Les grandes économies mondiales s’estiment prêtes à encaisser le Brexit
Les grandes économies mondiales s’estiment prêtes à encaisser le Brexit
Par Simon Leplâtre (Shanghaï, correpondance)
Pour limiter les effets sur la croissance mondiale de la sortie du Royaume-Uni de l’UE, le G20 invite à recourir à tous les outils possible (monétaires, fiscaux), alors que le FMI appelle les États qui le peuvent à investir dans les infrastructures.
La tempête arrive, mais nous sommes prêts, ont dit en substance les ministères des finances du G20, rassemblés samedi 23 et dimanche 24 juillet à Chengdu, dans l’ouest de la Chine. L’ultime réunion préparatoire avant la réunion du G20 à Hangzhou, début septembre, était aussi la première des ministres des finances du G20 depuis le vote des Britanniques en faveur de la sortie de l’Union européenne (UE). Une décision qui « renforce les incertitudes » pour l’économie mondiale, ont indiqué les membres de la réunion dans un communiqué final.
Concrètement, le Brexit pourrait avoir coûté un dixième de point de croissance à l’économie mondiale. Mardi 19 juillet le Fonds monétaire international (FMI) avait baissé ses prévisions de croissance mondiale de 0,1 point, pour cette année et l’année prochaine, à 3,1 % et 3,5 % respectivement.
La rencontre ayant pour but de faire face à la crise collectivement, les ministres ont tenté malgré tout de rassurer : les pays de l’UE « sont bien positionnés » pour contrer « de manière proactive » les éventuelles répercussions économiques et financières du Brexit, indique le communiqué.
« Beaucoup ont souligné combien l’économie mondiale et la finance ont plutôt bien résisté au choc du Brexit », a expliqué Michel Sapin, ministre français des finances, dans un entretien téléphonique à l’issue de la rencontre. « La coordination entre les banques centrales du G20 est certainement un élément qui a réduit considérablement les effets de ce Brexit. Reste maintenant à organiser la coopération pour en limiter les effets à moyen et à long terme », a souligné le ministre, qui rappelle que le G20 a été créé pour répondre à la crise de 2008.
Plan de relance
Votée par les Britanniques, la sortie de leur pays de l’Union européenne n’aura pas lieu avant la fin de l’année, a indiqué la nouvelle première ministre, Theresa May, jeudi 21 juillet. Mais ses effets se font déjà sentir : l’activité du pays s’est effondrée en juillet, selon une étude.
Aux abois, le Royaume-Uni n’exclut pas un plan de relance. « Nous avons l’option d’une réponse budgétaire, ce que nous ferons selon notre propre calendrier, autour de notre discours d’automne » (le budget rectificatif présenté par le gouvernement), a expliqué dimanche Philip Hammond, chancelier de l’échiquier.
D’après le ministre des finances français, qui s’est entretenu plusieurs fois avec son homologue britannique, le Royaume-Uni est loin d’avoir un plan : « (M. Hammond) m’a dit : nous n’étions absolument pas préparés à cet événement. Nous découvrons les conséquences, les problèmes techniques que cela pose, et les types de négociations qu’il faut mener. »
Le FMI a lui aussi insisté sur la nécessité d’une augmentation des investissements publics pour soutenir la croissance. Alors que le G20 invite à recourir à tous les outils possible (monétaire, fiscaux et structurels), le FMI appelle les États qui le peuvent à investir dans leurs infrastructures, « pour doper directement la demande ». Le Fonds cite les États-Unis, le Canada, l’Australie, et l’Allemagne.
Taxe sur les transactions financières
L’évocation de l’Allemagne par le FMI n’a pas dû plaire à Wolfgang Schäuble, le ministre des finances du pays, ardent défenseur de l’orthodoxie financière, mais la question n’est pas nouvelle. En février, le ministre allemand avait répondu que les relances budgétaires avaient « perdu leur efficacité ». Si sa position officielle n’a pas évolué, d’après M. Sapin, dans les faits, les choses changent. « La dépense publique augmente en Allemagne en ce moment, ne serait-ce que compte tenu des dépenses en faveur de l’accueil des réfugiés. »
Le ministre allemand a par ailleurs fait la promotion d’une taxe mondiale sur les transactions financières. Dans le cadre de la lutte contre l’érosion des bases fiscales, l’un des axes de travail du G20, M. Schäuble a essayé de faire passer cette idée, souvent évoquée, mais jamais adoptée. « Tout le monde s’accorde à dire qu’il faudrait le faire au niveau mondial, mais personne n’a essayé », a-t-il lancé.
Son homologue américain, Jacob Lew, a quant à lui appelé à mettre un terme aux « lacunes » des régimes fiscaux, qui permettent aux multinationales d’échapper aux impôts dans leurs pays d’origine. Sur le sujet, M. Sapin souligne que le principe d’une liste de territoires non coopératifs a été accepté par les membres du G20. Elle devrait être établie d’ici à juillet 2017, d’après le communiqué final du G20.