A Ankara, en mars 2013, une affiche rend hommage au président turc, après que le premier ministre israélien s’est excusé pour l’attaque d’une flotille d’aide à Gaza dans laquelle dix Turcs sont morts en 2010. | ADEM ALTAN / AFP

Après six ans de brouille diplomatique entre les deux anciens alliés régionaux, le Parlement turc a ratifié un accord de normalisation des relations diplomatiques avec Israël, a annoncé samedi 20 août l’agence de presse progouvernementale Anatolie. En vertu de cet accord de réconciliation, conclu à la fin de juin entre les deux pays et approuvé tard vendredi par les députés, Israël versera 20 millions de dollars (près de 18 millions d’euros) d’indemnités à la Turquie.

En juin, le premier ministre israélien, Benyamin Nétanyahou, s’était réjoui des « immenses implications » de cet accord, surtout économiques :

« Le Moyen-Orient est dans la tourmente. Ma politique consiste à créer des îlots de stabilité avec nos voisins proches. »

Le dépôt de ce texte au Parlement avait été retardé par le coup d’Etat avorté du 15 juillet, qui a momentanément ébranlé le pouvoir du président Recep Tayyip Erdogan.

  • Poursuites abandonnées

La Turquie, de son côté, abandonne les poursuites contre les ex-chefs de l’armée israélienne pour leur implication dans l’assaut d’un navire qui avait coûté la vie à dix militants turcs, en 2010 au large de Gaza. En 2014, une cour criminelle d’Istanbul avait ordonné l’arrestation de quatre anciens responsables militaires israéliens, dont l’ex-chef d’état-major, le général Gabi Ashkenazi, jugés depuis 2012 par contumace en Turquie.

Les relations diplomatiques israélo-turques, qui avaient commencé à se dégrader au cours des années 2000, étaient tombées au plus bas après cet assaut de commandos israéliens contre le Mavi Marmara, un navire affrété par une ONG humanitaire turque pour tenter de briser le blocus imposé par Israël à la bande de Gaza.

  • Aide humanitaire autorisée

Par contre, Israël n’a pas convaincu Ankara de cesser ses contacts avec des représentants de la branche politique du Hamas, allié du gouvernement islamo-conservateur turc, mouvement islamiste qui gouverne la bande de Gaza depuis 2007.

Dans le cadre de l’accord de normalisation, l’Etat hébreu a toutefois accepté que les Turcs acheminent de l’aide humanitaire aux Gazaouis.

  • Des ambassadeurs nommés

Récemment, le ministre des affaires étrangères turc, Mevlüt Cavusoglu, avait annoncé que la ratification de l’accord par le Parlement turc serait immédiatement suivie d’un échange d’ambassadeurs.

  • Répercussions économiques

La réconciliation entre les deux pays, qui étaient auparavant de proches alliés, a d’importantes implications économiques. L’exploitation de gisements de gaz naturel en Méditerranée orientale, au potentiel faramineux selon les Israéliens, mais encore virtuelle, nécessite leur coopération. Ankara veut diversifier ses sources d’approvisionnement pour ne pas trop dépendre de la Russie, alors qu’Israël perçoit la Turquie à la fois comme un client à venir et une porte vers l’Europe. Pour cela, il faudra construire un gazoduc de plus de 500 km, au coût considérable, chantier qui prendra plusieurs années.

  • Enjeux régionaux

La réconciliation entre la Turquie et Israël, deux alliés des Etats-Unis, a un ressort régional. Les deux pays partagent une même défiance envers les ambitions iraniennes au Moyen-Orient, vues comme hégémoniques.