Muriel Robin, « remarquable de vérité »
Muriel Robin, « remarquable de vérité »
Par Sandrine Blanchard
C’est ainsi que Michel Bouquet, son professeur, qualifiait la provinciale complexée devenue humoriste populaire (dimanche 18 septembre à 22 h 55 sur France 2).
UN JOUR UN DESTIN : Muriel Robin, en quête de sens : extrait documentaire
Durée : 01:00
C’est ainsi que Michel Bouquet, son professeur, qualifiait la provinciale complexée devenue humoriste populaire.
En 1977, Muriel Robin décrochait la première place au concours d’entrée du Conservatoire national supérieur d’art dramatique de Paris. Tout au long de ses trois années d’études, l’un de ses renommés professeurs, Michel Bouquet, l’a trouvée « remarquable de vérité ». Pourtant, Muriel Robin ne fera jamais partie ni de la « nomenklatura » du théâtre ni de celle du cinéma. « Il y avait clairement une forme de terrorisme intellectuel », résume la comédienne Isabelle Guiard, qui fut élève en même temps qu’elle dans cette école tant convoitée.
Laurent Delahousse et Muriel Robin sur le plateau de l’émission « Un jour, un destin ». | GILLES GUSTINE
Sur les deux longues heures de portrait que consacre France 2 à l’une des humoristes françaises les plus populaires, le chapitre consacré à « l’élève à part » qu’était Muriel Robin apparaît le plus révélateur du parcours de cette femme blessée. Il est à la fois touchant de voir Muriel Robin l’étudiante interpréter avec brio un extrait du Malade imaginaire, de Molière, ou du Requiem pour une nonne, de William Faulkner, et déconcertant d’entendre l’acteur et metteur en scène Christian Benedetti raconter : « Elle jouait comme Jacqueline Maillan. Pour nous, c’était la représentante du théâtre de boulevard ; à la limite, on se demandait ce qu’elle faisait là. »
Mal considérée
Regardée de haut par les autres élèves, Muriel Robin, la provinciale complexée, restera pendant toute sa carrière mal considérée par le milieu culturel parisien. Malgré ses sept nominations aux Molières pour ses one-woman-shows, elle ne remportera jamais la statuette. « Les intellos de gauche préféraient Valérie Lemercier, tellement plus chic », pointe Fabienne Pascaud, directrice de la rédaction de Télérama. Et elle a beau, en 2007, obtenir aux Etats-Unis l’Emmy Award de la meilleure performance d’actrice pour son rôle-titre dans le téléfilm aux onze millions de téléspectateurs Marie Besnard l’empoisonneuse, « en France, tout le monde s’en fout », constate la comédienne. A peine douze scénarios lui seront proposés en vingt-cinq ans de carrière.
La formule « l’humour est la politesse du désespoir » sied parfaitement à cette artiste marquée par une mère autoritaire qui ne comprenait pas ses rêves et ne la félicitait jamais. C’est seulement en 1990, quand elle découvrira le nom de sa fille sur la façade de l’Olympia, qu’Aimée Robin pleurera de joie. Amis, sœurs, entourage professionnel, tous témoignent du mal-être de cette comédienne qui n’a jamais voulu être seulement une humoriste.
Dans ce documentaire très « psychologisant », qui ne s’attarde pas suffisamment sur le travail artistique de cette « bête de scène », on regrette de ne pas entendre le témoignage de Pierre Palmade. C’est lui qui, en 1988, après le succès de Muriel Robin dans l’émission « Le Petit Théâtre de Bouvard », la convaincra de monter seule sur les planches, et c’est avec lui qu’elle écrira certains sketchs cultes (comme « Le Noir ») qui ont fait son succès.
« Tiens bon », lui avait dit Michel Bouquet. La petite Stéphanoise qui ne voulait pas vendre des chaussures comme ses parents et qui avait pour idole Liza Minnelli a fini par vaincre ses nombreux tourments – « pas de bisous, pas de cadeaux, mes kilos, pas d’enfants, dépressions, burn out, tabac, alcool » –, et a livré, en 2013, le plus personnel et le plus réussi de ses spectacles.
Un jour, un destin : Muriel Robin, en quête de sens, de Fanny Guiard-Norel (Fr., 2016, 120 min). Le dimanche 18 septembre à 22 h 55 sur France 2.