Une base de données pour percer les secrets de l’industrie de la surveillance
Une base de données pour percer les secrets de l’industrie de la surveillance
Par Florent Bascoul
Des organisations non gouvernementales ont créé une base de données répertoriant près de 520 sociétés spécialisées dans la surveillance, leurs activités et clients.
Privacy International et Transparency Toolkit, des organisations de défense des droits de l’homme et de lutte contre les dispositifs de pistage des individus, viennent de lancer une base de données recensant un maximum d’informations précises sur 520 sociétés du secteur de la surveillance.
Ce Surveillance Industry Index (SII) permet de trouver les services et technologies proposés par les entreprises et, dans certains cas, leurs clients (entreprises et Etats). Si une partie de ces précieux documents sont le fruit d’enquêtes approfondies, 40 % des données émanent de documents accessibles au public tels que communiqués de presse et supports publicitaires.
Au sein des entreprises indexées, 45 possèdent leur siège en France, ce qui en fait le troisième pays le plus représenté dans la base de données. Privacy International a précisé que seulement trois pays ont communiqué des données sur l’exportation d’équipements de surveillance, la Finlande, le Royaume-Uni et la Suisse, déplorant qu’« un nombre trop limité de données gouvernementales avaient pu être récoltées ».
Un manque de transparence pénalisant
La base démontre le succès de certaines technologies proposées par ces entreprises comme les systèmes d’interception cellulaire (121 commandes contre quelques dizaines pour les autres équipements). Ils reçoivent les signaux émis par les téléphones lors des appels ainsi que lors de l’envoi de messages. C’est pour lutter contre l’existence de ce type d’outil qu’Edward Snowden travaille à la réalisation d’une coque de smartphone anti-surveillance. Autres instruments plébiscités, les DPI, ou systèmes d’inspection profonde des paquets de données (une centaine de commandes). Ils permettent de capter voire de filtrer le trafic sur le réseau. Un dispositif que des entreprises françaises ont été accusées d’avoir fourni à Mouammar Kadhafi et à Bachar Al-Assad pour espionner leurs peuples.
Cette base de données pourra être utile à la fois pour les activistes et les journalistes qui peuvent être victimes de ces systèmes dans des Etats déterminés à les surveiller. Il s’agit également d’un outil déterminant pour lever le voile dans un secteur où la culture du secret est prégnante. Interrogé par le site The Verge, Edin Omanovic, chercheur à Privacy International, appelle à une prise de conscience de la société civile et de ses représentants politiques :
« La surveillance d’Etat est l’enjeu le plus important et clivant de notre temps mais son aspect confidentiel prive tout débat d’éléments factuels. Comprendre le rôle de cette industrie de la surveillance et la façon dont le commerce de ces technologies s’effectue est déterminant pour ouvrir le débat et encourager la mise en place de législations protectrices. »