisse le prix d’achat du groupe allemand. « Dans tout rachat, il existe des clauses d’ajustement des prix », explique un observateur.

A la Bourse, la situation soulève des inquiétudes. Depuis le début du mois de novembre, l’action PSA a fondu de 13 %, passant à 17,60 euros, jeudi 30 novembre, à l’ouverture. Les analystes de JPMorgan, qui ont rencontré mercredi Jean-Baptiste de Chatillon, le directeur financier de PSA, incitaient cependant dans une note à ne pas se fier aux rumeurs et à rester patient concernant l’intégration d’Opel au groupe PSA. Selon eux, les progrès en matière de synergies seraient plus rapides que ce qui est prévu par le plan stratégique.