Qui, où, pourquoi… la consultation sur Notre-Dame-des-Landes en 7 questions
Qui, où, pourquoi… la consultation sur Notre-Dame-des-Landes en 7 questions
Par Rémi Barroux
Les électeurs de Loire-Atlantique devront, dimanche, répondre à la question « Etes-vous favorable au projet de transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique sur la commune de Notre-Dame-des-Landes ? » Mode d’emploi de cette consultation inédite.
Notre Dame Des Landes le 22 juin 2016. Au cœur de la ZAD sur la D281 avec ses barrages et "checkpoints". | FRANCK TOMPS POUR "LE MONDE"
Les électeurs de Loire-Atlantique votent dimanche 26 juin sur le dossier de l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes en répondant par oui ou par non à la question « Etes-vous favorable au projet de transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique sur la commune de Notre-Dame-des-Landes ? » Mode d’emploi de cette consultation inédite.
Quelle consultation ? Pourquoi ?
En demandant, le 11 février, au gouvernement d’organiser avant octobre « un référendum local pour qu’on sache exactement ce que veut la population », François Hollande a cherché à débloquer un dossier vieux de plus de cinquante ans. Il mettait en pratique la réforme de la démocratie environnementale qu’il a appelée de ses vœux au lendemain de la mort du jeune militant écologiste Rémi Fraisse, en octobre 2014, lors d’une manifestation contre un projet de barrage, à Sivens (Tarn).
Mais organiser une consultation locale sur un sujet d’intérêt national n’était pas possible. Il a fallu modifier le code de l’environnement et la législation, au moyen de l’ordonnance du 21 avril « relative à la consultation locale sur des projets susceptibles d’avoir une incidence sur l’environnement ». De cette dernière, découlait la nécessité d’un décret décidant de ces consultations, « en indiquant l’objet, la date ainsi que le périmètre, qui définit la question posée et qui convoque les électeurs ». Le décret concernant le projet de Notre-Dame-des-Landes a été publié le 23 avril. Les opposants, locaux ou nationaux, ont déposé des recours contre l’ordonnance et le décret, qui ont été rejetés par le Conseil d’Etat, les 20 et 22 juin.
Quelle question ?
Au moyen d’un bulletin de vote portant la seule inscription « oui » ou « non », imprimées dans un cadre, en lettres capitales et à l’encre noire, les électeurs vont répondre à la question : « Etes-vous favorable au projet de transfert de l’aéroport de Nantes-Atlantique sur la commune de Notre-Dame-des-Landes ? »
Celle-ci a été contestée par les opposants devant le Conseil d’Etat, en vain. Selon eux, la question est floue, car elle ne préciserait pas quel scénario d’aéroport est soumis au vote des électeurs. Outre le projet initial, deux pistes à Notre-Dame-des-Landes, un autre scénario a été proposé par la ministre de l’environnement, plus réduit. Missionnés par Ségolène Royal en janvier, trois experts ont en effet jugé le projet retenu « surdimensionné », proposant alors une infrastructure aéroportuaire « redimensionnée à une seule piste ».
Pour Matignon, il n’y a pas ambiguïté, seul le projet ayant fait l’objet de l’étude d’utilité publique étant soumis à l’approbation des habitants de Loire-Atlantique. Une position confortée par la décision du Conseil d’Etat.
Les opposants considèrent aussi que la notion de « transfert » prête à confusion. Il n’est en effet pas question de fermer la piste de l’aéroport de Nantes-Atlantique en cas de construction à Notre-Dame-des-Landes. Le site actuel, sur la commune de Bouguenais, resterait ouvert, servant aux activités de l’industriel Airbus. Là encore, les juges du Conseil d’Etat ont estimé que « la sincérité du scrutin » n’était pas en cause, dès lors que « la piste de Nantes-Atlantique serait maintenue pour un usage strictement industriel d’Airbus avec deux ou trois vols par semaine en fonction des besoins logistiques ».
Qui vote, quand et où ?
Les 967 500 électeurs de Loire-Atlantique sont appelés à voter le dimanche 26 juin dans les 1 051 bureaux de vote du département. Ceux-ci seront ouverts de 8 heures à 18 heures, sauf à Rezé et Saint-Herblain, 19 heures, et Nantes, 20 heures.
Le gouvernement a choisi le département comme aire électorale, se fondant sur le périmètre de l’enquête d’utilité publique, qui a été ouverte, en octobre et novembre 2006, dans 21 des 212 communes de la Loire-Atlantique, ainsi qu’en préfecture à Nantes, et dans trois sous-préfectures (Ancenis, Châteaubriant, Saint-Nazaire).
Les opposants avancent, eux, que Nantes étant dans le même temps préfecture de région, il eut été tout aussi pertinent d’étendre le scrutin aux Pays-de-la-Loire. Par ailleurs, cette région, ainsi que la Bretagne, contribuant au financement du futur Aéroport du Grand Ouest, ces deux collectivités auraient pu être associées au vote sur son avenir. Des départements bretons ont aussi protesté d’être tenus à l’écart de la consultation.
Qui vote quoi ?
Le deux camps opposés dans la bataille de Notre-Dame-des-Landes sont hétéroclites. En réalité, trois positions se distinguent : les personnes favorables au futur aéroport voteront « oui » ; les opposants voteront « non ». Il y a aussi ceux qui, hostiles au projet d’aéroport, n’en souhaitent pas moins l’évacuation de la ZAD. Que voteront-ils ?
Pour le oui : la grande majorité des collectivités territoriales, la région des Pays-de-la-Loire emmenée par son président Bruno Retailleau (LR), le département présidé par Philippe Grosvalet (PS), la ville de Nantes et sa maire Johanna Roland (PS), et nombre de maires de petites communes ont milité activement pour le projet de transfert.
Pour les partis politiques, on trouve Les Républicains, le PS, le PCF 44 (mais les fédérations de la Sarthe et de la Vendée se sont prononcé contre), l’UDI 44 – dans le même temps, le député de la Meuse, Bertrand Pancher, responsable du « pôle écologie » à l’UDI, appelle à l’abandon de ce projet « irréaliste ». Les élus locaux de l’Union démocratique bretonne (UDB) sont aussi favorables au futur aéroport, même si la base du mouvement est engagée contre.
Les milieux économiques sont majoritairement en faveur du transfert, comme la Chambre de commerce et d’industrie (CCI), le Medef des Pays-de-la-Loire (celui de Vendée étant plus réservé). Enfin, du côté des associations, Des Ailes pour l’Ouest est le fer de lance de la campagne en faveur du oui.
Pour le non : le bilan est plus maigre s’agissant des collectivités territoriales. Le Collectif des élus doutant de la pertinence du projet d’aéroport (CéDpa) revendique un millier d’adhérents dont le maire de Notre-Dame-des-Landes, Jean-Paul Naud, hostile au futur aéroport mais en faveur de l’évacuation de la ZAD – celui de Vigneux-de-Bretagne, l’autre commune qui accueillera les infrastructures aéroportuaires, Joseph Bézier, est, lui, pour. La communauté de communes Erdre-Gesvres (douze communes), concernée par le projet, s’est à de multiples reprises prononcé contre.
Du côté des politiques, on retrouve Europe Ecologie-Les Verts, mais aussi le Parti de gauche, Ensemble, le Nouveau parti anticapitaliste (NPA), le Modem ou encore le Front national qui affiche son slogan « Ni aéroport ni ZAD ». Plusieurs groupes de chrétiens du diocèse de Nantes ont par ailleurs lancé un appel contre le projet d’aéroport.
Le mouvement syndical est majoritairement contre, avec la CGT, Solidaires, la FSU et, dans le monde rural, la Confédération paysanne, le collectif Copains 44. Jusqu’à la FDSEA qui s’est exprimée contre le projet mais ne souhaite pas manifester aux côtés de la « Conf’ » et des militants de la ZAD. Enfin, la totalité des associations de défense de l’environnement, les collectifs de naturalistes, au niveau national comme local, sont engagés dans la campagne du « non ».
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