Des associations dénoncent « l’oubli » des victimes juives dans une tribune de Français musulmans
Des associations dénoncent « l’oubli » des victimes juives dans une tribune de Français musulmans
Le Monde.fr avec AFP
Le CRIF « note avec inquiétude » cet « oubli lourd de sens » des victimes de Mohamed Merah à Toulouse et d’Amedy Coulibaly à l’Hyper Cacher à Paris.
Des associations et personnalités juives condamnent lundi 1er août l’oubli des victimes juives des récents attentats dans une tribune publiée la veille dans Le Journal du dimanche, signée par une quarantaine de personnalités « françaises et musulmanes ».
Dans cet appel intitulé « Nous, Français et musulmans, sommes prêts à assumer nos responsabilités », une quarantaine de personnalités – dont le philosophe Abdennour Bidar, l’essayiste Hakim El Karoui et la sénatrice PS Bariza Khiari – se disent « concerné[e]s par l’impuissance de l’organisation actuelle de l’islam de France, qui n’a aucune prise sur les événements ».
La « mémoire sélective » dénoncée
Le texte débute par une énumération de plusieurs récentes attaques djihadistes en France : « Après l’assassinat de caricaturistes, après l’assassinat de jeunes écoutant de la musique, après l’assassinat d’un couple de policiers, après l’assassinat d’enfants, de femmes et d’hommes assistant à la célébration de la fête nationale, aujourd’hui l’assassinat d’un prêtre célébrant la messe... ». Il n’évoque pas les victimes de Mohamed Merah à Toulouse et à Montauban en 2012, ni celles d’Amedy Coulibaly à l’Hyper Cacher en janvier 2015 à Paris.
Dans un communiqué, le Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF) « note avec inquiétude » cet « oubli lourd de sens », qui constitue selon lui « un affront à la mémoire des huit victimes de ces deux attentats, qui ont été ciblées par le terrorisme parce que juifs ».
Fustigeant la « mémoire sélective » des signataires de la tribune, le CRIF estime que cela « empêche surtout de comprendre toutes les dimensions du terrorisme islamiste auxquelles la France est aujourd’hui confrontée » et demande à ses auteurs d’« apporter la clarification nécessaire sous peine d’entacher l’utilité de leur démarche ».
L’Union des étudiants juifs de France (UEJF) « s’alarme de l’effacement du problème de l’antisémitisme » dans l’appel. « Si je ne doute pas des bonnes intentions des auteurs de cet appel, je ne m’explique pas leur indifférence face à l’antisémitisme, qui est pourtant une composante essentielle de l’islamisme radical », écrit le président de l’UEJF, Sacha Reingewirtz, dans un communiqué.
« Faux procès »
Interrogé lundi matin sur Europe 1, Amine Benyamina, l’un des signataires, s’est défendu devant ce « faux procès »: « Ça a été l’effet Charlie mais ça n’a pas été précisé (...), ils [les auteurs de la tribune] ne sont absolument pas attaquables, ils sont au-dessus de tout soupçon de choix des victimes. »
« Nous, Français et musulmans tenons à dire avec la plus grande clarté que nous ne faisons aucune différence entre les victimes du terrorisme aveugle qui frappe notre nation depuis de nombreux mois », a expliqué pour sa part Bariza Khiari sur son mur Facebook.
« Que l’’oubli ait été conscient ou non, l’absence de mention des drames de Toulouse et de l’Hyper Cacher (...) est grave et douloureux », a estimé le grand rabbin de France, Haïm Korsia. « J’ai appelé dès hier [dimanche] plusieurs des signataires pour leur faire part de la blessure qui fut la mienne et celle de la communauté juive à la lecture de ce texte », a-t-il ajouté, avant de « saluer les réactions individuelles de certains signataires qui ont tenu à clarifier leurs propos, en particulier la sénatrice Bariza Khiari ».