L’Islande aux urnes pour l’élection présidentielle, entre Euro de football et « Brexit »
L’Islande aux urnes pour l’élection présidentielle, entre Euro de football et « Brexit »
Le Monde.fr avec AFP
Un universitaire sans étiquette de 47 ans par largement favori dans un scrutin qui passionne moins la population islandaise que l’Euro.
Gudni Johannesson, le favori de la présidentielle islandaise, place son bulletin dans l’urne. | HALLDOR KOLBEINS / AFP
À peine plus de 24 heures après le Brexit et en plein Euro de football, les Islandais vont se choisir un nouveau président de la république, samedi 25 juin, après six mandats consécutifs du président sortant.
La scène politique de cette petite île de 330 000 habitants a été ébranlée par le scandale des « Panama Papers », conduisant à la démission d’Olafur Ragnar Grimsson, qui présidait le pays depuis 1996.
Gudni Johannesson, un universitaire sans étiquette de 47 ans qui concourt pour la première fois à une élection, a largement les faveurs des derniers sondages. Cette neutralité a séduit les électeurs : fin avril, le président démissionnaire semblait bien parti pour être réélu, malgré le scandale des « Panama Papers », et réunissait plus de 50 % des intentions de vote. M. Johanesson s’est déclaré candidat très tardivement, début mai et a largement rattrapé son retard, bien aidé par le retrait de la course de M. Grimsson.
M. Johannesson l’emporterait avec 44,6 % des suffrages devant une femme d’affaires, Mme Halla Tomasdottir, dont les intentions de vote ont nettement augmenté, à 18,6 %, selon une enquête Gallup publiée vendredi pour la chaîne de télévision RUV. Elle devancerait l’ancien premier ministre et ex-gouverneur de la Banque centrale, David Oddsson. À 68 ans, ce dernier reste trop souvent associé aux excès de la finance qui ont conduit à la tempête de 2008. Ce dernier espère encore la mobilisation d’« électeurs cachés », a-t-il expliqué, badin, juste avant de rentrer dans l’isoloir.
L’Euro de football vole la vedette
S’il est élu, M. Johannesson compte moderniser les institutions, entre autres en permettant des référendums d’initiative populaire. « Je m’efforcerai d’être non politique dans le champ politique », avance-t-il. La neutralité apparente de ce candidat séduit les Islandais, de plus en plus défiants vis-à-vis du sérail, mais la presse se montre, elle, parfois agacée par ses réponses sibyllines. « M. Johannesson n’est pas parvenu à orienter le débat vers le présent et l’avenir, peut-être en raison de sa formation d’historien », ironisait samedi le journal Frettabladid, proche du centre gauche.
Pour les Islandais, l’Euro de football, qui se déroule actuellement en France, a largement volé la vedette à l’élection, qui, il est vrai, vise à désigner un président au rôle avant tout protocolaire. M. Johanesson a indiqué que « la première chose » qu’il ferait s’il était élu était de se « rendre en France lundi pour voir l’Islande jouer contre l’Angleterre », en huitième de finale de l’Euro.
Le pays a d’ailleurs installé neuf bureaux de vote en France, pour les dizaines des milliers de fans qui ont fait le déplacement dans l’hexagone, dont un pour ses seuls footballeurs.
La situation économique rayonnante de l’Islande – le tourisme, florissant, dope les résultats de l’économie islandaise, offrant le plein-emploi et une hausse du pouvoir d’achat – n’incite pas non plus les Islandais à se passionner pour l’élection.
Une fin de campagne sous le signe du « Brexit »
Le « Brexit », la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne (UE), s’est invité à la dernière minute dans la fin de campagne. Comme la majorité des électeurs, le probable futur président est hostile à une adhésion de l’Islande à l’UE.
Le Brexit « change beaucoup de choses dans le bon sens pour les Islandais » qui peuvent envisager des alliances avec des Etats européens indépendants comme la Norvège et la Suisse, a réagi vendredi soir M. Johannesson.
En 2015, l’Islande avait retiré sa candidature, déposée en 2009, après des négociations peu fructueuses et le retour aux affaires du centre droit, eurosceptique.
Et pour le ministre des Finances et patron du parti de l’Indépendance, Bjarni Benediktsson, la sortie du Royaume-Uni de l’UE éloigne un peu plus la perspective d’un rapprochement entre Reykjavik et Bruxelles. Le Brexit « oblige l’Europe à repenser les termes de sa coopération », a-t-il relevé, cité par le quotidien Morgunbladid.
Plus de 245 000 électeurs sont appelés aux urnes. Les premières estimations sont attendues juste après la fermeture des derniers bureaux à 22 h 00 GMT (minuit à Paris).