« Les niveaux de taux d’intérêt demeurent très près des plus bas historiques. Ce qui signifie qu’ils n’anticipent pas une résurgence de l’inflation » (Photo: Wall Street, à New York). | Mark Lennihan / AP

Les marchés actions ont généreusement rebondi depuis les points bas de février et, si le vote des Britanniques en faveur du « Brexit » le 23 juin a temporairement généré une forte volatilité, il n’a pas entamé longtemps cette tendance positive.

Les investisseurs se sont rassurés principalement pour deux raisons. D’une part l’épouvantail chinois, qui avait généré beaucoup d’inquiétudes l’an passé, a perdu de son caractère effrayant. Un contrôle des changes efficace a eu raison des sorties de capitaux qui mettaient beaucoup de pressions sur les réserves de change chinoises.

Dans le même temps, le recours à la vieille recette du crédit bancaire a permis de stopper la chute de l’activité industrielle. La menace est atténuée, même si elle n’a pas disparu.

D’autre part, au sein d’une tendance générale de croissance toujours médiocre, des indicateurs cycliques de court terme se sont améliorés aux Etats-Unis. C’est pourquoi ce sont principalement les valeurs des secteurs des matériaux, de l’énergie, de l’industrie qui ont tiré les marchés depuis février.

Fin du choc déflationniste

S’ajoute à ce retour à meilleure fortune la menace du départ effectif du Royaume-Uni de l’Union européenne, fût-il encore éloigné et aux contours incertains, qui garantit a priori que les banques centrales resteront accommodantes pour en juguler les éventuels effets nocifs sur l’activité économique. La Réserve fédérale américaine (Fed) n’a ainsi toujours pas osé agir en 2016.

Cette conjonction d’une amélioration sur le plan économique et un maintien de la confiance dans le soutien des banques centrales a un effet dopant sur les marchés. Quels facteurs pourraient la remettre en cause ?

La réponse n’est pas très difficile à trouver. Les marchés obligataires, comme d’actions, pourraient même tous deux se retourner avant la fin de l’année si deux choses, également plausibles et compatibles, se produisaient.

D’abord, il faut bien prendre conscience de ce que le choc déflationniste qu’avait été l’effondrement des cours du pétrole est terminé. Mécaniquement, le rythme d’inflation va accélérer. De plus, aux Etats-Unis s’ajoutent la hausse des loyers, aujourd’hui le premier contributeur à l’inflation.

Menaces sur la croissance

Or, les marchés obligataires ignorent entièrement cette réalité. Les niveaux de taux d’intérêt demeurent très près des plus bas historiques. Ce qui signifie qu’ils n’anticipent pas une résurgence de l’inflation. Les taux courts reflètent une politique monétaire inchangée pendant encore des mois, et les taux longs reflètent une inflation très faible à l’infini.

Ensuite, au plan économique, les indicateurs économiques avancés, sur lesquels se calent les marchés, sont en train de se retourner. Notons aussi que la croissance économique américaine ne tient plus qu’à un fil : celui de la consommation des ménages. Or, celle-ci est très vulnérable.

Menaces sur la croissance et menaces sur l’inflation, voilà un mariage qui serait beaucoup moins brillant que celui célébré depuis février. Il constituerait un casse-tête pour les banquiers centraux, et donc pour les marchés. A surveiller donc.