Election américaine : la bataille Clinton-Trump se joue aussi dans quelques comtés
Election américaine : la bataille Clinton-Trump se joue aussi dans quelques comtés
Par Pierre Bouvier
Une poignée des 3 141 comtés américains pourrait décider de l’élection du 8 novembre en faisant basculer certains « swing states ».
Hillary Clinton lors d’une messe, à Charlotte, en Caroline du Nord, le 2 octobre. | BRENDAN SMIALOWSKI / AFP
Donald Trump et Hillary Clinton parcourent les swing states. C’est dans cette douzaine d’Etats que se déroule l’essentiel de la campagne. Mais certains médias américains estiment que la campagne ne se joue pas tant dans ces swing states que dans une poignée de comtés décisifs, appelés « battleground counties ».
Parmi les 3 141 comtés américains, tous n’ont pas une importance égale. Le site Politico estime à vingt-cinq le nombre de ces comtés clés, capables de faire basculer un Etat.
Le magazine Governing en compte cinquante, tandis qu’Axiom Strategies, entreprise de conseil en stratégie politique fondée par le républicain Jeff Roe, s’intéresse à une série de dix comtés stratégiques qui, « historiquement, reflètent les résultats nationaux ».
Trois comtés clés en Caroline du Nord
Le magazine Facing South estime que toute l’élection de 2016 se jouera à pile ou face en Caroline du Nord. Dans cet Etat, environ 40 % de l’électorat est enregistré comme démocrate, 30 % comme républicain et 30 % comme non affilié.
Le comté de Wake (ville de Raleigh et une partie du Research Triangle, équivalent sur la Côte est de la Silicon Valley) est le reflet de cet éparpillement de l’électorat. Il compte 676 093 électeurs (258 050 démocrates, 228 638 indépendants, 185 694 républicains et 3 711 libertariens), soit davantage que les autres comtés du « Tar Heel State ».
Longtemps républicain, ce comté urbain a vu sa population se diversifier et Barack Obama y a remporté l’élection de 2012 avec onze points d’avance. Lors des primaires de 2016, les électeurs ont voté pour Hillary Clinton (53,4 %) et Ted Cruz (40,4 %), le discours de Donald Trump (29,3 %) n’ayant pas rencontré d’écho.
Au sud-ouest, le comté de Mecklembourg (la ville de Charlotte, avec 672 136 électeurs dont 301 075 démocrates, 167 873 républicains, 3 201 libertariens et 199 978 indépendants), présente une opportunité pour Hillary Clinton si elle parvient à mobiliser les électeurs démocrates et peut miser sur la désaffection pour Donald Trump, estime Governing.
A l’opposé, avec seulement 43 443 électeurs inscrits (11 852 démocrates, 13 751 républicains, 403 libertariens, 17 437 indépendants), le comté de Watauga dans l’ouest de l’Etat est fluctuant pour les deux candidats : rural et urbain (avec l’université de Appalachian State), touristique (Blowing Rock), mélangeant les générations, il est l’un des quatre comtés de Caroline du Nord qui a plus d’électeurs non inscrits que d’électeurs républicains ou démocrates.
Lors des primaires, il a voté Cruz (37,2 %) et Sanders (68,5 %). En 2012, il a voté Romney (50,1 %) alors qu’il avait voté Obama en 2008 (50,67 %).
Hillsborough, le baromètre de la Floride
En Floride, le comté d’Hillsborough est le point de départ (ou d’arrivée) de l’Interstate 4 qui relie Tampa et Orlando. Il sera l’un des plus significatifs en novembre : à part la notable exception de 1992, depuis 1928, ce comté vote toujours pour le candidat qui remporte l’élection, écrit Governing.
Le comté fait figure de baromètre de la Floride, ajoute Politico : depuis 1960, aucun candidat n’a remporté la Floride sans gagner ce comté. Hillsborough a voté pour George W. Bush en 2000 (50,17 %) et 2004 (52,81 %) avant de virer « à gauche » et de voter pour Barack Obama en 2008 (53,05 %) et 2012 (52,71 %). Lors des primaires, il a voté Trump (40,8 %) et Clinton (62,8 %).
Le comté qui comprend la ville de Tampa est composé à 53,7 % de Blancs, à 24,9 % d’Hispaniques et de Latinos, à 15,6 % d’Afro-Américains et 3,4 % d’Asiatiques. Au 31 août, le bureau des élections indiquait que le comté totalisait 262 198 électeurs inscrits comme républicains, 324 345 comme démocrates, 23 050 comme libertariens et 211 946 électeurs sans affiliation.
Les bastions industriels et miniers de l’Ohio
La campagne populiste de Donald Trump rencontre un écho favorable dans des bastions industriels et miniers historiquement démocrates de l’Ohio, situés à la limite de la Pennsylvanie : les comtés de Mahoning (ville de Youngstown), le comté de Stark (ville de Canton) et Trumbull (ville de Warren).
Donald Trump en campagne dans l’Ohio, le 14 septembre 2016. | JEFF SWENSEN / AFP
Mais les gains que le candidat républicain peut espérer réaliser dans ces comtés pourraient être contrebalancés par les défections dans certains comtés républicains. Ainsi, le comté de Delaware, dans la banlieue de Colombus, vote pour le GOP depuis les années 1920. En 2012, Romney l’a remporté haut la main (69 %). Mais lors des primaires républicaines, c’est le comté dans lequel Donald Trump a enregistré le plus mauvais résultat face à John Kasich (63,9 % pour le gouverneur de l’Ohio, 21,6 % pour Donald Trump).
A l’opposé, le 15 mars, lors de la primaire républicaine de l’Ohio, le comté de Trumbull, qui a le même nombre d’électeurs (environ 100 000), a voté massivement Donald Trump (52,6 %) face à John Kasich (34,1 %).
Pour sa part, Hillary Clinton peut difficilement tout miser sur le comté d’Athens (dans lequel est située l’université de l’Ohio). En 2012, Barack Obama y a remporté l’élection (66,1 % face à Mitt Romney avec 31,1 %), mais la candidate démocrate y a perdu la primaire (38,2 % face à Bernie Sanders, qui a enregistré 61,2 % des votes). Elle court le risque de voir une partie des électeurs susceptibles de la soutenir se tourner vers les alternatives Gary Johnson ou Jill Stein.
Deux comtés clés dans le Nevada
Le Nevada ne compte que seize comtés. Celui de Clark (ville de Las Vegas), bien ancré dans le camp démocrate est le plus important pour l’ancienne secrétaire d’Etat. Pour Hillary Clinton, le défi consiste à mobiliser ses partisans : le comté compte 480 926 électeurs enregistrés comme démocrates, 323 870 comme républicains, 229 298 comme non affiliés et 65 281 comme « autres ».
Lors de l’élection de 2012, 387 978 des 528 801 bulletins de vote en faveur de Barack Obama dans le Silver State l’ont été dans ce comté où le président a réalisé un score de 56,4 %, qui lui a permis de remporter le Nevada (52,3 %).
L’autre comté important est celui de Washoe qui comprend la ville de Reno. Le vote y est plus incertain. Traditionnellement républicain, comme le note Politico, il a voté deux fois pour George W. Bush et deux fois pour Barack Obama. Le comté totalise 105 410 électeurs inscrits comme républicains, 102 422 comme démocrates, 53 048 comme non enregistrés et 19 815 comme « autres candidats ».