Sélection albums : Jacques Higelin, Stéphanie-Marie Degand et Christie Julien, Jimi Hendrix
Sélection albums : Jacques Higelin, Stéphanie-Marie Degand et Christie Julien, Jimi Hendrix
A écouter cette semaine : le 18e album électrique de maître Jacques Higelin ; une violoniste virtuose ; une alliance réussie entre jazz sixties et musique classique/contemporain...
- Jacques Higelin
Higelin 75
Pochette de l’album de Jacques Higelin, Higelin 75 (Jive Epic/Sony)
Tout en tendresse et délicatesse mélodique, Elle est si touchante mène sur une fausse piste. Titre d’introduction d’Higelin 75, le 18e album de maître Jacques, cet hommage à sa fille Izïa, ne prépare pas à un disque délaissant l’art concis du couplet-refrain au profit de la harangue poétique. « J’suis pas toujours d’humeur à écrire Tomber du ciel, si tu veux savoir ! », fulmine-t- il dans A feu et à sang, morceau de bravoure final de 21 minutes, antithèse de son tube guilleret de 1988. Plus que l’enchanteur disciple de Trenet, ressurgit ici le chien fou du milieu des années 1970 – et une période discographique lancée par l’album BBH 75 –, qui misait sur l’électricité rock comme vecteur de sa théâtralité. Isolé en forêt alsacienne, dans la ferme-studio aménagée par son vieux complice producteur et instrumentiste Rodolphe Burger (l’ex- Kat Onoma, déjà réalisateur de plusieurs de ses albums, dont l’excellent Amor Doloroso en 2006), Higelin retrouve à 75 ans une verdeur et une liberté lui permettant de lutter contre l’ombre grandissante de la Camarde. A l’instar de ses célèbres improvisations live, le bateleur lâche aussi la bride à un verbe, propulsé par un funk rock organique et des boucles électro orientalisantes. Stéphane Davet
1 CD Jive Epic/Sony
- Stéphanie-Marie Degand et Christie Julien
So French
Camille Saint-Saëns : « Introduction et Rondo Capriccioso ». César Franck : « Sonate ». Eugène Ysaÿe : « Caprice d’après l’étude en forme de valse de Camille Saint-Saëns ». Jules Massenet : « Méditation de Thaïs ». Maurice Ravel : « Tzigane ».
Stéphanie-Marie Degand (violon) et Christie Julien (piano).
Pochette de l'album « So French » de Stéphanie-Marie Degand et Christie Julien | NOMADMUSIC
Elle sait danser (Ysaÿe), elle sait chanter (Massenet), elle sait écouter (sa partenaire, la solide pianiste Christie Julien) mais, en premier lieu, Stéphanie-Marie Degand sait jouer du violon. Avec une aisance et une justesse à toute épreuve ; et elles sont nombreuses dans ce parcours semé d’embûches en doubles cordes ou triple croches. En arrivant au bout du programme – de musique française tantôt légère (Saint-Saëns), tantôt profonde (Franck), on croyait avoir tout entendu. Pourtant, la violoniste nous surprend encore dans la longue introduction de Tzigane, de Maurice Ravel, projetée dans un espace d’une grandeur exceptionnelle. De la rue à l’estrade, quel art de la scène ! Pierre Gervasoni
1 CD NoMadMusic.
- Christophe Dal Sasso
Les Nébuleuses
Pochette de l’album « Les Nébuleuses », de Christophe Dal Sasso. | JAZZ & PEOPLE/HARMONIA MUNDI
Flûtiste talentueux, orchestrateur et arrangeur d’une grande intelligence et subtilité dans sa manière de combiner les pupitres, de jouer avec les masses instrumentales, Christophe Dal Sasso est par ailleurs un compositeur inspiré et, pour l’auditeur, inspirant. Autant de qualités à retrouver dans son album Les Nébuleuses. Soit sept compositions avec, en point commun, l’alliance réussie entre le jazz du milieu des années 1960, à mi-chemin d’envols évocateurs de John Coltrane (1926-1967) – et pas seulement par le saxophone de David El-Malek – et de la période pré-électrique de Miles Davis (1926-1991), et diverses écritures de la musique classique/contemporaine. Tout étant ici, tant dans l’écriture que dans l’interprétation collective par le trio de deux violonistes et un violoncelliste et le quintette de Dal Sasso, maîtrisé, précis et d’une envoûtante beauté musicale. Sylvain Siclier
1 CD Jazz & People/Harmonia Mundi.
- Jimi Hendrix
Machine Gun
Pochette de l’album « Machine Gun », de Jimi Hendrix. | EXPERIENCE HENDRIX-LEGACY/SONY MUSIC
Lors de la soirée du réveillon du Nouvel An, le 31 décembre 1969, le guitariste Jimi Hendrix (1942-1970) présente au cours de deux concerts consécutifs au Fillmore East de New York son nouveau groupe, A Band of Gypsys, constitué du bassiste Billy Cox et du batteur Buddy Miles (1947-2008). Idem le lendemain, 1er janvier 1970, deux concerts. Hendrix se réinvente alors par le rhythm’n’blues, la basse funky de Cox, le jeu terrien, droit, de Miles, moins spectaculaire que celui du précédent batteur Mitch Mitchell. Et un nouveau répertoire, répété quelques jours avant. Un album d’extraits des concerts du 1er janvier sera publié rapidement quelques semaines plus tard, en mars. Le reste vint nourrir de nombreuses publications pirates et entra dans la légende, le groupe n’ayant pas dépassé un mois d’existence. Jusqu’à ce que les gestionnaires de l’héritage artistique de Jimi Hendrix ne mettent de l’ordre dans les archives et que soit publié officiellement, en 1999, un double CD avec d’autres extraits des quatre concerts. Lesdits gestionnaires ayant de la suite dans les idées, l’intégralité du premier concert du 31 décembre 1969 sort aujourd’hui. Onze thèmes, dont huit inédits (et non pas neuf comme l’indique l’étiquette sur la pochette). Musique de haut vol autant que document d’importance pour l’amateur d’Hendrix. Et possible première étape de l’intégrale des quatre concerts, album par album, avant regroupement dans un coffret. S. Si.