Manuel Valls : « Etre lucide face à la menace, ce n’est pas basculer dans le populisme »
Manuel Valls : « Etre lucide face à la menace, ce n’est pas basculer dans le populisme »
Par Julia Pascual, Nicolas Chapuis
Dans un entretien au « Monde », le premier ministre assure que « la France a une stratégie pour gagner cette guerre » contre l’organisation Etat islamique. Il estime que Nicolas Sarkozy « perd ses nerfs », et propose « une nouvelle relation avec l’islam de France ».
Manuel Valls, Premier ministre, répond à une interview du Monde dans son bureau à l'hôtel de Matignon, à Paris, jeudi 28 juillet. | JEAN-CLAUDE COUTAUSSE / FRENCH-POLITICS POUR LE MONDE
Dans un entretien au Monde, vendredi 29 juillet, Manuel Valls répond aux attaques de l’opposition après les attentats de Nice et de Saint-Etienne-du-Rouvray (Seine-Maritime), estimant qu’il y a « une ligne infranchissable : l’Etat de droit ». « Mon gouvernement ne sera pas celui qui créera des Guantanamo à la française », assène le premier ministre.
« Cette guerre, qui ne concerne pas que la France, va être longue et nous allons connaître d’autres attentats. Mais nous allons la remporter. Car la France a une stratégie pour gagner cette guerre », assure M. Valls. « Nous devons, d’abord, écraser cet ennemi à l’extérieur », explique-t-il.
Le président du parti Les Républicains (LR), Nicolas Sarkozy, a proposé, mercredi, dans un entretien au Monde, une série de mesures, appelant à sortir du « cadre » juridique actuel et estimant que face à la « barbarie », « la gauche est tétanisée ». Jeudi, dans Le Figaro, c’est son numéro chez Les Républicains, le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes Laurent Wauquiez, qui a demandé la démission du premier ministre et du ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve.
« Nicolas Sarkozy perd ses nerfs »
Pour M. Valls, « être lucide face à la menace, ce n’est pas basculer dans le populisme » et « sur la sécurité, la gauche n’a pas de leçons à recevoir ». Face aux propositions venues des Républicains, il exhorte les Français à « rejeter les solutions démagogiques qui font croire que nous pouvons en terminer [avec la menace terroriste] en quelques mois ». Pas question, donc, d’enfermer de simples suspects dans des camps :
« Tout ce qui renforce notre efficacité mérite d’être retenu, mais il y a une ligne infranchissable : l’Etat de droit. A ce titre, l’enfermement d’individus dans des centres sur la base du seul soupçon est moralement et juridiquement inacceptable. »
« Nicolas Sarkozy perd ses nerfs », juge le premier ministre.
« Il faut engager une véritable révolution dans notre culture de sécurité »
« Cependant, nous avons changé d’époque. Nous devons changer nos comportements. C’est une véritable révolution dans notre culture de sécurité qu’il faut engager », ajoute le chef du gouvernement. Pour lui, il faut notamment s’interroger, avant « chaque événement » pour savoir s’il est « indispensable » et s’il mérite le déploiement de mesures de sécurité nécessaires à sa tenue.
« Nous devons bâtir un puissant contre-discours »
Le premier ministre estime que « la lutte contre la radicalisation sera l’affaire d’une génération », et qu’elle doit mêler « prévention » et « programmes de déradicalisation ». « Nous devons enfin bâtir un puissant contre-discours qui ne doit pas être que le travail de l’Etat, mais de toute la société civile », ajoute-il.
« Inventer une nouvelle relation avec l’islam de France »
Sans parler de « concordat », M. Valls estime qu’il « faut une remise à plat et inventer une nouvelle relation avec l’islam de France ». Le premier ministre envisage d’interdire le financement des mosquées par l’étranger « pour une période à déterminer ».