La métropole Aix-Marseille-Provence sort de ses embûches judiciaires
La métropole Aix-Marseille-Provence sort de ses embûches judiciaires
Par Gilles Rof
Le Conseil constitutionnel a estimé vendredi qu’il n’y a pas de déséquilibre entre le nombre de sièges attribués aux élus marseillais et ceux accordés aux autres villes moyennes.
Jean-Claude Gaudin, maire de Marseille, à Nice, le 22 avril 2015. | JEAN CHRISTOPHE MAGNENET / AFP
Le feuilleton judiciaire qui paralysait la métropole Aix-Marseille-Provence depuis sa création, le 1er janvier, a pris fin. Le Conseil constitutionnel a rejeté, vendredi 19 février, les questions prioritaires de constitutionnalité (QPC) posées par les communes d’Eguilles (Bouches-du-Rhône) et de Pertuis (Vaucluse). Ces deux agglomérations moyennes du pays d’Aix-en-Provence symbolisent l’important front d’opposition à la naissance de la métropole. Elles contestaient la répartition entre les communes des 240 sièges de l’assemblée métropolitaine, qui, selon elles, donnent trop d’importance à Marseille par rapport aux villes moyennes. Jean-Claude Gaudin, sénateur et maire de Marseille (Les Républicains), en sort conforté dans sa fonction de président de cette nouvelle collectivité,même si sa principale opposante, la maire (LR) d’Aix-en-Provence lui promet encore «une guerre totale» dans les prochaines semaines.
La répartition des élus à la métropole Aix-Marseille-Provence est une disposition spécifique de la loi NOTRe, qui découle d’un amendement (4° alinéa bis du paragraphe IV de l’article L. 211-6-1) déposé notamment par le maire de Marseille. Le Conseil constitutionnel a décidé que cet « amendement Gaudin » ne « méconnaît pas le principe d’égalité des populations devant le suffrage ». Celui-ci estime même que cette disposition « réduit les écarts de représentation entre les communes les plus peuplées et les autres », reprenant l’argumentaire du représentant du gouvernement lors de l’audience du 11 février. Autrement dit, les 108 sièges attribués à Marseille donnent son juste poids politique à une ville qui représente 44 % de la population de cette métropole de 92 communes et 1,8 millions d’habitants.
Le premier ministre s’est félicité de voir le conseil constitutionnel conforter la position du gouvernement. « Toutes les métropoles créées par la loi MAPTAM [modernisation de l’action publique territoriale et d’affirmation des métropoles] sont désormais actives », a souligné M. Valls.
Les élus marseillais, tous bords confondus, ont salué la décision du Conseil constitutionnel et appelé, à l’image de Jean-Claude Gaudin, « à la mise en place, dans les meilleurs délais, des organes, des dispositifs et des délégations de gouvernance de la métropole pour tourner la page des contestations juridictionnelles ». « Maintenant, mettons-nous au travail », a lancé l’ancienne ministre déléguée aux personnes handicapées, Marie-Arlette Carlotti, conseillère municipale PS. A droite, le président départemental de la fédération LR, le sénateur Bruno Gilles, a également affiché son soulagement de voir le Conseil constitutionnel trancher un conflit qui a tourné au psychodrame interne chez Les Républicains.
« Pillage »
Du côté des opposants, le rejet des QPC a eu l’effet d’un coup de massue. « J’étais convaincue d’une décision inverse et je n’étais pas la seule », note la sénatrice (LR) et vice-présidente de la région PACA, l’Aixoise Sophie Joissains. Opposante viscérale à ce qu’elle voit comme « un pillage par Marseille des villes environnantes », la maire d’Aix-en-Provence, Maryse Joissains-Masini, a tenu une conférence de presse échevelée, appelant son conseil municipal à « refuser d’entrer dans la métropole ». « Je demande au gouvernement d’organiser un référendum comme pour l’aéroport de Notre-Dame-des-Landes », a insisté Mme Joissains-Masini, qui, sans rire, évoque la possibilité d’une « saisine de la Cour européenne des droits de l’homme ».
Son jusqu’au-boutisme n’est pas partagé par tous les élus concernés. « Je prends acte de la décision », assure ainsi le maire (LR) de Cabriès, Hervé Fabre-Aubrespy. Pour cet énarque et conseiller d’état, l’avenir des petites communes passe plutôt par une action au sein même de l’assemblée métropolitaine. « Pourquoi ne pas créer un groupe des maires pour faire entendre notre voix ? », imagine-t-il.
« Apaisement »
Jean-Claude Gaudin, lui, va vouloir désormais accélérer les choses. D’autant que plane toujours sur lui l’annulation de son élection prononcée le 7 janvier par le tribunal administratif de Marseille et pour laquelle il a fait appel devant le Conseil d’Etat. En décembre 2015, le sénateur a confié à l’un de ses très proches, le directeur général des services de la ville de Marseille, Jean-Claude Gondard, une mission de préfiguration de la métropole. Ce travail préparatoire va désormais se transformer en installation concrète de cette structure administrative qui doit piloter l’action de 7 500 fonctionnaires.
Sur le plan politique, plusieurs rendez-vous se tiendront d’ici à fin avril. Les 240 membres de l’assemblée métropolitaine se réuniront prochainement pour élire les vice-présidents et membres du bureau exécutif de la métropole. Un vote suivi par l’installation des conseils de territoire, ces six entités qui reprennent les limites des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Le maire de Marseille en profitera-t-il pour régler quelques comptes politiques avec ceux qui ont tenté de faire échouer « sa » métropole ? « L’heure est plutôt à l’apaisement », juge son entourage.