Université d’Angers (Maine-et-Loire), en octobre. | Camille Stromboni

La question était encore en suspens, elle est désormais tranchée. La réforme de la sélection en master, lancée par le gouvernement après l’accord obtenu dans la communauté universitaire, le 4 octobre, passera par la proposition de loi du sénateur Jean-Léonce Dupont (UDI), déposée en septembre. L’avantage étant que ce texte « portant adaptation du deuxième cycle de l’enseignement supérieur français au système licence-master-doctorat », a vu son examen au Sénat débuter mardi 12 octobre.

Najat Vallaud-Belkacem, ministre de l’éducation nationale, n’était pas enthousiaste à l’idée de s’appuyer sur un texte déposé par la droite. Mais le temps presse. « Nous avons examiné les différents véhicules législatifs et choisi celui qui garantissait la plus grande efficacité et la mise en œuvre la plus rapide pour la rentrée 2017 », se justifie-t-on rue de Grenelle. Le sénateur UDI du Calvados se félicite du « chemin parcouru », afin de rapidement mettre fin à l’insécurité juridique à laquelle les universités sont confrontées.

Les recours d’étudiants devant les tribunaux se sont multipliés depuis deux ans, contre la sélection en master, jugée illégale par le Conseil d’Etat, laissant les établissements démunis quant à la marche à suivre pour recruter en master. Le décret pris en mai n’avait apporté qu’une solution provisoire et partielle.

Conformément à l’accord trouvé entre l’ensemble des parties prenantes – organisations étudiantes, syndicats de personnels et présidents d’université –, la proposition de loi prévoit de mettre en place une sélection à l’université à l’entrée du master, avec des capacités d’accueil dans ces formations et la possibilité d’y subordonner l’admission « à l’examen d’un dossier de candidature et à une épreuve spécifique ou un entretien, selon des modalités définies au sein de l’établissement ».

La sélection à l’entrée du master 2 est, de son côté, vouée à disparaître : « L’accès en seconde année est de droit pour les étudiants ayant validé les deux semestres de première année », prévoit la proposition législative. Avec tout de même un régime d’exception : la sélection par l’examen du dossier du candidat restera autorisée à l’entrée du M2 dans la liste de formations inscrites dans le décret de mai. Celle-ci doit être modifiée dans les mois qui viennent pour concerner principalement le droit et la psychologie, où certains débouchés comme les concours de la magistrature, restent accessibles à bac + 4. Dans ces filières, l’entrée en M1 sera ouverte à tout titulaire d’une licence, prévoit la proposition de loi.

Un amendement adopté pour le droit à la poursuite d’études

Reste la question du droit à la poursuite d’études, prévu dans l’accord du 4 octobre. Comme il ne figurait pas dans le texte du sénateur de droite, il a fait l’objet d’un amendement de la sénatrice Dominique Gillot (PS) et des membres du groupe socialiste, adopté par la commission de la culture, de l’éducation et de la communication du Sénat.

S’ils en font la demande, les titulaires d’une licence qui ne sont pas admis dans le master de leur choix « se voient proposer l’inscription dans une formation de deuxième cycle en tenant compte de leur projet professionnel et de l’établissement dans lequel ils ont obtenu leur licence », prévoit l’amendement. Les conditions de mise en œuvre de ce droit seront précisées par décret. C’est à ce niveau réglementaire qu’il devrait être prévu que le recteur fasse trois propositions à tout étudiant recalé, tel que promis dans l’accord du 4 octobre.

Les élus Les Républicains réservent leur vote

Ce droit à la poursuite d’études provoque néanmoins la réserve des sénateurs Les Républicains. Si les socialistes, les Verts ou encore les élus UDI ont voté en faveur du texte amendé en commission, les sénateurs LR ont décidé de ne pas prendre part à ce vote. Ils réservent leur position au vote qui aura lieu lors de la séance publique au Sénat, les 26 et 27 octobre.

« Nous avons apporté des garanties aux interrogations que pouvaient avoir certains sénateurs autour de cette poursuite d’études, qui constitue un second round pour orienter efficacement l’étudiant, fait valoir Jean-Léonce Dupont. Ces propositions de master [effectuées par le rectorat aux étudiants recalés] doivent correspondre au projet professionnel de l’étudiant, qui doit remplir les prérequis fixés à l’entrée. Il doit enfin y avoir des places vacantes dans la formation proposée et le chef d’établissement donnera explicitement son accord », détaille-t-il.

Autre « garde-fou » prévu par l’élu du Calvados, dans un sous-amendement adopté en commission : une évaluation aura lieu à l’horizon 2020, notamment pour observer les effets de la réforme sur l’offre de formation de deuxième cycle. Cet ajout fait écho aux craintes de certains de voir se développer des masters « poubelles » pour accueillir les candidats faisant valoir leur droit à la poursuite d’étude. « J’ai le sentiment que les points de vue convergent », juge le sénateur, qui espère emporter l’adhésion lors du vote en séance.