La 5G, nouveau graal des opérateurs télécom américains
La 5G, nouveau graal des opérateurs télécom américains
LE MONDE ECONOMIE
AT&T promet une phase d’expérimentation grandeur nature à Austin, au Texas, d’ici à la fin de l’année.
Les Etats-Unis ne veulent pas se laisser distancer par le Japon et la Corée du Sud, « en pointe dans le domaine » de la 5G, selon un analyste du cabinet Ovum. | ED JONES / AFP
De la 5G dès cette année aux Etats-Unis ? Les grands opérateurs télécoms américains se sont lancés dans une course contre la montre. Chacun veut être le premier à déployer la nouvelle génération d’Internet sans fil, jusqu’à 100 fois plus rapide que la précédente mais qui n’est pourtant pas attendue avant 2020. AT&T, le numéro deux américain de la téléphonie mobile, promet ainsi une première phase d’expérimentation grandeur nature à Austin (Texas) à la fin de l’année. Et son grand rival Verizon fait miroiter une première offre commerciale l’année prochaine.
« La technologie fonctionne déjà dans nos laboratoires », assure John Donovan, responsable de la stratégie chez AT&T. Pour autant, ces premiers tests resteront très limités. Ils ne concerneront pas les smartphones mais seulement l’Internet fixe, c’est-à-dire dans un logement ou une entreprise. Les solutions pour fournir la 5G en mobilité doivent en effet encore être inventées. « Pour le moment, la 5G c’est avant tout du marketing », avance Walter Piecyk, analyste chez BTIG Research.
« Priorité nationale »
Il faut dire que les deux géants traversent une passe inédite. Jeudi 21 juillet, AT&T a fait état d’une quatrième baisse d’affilée de son chiffre d’affaires trimestriel dans le mobile. L’entreprise texane demeure très rentable, avec un bénéfice net de 3,4 milliards de dollars (3,1 milliards d’euros) au deuxième trimestre. Mais elle doit faire face à la concurrence acharnée menée par T-Mobile, le troisième acteur du marché. Le constat est similaire pour Verizon, qui publiera ses résultats mardi 26 juillet. La 5G pourrait représenter une bouffée d’oxygène, en leur permettant notamment de relever le prix de leurs forfaits.
Au-delà des effets d’annonce, le développement technologique suit son cours. Mi-juillet, il a franchi une étape importante devant la Federal Communications Commission (FCC). Le gendarme américain des télécoms a autorisé l’utilisation par les opérateurs d’ondes à très haute fréquence, clés de voûte des futurs réseaux 5G. « Les Etats-Unis sont le premier pays à le faire », se félicite Tom Wheeler, le président du régulateur.
A la suite de cette décision, la Maison Blanche a officialisé un programme de recherche d’un montant de 400 millions de dollars. Vingt entreprises y sont associées, dont les quatre principaux opérateurs mobiles américains, mais aussi Samsung, Intel, Qualcomm et Nokia, qui conçoivent des composants électroniques et des équipements de réseaux. L’administration américaine ne veut pas se laisser distancer par le Japon et la Corée du Sud, « en pointe dans le domaine, comme cela déjà avait été le cas pour la 4G », note Michael Roberts, analyste au sein du cabinet Ovum. « La 5G est sans aucun doute une priorité nationale », assure M. Wheeler.
Les premiers smartphones d’ici 2020
Plusieurs étapes restent à franchir. L’industrie va d’abord devoir définir les standards technologiques sur lesquels reposera la 5G, ce qui ne devrait pas avoir lieu avant 2018. Une fois les normes établies, il faudra ensuite concevoir les successeurs des antennes relais actuelles, qui ne pourront pas être utilisées car les ondes à très haute fréquence voyagent moins loin. Le déploiement de la 5G exigera donc de nombreuses antennes de petite taille, peut-être même dans les bâtiments.
Dans un premier temps, la 5G devrait être limitée à l’intérieur, où il est plus facile d’assurer une bonne couverture. Elle pourrait ainsi se substituer aux traditionnelles connexions par ADSL ou par câble, notamment aux Etats-Unis, où les abonnements Internet coûtent souvent cher pour des performances relativement faibles. Les premiers smartphones 5G ne devraient pas être disponibles avant 2020. Dans les deux cas, les opérateurs espèrent vendre davantage de data à leurs clients.
« Il semble qu’il n’y ait aucune limite à ce que la 5G pourra changer dans notre vie quotidienne », s’enthousiasme déjà Mignon Clyburn, commissaire à la FCC. Pour les consommateurs, l’Internet mobile de demain sera synonyme d’applications qui s’affichent plus vite, de vidéos en très haute définition ou encore d’appels en visioconférence sans aucune saccade. « Cela va aussi permettre des expériences de réalité virtuelle connectée sur les réseaux mobiles », ajoute M. Donovan.
Développer l’Internet des objets
Surtout, la 5G doit accompagner le développement de l’Internet des objets. « Les voitures sans conducteur, la robotique ou encore les villes intelligentes vont solliciter les réseaux mobiles comme jamais », poursuit le dirigeant d’AT&T. Or, « les réseaux actuels ne sont pas assez performants et fiables », estime M. Roberts. Leur temps de latence est par exemple beaucoup trop élevé pour permettre à des véhicules autonomes de communiquer entre eux. Ou à un chirurgien de commander un robot à distance pour effectuer une opération.
En outre, la 4G risque de rapidement saturer face à la prolifération attendue des objets connectés. Ils seront bientôt partout : dans les habitations, les entreprises, les magasins, les rues… Selon le cabinet Gartner, leur nombre devrait passer de 6,4 milliards en 2016 à 21 milliards en 2021. Il s’agit de l’autre promesse de la 5G : un monde toujours plus connecté.