L’ancien premier ministre portugais et ex-Haut commissaire de l’ONU aux réfugiés, tonio Guterres, le 12 avril 2016. | KENA BETANCUR / AFP

Après le vote informel du Conseil de sécurité des Nations unies, mercredi 5 octobre, Le Portugais Antonio Guterres est presque assuré de succéder au Sud-coréen Ban Ki-moon au poste de secrétaire générale de l’institution. Son élection devrait être formalisée jeudi. Plus convaincant que ses rivaux dès les auditions passées à la mi-avril devant l’Assemblée générale, il s’est imposé comme favori en remportant les cinq scrutins indicatifs organisés depuis.

L’ancien premier ministre portugais est réputé pour être un homme d’action. Socialiste modéré et pro-européen, il a gagné ses galons en tant que Haut commissaire de l’ONU aux réfugiés (HCR). Mis à l’épreuve par la plus grave crise migratoire qu’a connue le monde, en raison notamment de la guerre civile en Syrie, cet homme de 67 ans n’a cessé de lancer des cris d’alarme à la communauté internationale pour plus de solidarité envers les millions de migrants et demandeurs d’asile.

Le bilan de ses deux mandats à la tête du HCR (2005-2015) est également marqué par une réforme de son organisation interne, qui a permis de réduire d’un tiers le personnel basé à Genève afin d’augmenter sa capacité d’intervention d’urgence à l’international.

Création du « revenu minimum garanti »

Ingénieur de formation né à Lisbonne le 30 avril 1949, Antonio Guterres entame son parcours politique au sein des mouvements catholiques avant d’entrer au Parti socialiste portugais (PS), pour lequel il milite au lendemain de la Révolution des œillets de 1974, qui a mis fin à près de 50 ans de dictature. Elu député de la première législature en 1976, M. Guterres a longtemps siégé au Parlement, gagnant dans les joutes oratoires une réputation de tribun au verbe facile lui valant le sobriquet de « marteau-piqueur parlant ».

En 1992, il devient secrétaire général du PS, alors dans l’opposition. Sous la direction de cet homme d’appareil à l’allure simple et affable, les socialistes remportent les législatives d’octobre 1995, une victoire qui le propulse au poste de premier ministre. Le Portugal connaît à l’époque une période d’expansion accélérée et de quasi-plein emploi, qui permet à M. Guterres de créer le « revenu minimum garanti », une de ses mesures phare, et de faire passer dans l’opinion l’image d’un homme politique responsable et ouvert au dialogue.

Cet Européen convaincu se fixe par ailleurs pour objectif prioritaire l’entrée dans l’euro, pari qu’il remporte avec succès. Reconduit après les législatives de 1999, Antonio Guterres restera dans l’histoire comme le premier chef d’un gouvernement minoritaire à mener son mandat à terme depuis l’avènement de la démocratie au Portugal.

Ses détracteurs, notamment au sein du PS, lui reprochent cependant d’avoir contribué à la victoire du « non » lors du référendum de 1998 sur la dépénalisation de l’avortement, car ce fervent catholique n’a jamais caché ses réticences à l’égard de l’interruption volontaire de grossesse.

« L’action, le terrain, intervenir en permanence »

Lorsque le Timor oriental, ancienne colonie portugaise, est ravagé par les massacres de milices pro-indonésiennes en 1999, M. Guterres met en œuvre toute son habileté diplomatique pour parvenir à convaincre la communauté internationale de la nécessité d’une intervention des Nations unies.

Au premier semestre 2000, sa présidence tournante de l’Union européenne est considérée comme une réussite, grâce à l’organisation du premier sommet UE-Afrique et à l’adoption de l’Agenda de Lisbonne pour la croissance et l’emploi.

Pourtant, au Portugal, sa popularité faiblit. La conjoncture économique se détériore et M. Guterres apparaît incapable de donner un nouveau souffle à son second mandat. Fin 2001, les socialistes perdent les élections municipales et leur secrétaire général démissionne du poste de premier ministre sur le champ, à mi-parcours de sa mission.

Président de l’Internationale socialiste depuis 1999, il abandonne alors la vie politique nationale pour se consacrer à sa carrière diplomatique à l’étranger. Depuis, son nom revient tout de même parmi les candidats potentiels à chaque élection présidentielle au Portugal, mais il a toujours refusé d’endosser ce rôle d’arbitre : « J’aime l’action, le terrain, les choses qui m’obligent à intervenir en permanence. »

M. Guterres a eu deux enfants avec sa première épouse, décédée en 1998. Il s’est remarié depuis.